Loi travail : "Il faut que l'essentiel de cette réforme soit revu", prévient Benjamin Lucas (MJS)

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Propos recueillis par Pierre Plottu
Publié le 11 mars 2016 - 13:13
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Le président du MJS Benjamin Lucas.
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©Mathieu Delmestre
"Le gouvernement devrait préférer avoir le soutien de son camp plutôt que d'aller chercher celui de la droite", déplore Benjamin Lucas.
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Peu de sécurité et trop de flexibilité: la loi Travail n'est "pas acceptable en l'état", dit Benjamin Lucas, président des Jeunes socialistes. Pire, "le vrai souci de cette loi, c'est l'esprit dans lequel elle est construite", déplore, dans une interview à "FranceSoir", celui qui estime que "le code du travail est une chance et non un frein" à l'emploi.

De la loi Travail faisons table rase, ou presque. Voilà en substance le message du président du Mouvement des jeunes socialistes (MJS) Benjamin Lucas, qui assure à FranceSoir que "le vrai souci de cette loi, c'est l'esprit dans lequel elle est construite". Trop de flexibilité et très peu de sécurité: le compte n'y est pas, dit-il, plaidant pour un retrait du texte malgré les quelques concessions annoncées par François Hollande, Manuel Valls et Myriam El Khomri. Benjamin Lucas veut ainsi que "l'essentiel de ce qu'il y a dans cette réforme soit revu" afin de rassembler la gauche. D'autant que 2017 arrive à grands pas.

Plus de 200.000 personnes dans la rue à l'appel des syndicats et des organisations de jeunesse, dont la vôtre, mercredi 9 contre le projet de loi Travail de Myriam El Khomri, c'est une réussite?

"Bien sûr que c'est une réussite: on est sur des niveaux de mobilisation supérieurs à ce qu'il y avait au début des manifestations contre le CPE (le Contrat première embauche de Dominique de Villepin, abandonné sous la pression de la rue en 2006, NDLR). La mobilisation a largement dépassé le cadre des militants des organisations qui appelaient à ce rassemblement".

La ministre du Travail a annoncé dès le lendemain, jeudi 10, des concessions possibles (surtaxation des CDD, sur le temps de travail des apprentis) et François Hollande a également reconnu qu'il y aurait "forcément" des "corrections" du projet de réforme. Est-ce suffisant?

"Ceci prouve bien qu'il y avait un problème, que cette réforme n'était pas acceptable en l'état. Le gouvernement disait qu'il y avait des discussions, mais sans dire sur quoi il était prêt à négocier, et là il fait des annonces dès le lendemain de la mobilisation. D'ailleurs une grande partie des propositions des Jeunes socialistes ont été reprises. Mais le vrai souci de cette loi, c'est l'esprit dans lequel elle est construite: le code du travail serait un frein à l'emploi, ce qui est nié notamment par l'OCDE -qui n'est pas une organisation de jeunesse de gauche".

Faut-il revoir la loi ou exigez-vous un retrait pur et simple?

"Mon sujet, c'est de faire une autre réforme. Il faut que l'essentiel de ce qu'il y a dans cette réforme soit revu, qu'on ait une réforme de progrès qui soit utile aux jeunes et aux salariés, qui corresponde à nos engagements politiques et électoraux. Retrait ou réécriture? Je suis plutôt favorable à un retrait car c'est le préalable à la réécriture, mais c'est un débat à la marge: si on fait une réécriture totale, cela équivaut à un retrait. Il y a aussi des points qu'il faut valoriser dans cette réforme, comme le compte personnel d'activité ou encore le droit à la déconnection, auquel il faut toutefois donner du contenu".

Quelles sont vos revendications précises?

"L'esprit de la réforme doit changer: le code du travail est une chance, un instrument de protection des plus faibles, et non un frein ou un outil de régulation économique. Il faut introduire des dispositions pour garantir le partage du temps de travail et des mesures jeunesse très fortes. Par exemple les chômeurs de moins de 25 ans sont pour l'heure exclus du RSA socle, il faut qu'ils y aient accès. Il faut aussi renforcer le CDI comme étant la norme et donc plus taxer les contrats précaires. Sur la base d'une réforme qui apporte des droits nouveaux aux salariés et des conquêtes sociales, on pourrait mettre toute la gauche d'accord, avoir un grand rassemblement".

La "flexisécurité" invoquée par l'exécutif est-elle un gros mot?

"Il n'y a jamais de gros mots mais je constate que, dans ce texte, il y a beaucoup de flexibilité et très peu de sécurité. Je ne vois pas en quoi licencier plus facilement permet d'embaucher plus? Licencier plus facilement, ça permet juste de licencier. Si on a un problème de chômage dans ce pays, c'est parce que les carnets de commande sont vides. Il faut relancer la demande par de meilleurs salaires et l'augmentation des minimas sociaux. On se trompe de problème, et d'ailleurs partout où on a fait du libéralisme ça n'a pas fonctionné".

Allez-vous poursuivre la mobilisation?

"En l'état il y a une mobilisation qui s'est lancée et qui dépasse le cadre de nos organisations. C'est une mobilisation populaire de jeunesse, comme au moment du CPE. Donc oui, il faut poursuivre. Ça aide aussi le gouvernement, même si ça peut paraître paradoxal. S'il s'entête sur cette réforme, il y aura du monde dans la rue même si le MJS n'appelle pas à manifester. Si on est capable d'écrire une réforme qui convient à la gauche, on en sortira grandi et on aura aussi plus de chances de gagner les prochaines élections (la présidentielle de 2017, NDLR). Le gouvernement devrait préférer avoir le soutien de son camp plutôt que d'aller chercher celui de la droite".

 

 

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