Les Young Global Leader, l'organisation du WEF pour "infiltrer" les gouvernements

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France-Soir
Publié le 19 mai 2023 - 16:00
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Photo de Evangeline Shaw sur unsplash.com
Klaus Schwab, fondateur du Forum économique mondial, qui se réunit à Davos (Suisse).
Photo de Evangeline Shaw sur unsplash.com

ENQUÊTE - Klaus Schwab, fondateur du Forum Économique mondial (WEF), dit qu’il en est “très fier”. Selon lui, ils “infiltrent” les gouvernements à travers le monde, choisissent les dirigeants de demain et votre président ou premier ministre en a probablement fait partie.

Qui peuvent-ils bien être ? Ce sont les “Young Global Leaders” (YGL), un programme du WEF pour sélectionner les futurs “maîtres du monde” qui vont “façonner la politique, la société et le monde qui les entourent”, pour reprendre ses dires. Qui sont ces personnes ? Comment sont-elles sélectionnées ? Qui en a déjà fait partie et quelles en sont les actuelles figures ?  

Organisation de lobbying

Le Forum économique mondial, qui se définit comme une association à but non lucratif, est une organisation de lobbying qui réunit chaque année depuis 1974, à l’occasion d’un sommet à Davos en Suisse, des dirigeants d’entreprises et des responsables politiques.

Son fondateur Klaus Schwab, économiste allemand, rassemble des personnes qui ont “le pouvoir d’apporter des changements” pour évoquer le “nouvel ordre mondial” en remplacement à “l’ordre libéral” actuel, “menacé 70 ans après” son instauration. 

C’est en 2004 que Schwab lance le Forum des Young Global Leaders, pour remplacer le programme en vigueur depuis 1993, appelé “Global Leaders for Tomorrow”. L’objectif était “d’aider le monde à faire face à des problèmes de plus en plus complexes” en créant une “communauté proactive des dirigeants de la prochaine génération du monde”, capables “d’influencer la prise de décision”.

Cette organisation, dirigée par un Conseil d’administration, présidé entre autres par lui-même et sa fille Nicole, dit sélectionner “les voix du futur et les espoirs des prochaines générations”.  

Macron, Zuckerberg, Musk ... des Young Global Leaders 

Présenté en 2008 par Bruce Nussbaum, journaliste de Bloomberg BusinessWeek, comme “l’un des réseaux sociaux privés les plus exclusifs” dans le monde, les YGL ont jusque-là compté dans leurs rangs plus de 1400 membres et alumnis (Ancien élève, NDLR) issus de 120 nationalités.

Chaque nouvelle promotion se voit attribuer une mission. Celle qui comptait parmi les siens Emmanuel Macron, alors ministre de l’Économie sous François Hollande en 2016, a été élue pour façonner la quatrième révolution industrielle”.  

Parmi les anciens membres des YGL figurent des personnalités considérées comme étant les plus puissantes de ce monde. Le président Emmanuel Macron, le Premier ministre canadien Justin Trudeau, les homme d’affaires Elon Musk et Jack Ma, le PDG de Meta, Mark Zuckerberg ou encore l’ex-première ministre néo-zélandaise Jacinda Ardern sont des "alumnis" (anciens élèves, ndlr) de cette organisation, selon son site Internet ou son fondateur. D’autres figures, ni politiques ni économiques, comme l’acteur Leonardo DiCaprio, le pilote Michael Schumacher ou encore l’actrice Charlize Theron sont aussi des anciens membres.  

Comment ces personnalités ont-elles été sélectionnées pour faire partie des Young Global Leaders ? Sur la base de quelles critères ? Qui, chez le Forum économique mondial, procède à la sélection des “futurs dirigeants” qui “façonneront le monde” ?

Cette organisation à but non lucratif, basée tout comme le WEF en Suisse, explique le processus de sélection “pour identifier et sélectionner chaque année des leaders de moins de 40 ans qui dirigent leur pays, servent leurs communautés et lancent des initiatives novatrices pour inspirer de nouvelles façons de conduire le changement social”.  

