Le suicide du sénateur socialiste Jean Germain, mis en cause dans l'affaire des "mariages chinois"
"Je sais le mal que je vais faire". C'est par ces mots que commençait la lettre d'adieu de Jean Germain. Le sénateur socialiste et ancien maire de Tours, âgé de 67 ans, s'est donné la mort mardi 7, le jour de l'ouverture du procès dit des "mariages chinois" dans lequel il devait comparaître sur le banc des accusés.
Cet événement à mi-chemin entre politique et fait divers a marqué l'actualité chargée de la semaine, pour sa dimension dramatique bien sûr. Mais aussi pour l'émoi qu'a suscité le geste désespéré de cet homme qui n'a pas supporté "l'injustice et le déshonneur" et qui, jusque dans les derniers mots adressés à ses proches dans la lettre retrouvé près de son corps, a toujours nié avoir "détourné un centime".
Fils d'un pâtissier et héros de la Résistance, maire de Tours de 1995 à 2014 et sénateur depuis 2011, Jean Germain s'est donné la mort dans le fond du garage de sa maison tourangelle, d'une balle dans la tête tirée au fusil de chasse. Le matin même, il avait laissé ses proches partir avant lui pour le tribunal où s'ouvrait son procès pour complicité de prise illégale d'intérêt et détournement de fonds publics pour les fameux "mariages chinois".
Les réactions du monde politique, de gauche comme de droite, ont afflué dès l'annonce de la mort du sénateur. Jusqu'à François Hollande, qui a évoqué le "drame terrible qu'un homme puisse se supprimer parce qu'il ne veut pas que son honneur soit atteint" et regretté la disparition d'un "grand élu". Le président du Sénat Gérard Larcher a quant à lui fait respecter une minute de silence aux sénateurs en mémoire de leur collègue disparu. Il a également eu ces mots: "Nous sommes tous atterrés par cette terrible nouvelle (…). Jean Germain s'est senti coupable avant d'être jugé par un système qui n'a pas changé depuis Pierre Bérégovoy".
Car ce suicide d'une balle dans la tête d'un élu socialiste récemment battu (Jean Germain a perdu la mairie de Tours aux municipales de 2014) et éclaboussé par une affaire financière n'est pas sans rappeler celui de Pierre Bérégovoy, le 1er mai 1993. Autre similitude, pour ces deux hommes: les médias et la rumeur sont accusés d'avoir précipité leur geste tragique.
Quoi qu'il en soit, le procès des "mariages chinois", évidemment reporté, aura bien lieu. Il a été renvoyé aux 13, 14 et 15 octobre 2015 en raison de "circonstances insurmontables" et le contrôle judiciaire des quatre autres prévenus (dont Lise Han, ancienne collaboratrice de Jean Germain) a été maintenu.
> La lettre d'adieu de Jean Germain: "Je sais le mal que je vais faire, la peine que je vais diffuser à ceux qui m’aiment. Mais on ne peut laisser la chasse systématique aux politiques se dérouler “normalement”, quotidiennement. Il est des êtres, j’en suis, pour lesquels injustice et déshonneur sont insupportables. Soyez sûrs que je n’ai jamais détourné un centime, que je ne me suis pas enrichi, que j’ai toujours œuvré pour ce que je pensais être le bonheur des Tourangeaux. Je laisse des courriers à mes proches qui, je l’espère, leur permettront de comprendre. Amitiés à toutes et à tous".
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