Crise en Ukraine - Laurent Fabius : "il y a un risque de guerre à trois heures d'avion de Paris"

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Pierre Plottu
Publié le 11 février 2015 - 09:30
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Laurent Fabius.
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Laurent Fabius à propos de la Grèce: "si le seul objectif c'est l'austérité, il ne faut pas s'étonner que les gens se révoltent".
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Laurent Fabius était l'invité de France Inter, ce mercredi matin. Le ministre des Affaires étrangères est notamment revenu sur les négociations de paix "de la dernière chance" prévues ce mercredi entre l'Ukraine, la Russie, la France et l'Allemagne.

Si aucun accord de paix n'est trouvé, ce sera la guerre?

"Il y a un risque de guerre, c'est vrai. A trois heures d'avion de Paris".

"Il va y avoir ce matin un contact entre le président (François Hollande, NDLR) et la chancelière (Angela Merkel, NDLR) et la décision sera prise ou non d'aller à Minsk".

"C'est très probable mais il faut d'abord faire le point (…). Il y encore pas mal de points à régler".

"Les conversations qu'on va avoir à partir de la fin de l'après-midi seront tout à fait décisives".

"Il y a deux objectifs. Le premier, évidemment obtenir un accord. Le deuxième, qu'il soit traduit sur le terrain. En septembre dernier il y a avait eu un accord qui n'avait pas été respecté sur le terrain".

 

L'autonomie de Donetsk reviendrait-il à une partition du pays?

"Le gouvernement ukrainien accepte une décentralisation qui est absolument légitime. Les séparatistes et les Russes voudraient aller plus loin. Nous (La France, NDLR) on essaye de trouver une médiation".

"Il faut que l'intégrité de l'Ukraine soit préservée, mais il faut en même temps que les gens de l'Est puissent parler russe et puisse avoir un certain degré d'autonomie".

"Il y a un autre problème extrêmement important: c'est la garantie de la frontière. Comme va-t-elle être respectée? Pour le moment les Russes mettent toute une série de condition alors que les Ukrainiens disent +si vous reconnaissez l'intégrité de notre territoire, il faut que la frontière puisse être garantie+".

"Il y a aussi des questions sur le cessez-le-feu, le recul des armes lourdes, l'amnistie des prisonniers, etc".

"C'est vraiment une négociation de la dernière chance. François Hollande et Angela Merkel ont fait une œuvre utile en relançant la discussion, sinon on allait vers la guerre".

 

Avez-vous confiance en Vladimir Poutine?

"J'ai retenu la leçon de François Mitterrand qui me disait toujours: +la question dans une négociation n'est pas d'avoir confiance dans son interlocuteur, c'est de faire en sorte qu'il ne puisse pas vous tromper+".

 

Poutine peut-il donc vous tromper?

"Oui, mais ce serait pour lui extrêmement couteux. Les sanctions prises nous coûtent, mais elles lui coûtent encore plus. La situation économique actuelle de la Russie est absolument désastreuse".

"Sur le plan du crédit international, il y a eu beaucoup de recul envers la Russie".

 

Comme il l'a fait précédemment en Géorgie (en 2008) et en Crimée (en 2014), Vladimir Poutine peut-il rééditer la stratégie du "fait accompli" dans l'est de l'Ukraine?

"Nous espérons que non, nous travaillons pour que ce ne soit pas le cas".

"Sur la Crimée, nous nous sommes tous mis d'accord pour dire que nous ne reconnaissions pas ce fait accompli et ça a donc toute une série de conséquences".

"C'est vrai que récupérer la Crimée dans l'Ukraine, et encore plus par la force, n'est pas envisagé".

 

Pourquoi ne pas fournir d'armes à l'Ukraine?

"Armer et surarmer n'est pas une solution dans le cas de l'Ukraine. Nous sommes pour une solution politique".

"Ce n'est pas dans nos plans".

"La question principale n'est pas celle de l'armement, c'est celle de l'OTAN. Nous avons dit et répété que ce n'est pas notre idée que l'Ukraine entre dans l'OTAN, ce qui n'est pas un geste anodin car l'article 5 prévoit que si un pays est attaqué, les autres doivent se porter à son secours. Ce qui signifierait notamment que la question de la géographie de l'Ukraine soit parfaitement claire".

 

L'avenir de l'Ukraine se joue-t-il plus à Moscou et Washington qu'en Europe?

"Je pense que vous êtes injuste. L'initiative prise par Angela Merkel et François Hollande fait que c'est l'Europe, en tout cas ces deux pays (la France et l'Allemagne, NDLR), qui est à l'initiative".

"(Ce plan de paix) est un plan franco-allemand".

 

Refuser de négocier avec le Premier ministre grec Alexis Tsipras peut-il le pousser "dans les bras de Poutine"?

"La Grèce a traditionnellement des liens avec la Russie, c'est vrai que là il y a eu un certain nombre de déclarations".

"D'un point de vue économique, il y a une grande difficulté: c'est vrai que les électeurs grecs ont voté pour qu'il y ait un changement radical, mais de l'autre la Grèce a pris des engagements en particulier en termes d'endettement".

"Il faut que les ministres des Finances européens (qui se réunissent ce mercredi, NDLR) trouve un chemin qui permette à la fois que la Grèce retrouve une certaine croissance mais en même temps on ne peut pas annuler les dettes car ce serait les Français, les Allemands et les autres qui les paieraient".

 

La Troïka a-t-elle eu tout faux?

"Il était normal qu'il y ait des réformes en Grèce, et il en reste à faire. Mais en même temps, si on donne à un pays l'austérité comme seul objectif… je rappelle qu'un certain nombre de grecs ont vu leur revenu diminuer de 50%".

"Si le seul objectif c'est l'austérité, il ne faut pas s'étonner que les gens se révoltent".

 

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