Remaniement ministériel : Macron affaibli, vers un big bang gouvernemental ?

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Pierre Plottu
Publié le 05 octobre 2018 - 13:56
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Le président français Emmanuel Macron pendant un discours à Goyave (Guadeloupe), le 28 septembre 2018.
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© Thomas SAMSON / POOL/AFP
En réaction à la crise née de la démission de Gérard Collomb, Emmanuel Macron pourrait enclencher un large remaniement du gouvernement Philippe 2.
© Thomas SAMSON / POOL/AFP
Déjà affaibli par l'affaire Benalla et le manque de résultats, l'autorité d'Emmanuel Macron a été encore un peu plus fragilisée par le départ de Gérard Collomb. Au point que le président est sommé de réagir par sa majorité qui lui réclame un signal fort, par exemple un remaniement large du gouvernement.

Emmanuel Macron est fragilisé. Par l'absence de résultats tangibles pour l'opinion et par l'affaire Benalla tout d'abord, mais aussi, désormais, par les défections dans son propre camp. A l'image de la démission fracassante de Gérard Collomb, mardi 2, qui a bousculé ce président se voulant maître des horloges mais désormais contraint d'agir sous la pression. Le chef de l'Etat doit reprendre la main et, pour ce faire, pourrait choisir de remanier largement son gouvernement afin de relancer son quinquennat.

A peine 17 mois qu'il est élu et déjà l'autorité d'Emmanuel Macron est menacée. Aux affaires touchant ses proches politiques (Bayrou, Ferrand...), a désormais succédé la défiance au sein de son propre camp où de plus en plus de voix s'élèvent pour critiquer sa gestion de la majorité. Les reproches sont multiples: il fallait frapper plus vite et plus fort contre Benalla, il faut arrêter les dérapages pas toujours contrôlés face aux Français, etc. Mais, surtout, il faut sortir de l'équipe ces ministres "inutiles" et reconstruire une dynamique en remaniant.

Certains ministres brillent ainsi par leur transparence, à l'image de Delphine Gény-Stephann, secrétaire d'Etat auprès du ministre de l'Economie et des finances, ou d'Olivier Dussopt, secrétaire d'Etat auprès du ministre de l'Action et des comptes publics, qui restent inconnus de plus de 90% des Français, selon un récent sondage de l'Ifop pour le JDD.

D'autres encore sont en déficit de résultats Bruno Le Maire (Economie) ou Nicole Belloubet (Justice) , tandis que certain font preuve d'un manque d'allant qui irrite leurs collègues, comme Jacques Mézard (Cohésion des territoires), qui ne se cache même plus pour dire qu'il en a "marre"...

Sans oublier ceux qui traînent des casseroles, comme Muriel Pénicaud (Travail), mouillée dans l'affaire Business France, ou encore François Nyssen (Culture), et ses libertés avec le code de l'urbanisme quand elle dirigeait Actes Sud. Au total, une demi-douzaine de membres du gouvernement "Philippe 2" seraient sur la sellette.

A l'inverse, un certain nombre de jeunes loups de LREM frappent à la porte, tels les députés Sacha Houlié, Amélie de Montchalin, Aurore Bergé et d'autres. Certains estiment qu'ils méritent une promotion pour avoir défendu coûte que coûte le président, mais cela fait-il un bon ministre? En outre, Emmanuel Macron, qui apparaît en manque cruel de cadres, peut-il se permettre de faire de nouveaux déçus dans ses rangs?

Autant de "trous dans la raquette" qui ne sont pas nouveaux, mais qui passaient inaperçus -ou presque- tant qu'Emmanuel Macron était en position d'incarner à lui seul un pouvoir fort. Ce n'est plus le cas tant le président jupitérien s'est "normalisé". Il ne peut plus être seul sur tous les fronts et notamment pour ce qui est de tenir une majorité qui doutait déjà après l'affaire Benalla et le départ de Nicolas Hulot.

Ces bourrasques en ont également entraîné une autre, qui a cette fois soufflé dans les rangs de la majorité, lorsque l'Elysée a imposé Richard Ferrand pour succéder à François de Rugy à la présidence de l'Assemblée nationale.

Lire aussi: Mal élu, Richard Ferrand accède au perchoir de l'Assemblée

Dans ce contexte, la démission de Gérard Collomb achève de fragiliser Emmanuel Macron. Médiatiquement d'abord, car l'ancien (et futur) maire de Lyon, "marcheur" de la première heure, a publiquement critiqué l'exercice du pouvoir de son ancien protégé, qu'il juge déconnecté et arrogant. Un désenchantement qui touche toute une partie de la majorité depuis plusieurs mois.

Mais ce départ est aussi l'illustration de l'affaiblissement d'Emmanuel Macron. Le président s'est ainsi fait littéralement tordre le bras par son ministre de l'Intérieur dont il a refusé la démission mais qui est parti tout de même, le tout largement étalé dans les médias. Après un affront par Hulot, le président a reçu un bras d'honneur constitutionnel de la part de son ex-mentor.

La situation est telle que l'entourage du président le presse en privé et semi-publiquement -les "off" abondent dans les médias- d'envoyer un signal fort. Remanier largement pourrait faire office de.

A condition de donner du sens, politiquement parlant, à ce renouvellement du casting gouvernemental. Emmanuel Macron va vouloir utiliser ce grand moment pour envoyer un message. Reste à savoir lequel. Se recentrer en intégrant une ou des figures de gauche macron-compatible pour incarner un virage plus social? Insister avec des profils technocratiques ou issus de la société civile pour acter l'avènement du nouveau monde? Faire entrer de nouveaux libéraux (déjà bien représentés dans le gouvernement) pour s'engager un peu plus loin sur le chemin de la start-up nation? Jupiter seul le sait.

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