C’est les anciens membres qui nomment les nouveaux “Jeunes leaders mondiaux” pendant un mandat de six ans. Les candidats, qui doivent avoir entre 28 et 38 ans, doivent totaliser 5 à 15 ans de “leadership, d’expérience professionnelle exceptionnelle et de réalisations reconnues” dans de nombreux domaines, comme la politique, l’entrepreneuriat, la recherche académique, l’art, les médias ou la société civile. 

Ils doivent également démontrer un “engagement personnel à servir la société, aux niveaux local et mondial”. Les candidats doivent, en outre, avoir une “bonne réputation” et détenir, selon leurs secteurs d’activités, des titres ou des responsabilités élevées.

Les candidatures issues du secteur privé, des startups et de la société civile doivent concerner des présidents, des présidents de conseils d’administrations ou des directeurs. Les candidats du secteur public doivent être des chefs de gouvernements, des ministres, des parlementaires ou même des maires.

Tout au long du processus de sélection, les candidats sont soumis à un droit de veto. Ils doivent, en d’autres termes, faire l’unanimité auprès des anciens membres. Le Forum de Davos ne dévoile pas les critères sur lesquels le comité de sélection se base pour choisir les 100 participants de chaque promotion.  

Le cabinet de Trudeau “infiltré” par les YGL 

Selon un communiqué du WEF, les personnalités nominées suivront pendant trois ans un programme de développement de leadership “pour les aider à avoir un impact encore plus significatif sur la société”. Depuis 2007,les participants sont invité au “Summer Davos”, qui les réunit avec les autres délégations du Forum.  

Si les anciens membres témoignent régulièrement dans les rapports annuels des Young Global Leaders ou dans les médias sur l’impact de ce programme dans leurs positions respectives, ce n’est visiblement pas ce dont Klaus Schwab est le plus “fier”. Tout comme le World Economic Forum, la vocation première des TGL est la gouvernance mondiale.  

En 2017, dans une vidéo relayée sur les réseaux sociaux et la plateforme YouTube, l'économiste allemand expliquait avec “fierté” comment le Forum économique mondial a “infiltré” des gouvernements à travers le monde, particulièrement au Canada.

Lors d’une conférence à la John F. Kennedy School of Government de l’Université de Harvard, il a affirmé que la chancelière allemande, Angela Merkel ou encore le président russe Vladimir Poutine ont été membres des Young Global Leaders. Contrairement à Emmanuel Macron ou encore Jacinda Ardern, leurs homologues ne figurent pas dans la liste des alumnis et, sauf dérogation de la part du WEF, étaient âgés de plus de 40 ans en 2004, date de la première promotion des YGL.  

“Mais ce dont nous sommes très fiers maintenant, poursuit Schwab, c'est la jeune génération comme celle du Premier ministre Trudeau et du président de l’Argentine (Mauricio Macri, ndlr)… Nous avons infiltré leurs cabinets (...) Je sais que la moitié de son cabinet (Trudeau, ndlr), voire plus de la moitié de son cabinet, sont en fait des Young Global Leaders”, a-t-il affirmé.  

En France, de nombreux collaborateurs du chef de l’État sont également d’anciens membres de cette organisation du WEF. Il s’agit de Marlène Schiappa, alors Secrétaire d’État en 2018 et Gabriel Attal, alors ministre de l’Education en 2020 ou Christel Heydemann, actuelle PDG du groupe Orange. Najat Vallaud-Belkacem, ministre de l’Éducation sous François Hollande, est l’autre responsable française à être membre des YGL.  

Comme à l’accoutumée, la promotion de 2023 compte dans ses rangs de nombreux actuels responsables politiques, comme le sous-secrétaire du Cabinet de la Maison-Blanche, Daniel Arrigg Koh ou Benjamina Karic, maire de Sarajevo. D’autres participants sont des hauts cadres dans des entreprises internationales comme Siemens ou Meridian ou encore le BlackRock.

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