Rencontre Kim/Trump : le Japon est-il le grand perdant ?
Officiellement, il est satisfait. Le Premier ministre japonais Shinzo Abe a salué ce mardi 12 la rencontre à Singapour entre le leader nord-coréen Kim Jong-un et le président américain Donald Trump. "A travers ce sommet USA-Corée du Nord, l'intention du président Kim Jong-un de voir une dénucléarisation complète de la péninsule coréenne a été confirmée par écrit. Je soutiens ce premier pas vers une résolution d'ensemble des questions concernant la Corée du Nord" a-t-il déclaré lors d'une conférence de presse. Pourtant, sur le strict plan diplomatique, le Japon a été le grand absent de cette séquence historique, et pourrait être l'un des perdants.
Pour l'archipel, la dénucléarisation complète de la Corée du Nord n'est pas le seul enjeu pour sa sécurité. Dans une tribune publiée dans le New York Times (voir ici), le journaliste japonais Yôichi Funabashi rappelait que même si la Corée du Nord démantelait son programme de missiles balistiques intercontinentaux (ICBM), rien n'indique que son accord avec Washington inclura les missiles à courte et moyenne portée, qui, eux, peuvent atteindre le Japon. Tokyo n'est en effet qu'à 1.200 kilomètres de Pyongyang. De plus, les Etats-Unis pourraient à terme réduire, dans le cadre de l'accord, leur présence militaire dans la région. Donald Trump a déjà confirmé, dans la foulée de la rencontre de ce mardi 11, qu'il renonçait aux exercices militaires conjoints que l'armée américaine menait avec la Corée du Sud, admettant qu'ils étaient "très provocateurs" à l'égard du Nord.
Autant d'éléments qui font craindre à Tokyo une baisse de la protection militaire de son allié américain. Shinzo Abe pourra toujours se consoler de cette situation car elle pourrait relancer les velléités politiques de remilitarisation de l'archipel dont il est partisan. La crainte du retour de la menace nord-coréenne pourrait même servir d'argument pour remobiliser l'opinion autour du Premier ministre miné par une série de scandales sur le plan intérieur.
Voir aussi - Japon: vers un budget de la défense record face à la menace de la Corée du Nord
Autre déception sur le plan diplomatique, le Japon attendait beaucoup de la la rencontre pour que Donald Trump mette sur le tapis un sujet majeur de discorde entre Tokyo et Pyongyang: la transparence sur le sort des ressortissants nippons enlevés par les services nord-coréens dans les années 1970 et 1980. Le président américain a finalement annoncé que ce point "n'a pas été mis dans le document" (l'historique déclaration commune, NDLR) tout en promettant que ce sujet ne sera pas oublié.
Des résultats médiocres donc sur le plan diplomatique et qui pourrait de plus peser sur les comptes publics japonais. Le Japon pourrait en effet prendre en charge une partie de la dénucléarisation de la Corée du Nord, même si ce point demeure flou, tout comme la durée de l'engagement. Selon plusieurs spécialistes, si la suspension pure et simple du programme en cours prendra moins d'un an, il faudra au minimum entre six et dix ans (d'autres sources parlent de 15 ans) pour démanteler intégralement le potentiel militaire nucléaire de la Corée du Nord.
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