Trump en état d’arrestation : obstacle ou tremplin pour 2024 ?

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Chloé Lommisan, France-Soir
Publié le 20 mars 2023 - 18:08
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Donald Trump
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CHANDAN KHANNA / AFP
Donald Trump, le 26 février dernier à la Conservative Political Action Conference (CPAC), à Orlando, en Floride.
CHANDAN KHANNA / AFP

Donald Trump s'attend à être placé en garde à vue demain, dans le cadre de l’affaire Stormy Daniels. C'est en tout cas ce qu’il a déclaré savoir, le 18 mars dernier, sur son réseau social Truth. Exhortant sa base à le soutenir en pleine campagne des primaires présidentielles, il bénéficie de l’appui de la plupart des pontes du parti Républicain. Tandis que les aficionados de l’ancien président des États-Unis considèrent son éventuelle arrestation comme un tremplin pour l’élection de 2024, ses adversaires évoquent quant à eux la fin de sa carrière politique. Dans les faits, constitutionnellement, rien ne peut empêcher Donald Trump de se représenter. 

En 2006, lors d’un tournoi de golf à Lake Tahoe (Sierra Nevada), Donald Trump a-t-il rencontré l’actrice de films pornographiques Stephanie Clifford, alias Stormy Daniels, et a-t-il obtenu des rapports sexuels tarifés ? Dix ans plus tard, alors en course à l’élection présidentielle américaine, a-t-il utilisé les fonds de sa campagne électorale de 2016 afin d’acheter le silence de l’actrice en lui versant la somme de 130.000 dollars ?

Accord de non-divulgation

L’ancien président des États-Unis a toujours nié cette rencontre avec l’actrice et a dénoncé une tentative “d’extorsion”. 

Mais un accord de non-divulgation (un contrat légal qui permet entre deux parties de maintenir des informations confidentielles) a bien été convenu en 2016, élaboré par un proche conseiller de Trump, l’avocat Michael Cohen, qui a lui-même un passé judiciaire loin d’être irréprochable.

Après avoir accepté de collaborer avec la justice, en plaidant coupable de violations de la loi électorale, de fraudes bancaires et fiscales, ce dernier a été condamné à 3 ans de prison. 

En soi, le paiement de l’actrice par l’ancien président de la République américain n’aurait “rien de criminel”, selon John Coffe, professeur de droit à l’université de Colombia (propos recueillis par l’AFP). Ce qui serait “illégal, serait d'avoir falsifié les documents commerciaux d’une entreprise”, selon le spécialiste en criminalité financière. 

L'appel au grand jury du procureur du district de Manhattan

L’entreprise en question est la Trump Organization. Celle-ci aurait remboursé à Michael Cohen les 130.000 dollars versés des mains de l'avocat à l’actrice, au bénéfice de Donald Trump. Ce remboursement aurait été “déclaré comme étant destinés à couvrir des frais juridiques”. Ce qui, vis-à-vis du droit, constituerait une fausse déclaration, ce qui ne suffirait pas à qualifier un "crime" mais uniquement un "délit".  

Une qualification qui ne satisfait pas le procureur du district de Manhattan : Alvin Bragg souhaiterait manifestement voir l’ancien président des États-Unis poursuivi pour crime. Comment ? En essayant de démontrer que la “falsification a eu lieu dans le but de cacher un autre crime”, en l'occurrence un don illégal à la campagne de Trump en 2016.

Un raisonnement juridique particulièrement complexe, qui nécessite l'appel à la réunion d'un “grand jury”. Celui-ci est constitué de 23 citoyens qui se réunissent à huis clos dans le but de déterminer s’il existe assez de preuves pour former “un acte d’accusation”.  

Donald Trump prétend que le procureur Alvin Bragg aurait décidé de passer à la vitesse supérieure en souhaitant procéder à une arrestation et à une éventuelle inculpation. Selon lui, celles-ci auraient lieu demain mardi 21 mars. Il a alerté ses troupes à ce propos le 18 mars dernier sur son réseau social Truth : 

 

Cette démarche de la justice newyorkaise a galvanisé les troupes de Trump, sur les réseaux sociaux. Les autorités redoutent aussi des débordements dans les rues : le département de la police de New York (NYPD) a préféré déployer des barricades devant le tribunal pénal de Manhattan, redoutant une forte mobilisation populaire. 

Son adversaire au sein des primaires, Mike Pence, pourtant souvent en froid avec ce dernier depuis l’élection de 2020, y voit ce qu’il nomme une “poursuite politique” et indique “ne pas avoir l’impression” que “les Américains veulent voir ça”. 

En dehors de la sphère politique, le soutien le plus rapide, franc et massif, est venu de la part d’Elon Musk, dans un tweet : “Si cela se produit (l’arrestation), il sera réélu avec une victoire écrasante.”   

Il rejoint ainsi la position de Pence et de bon nombre de citoyens américains sur les réseaux sociaux qui interprètent dans le mélange politique et justice comme une “chasse aux sorcières” à l’encontre de Trump, reprenant les éléments de langage de ce dernier. 

Une vision de l’affaire évidemment contestée par la base démocrate, dont certains éléments militants influents sur les réseaux sociaux, ne souhaitent en aucun cas voir accéder une nouvelle fois à la maison Blanche, selon eux, un “déséquilibré”.  

Dans les faits, Donald Trump pourrait-il toujours se présenter en cas d’arrestation, voire d’inculpation ?  

"Pas d'interdiction constitutionnelle"

La Constitution américaine ordonne aux candidat(e)s à l’élection présidentielle américaine d’être âgé(e)s au moins de 35 ans et de résider sur le territoire des États-Unis. Mais elle ne bloque en aucune façon la candidature d’une personnalité politique dans le cadre d’une enquête ou même ayant un casier judiciaire : “Il n'y a pas d'interdiction constitutionnelle”, a déclaré Kate Shaw, analyste juridique d'ABC News et professeur à la Cardozo School of Law.  

Donald Trump, qui voit cette affaire comme une tentative pour “faire tomber” sa candidature, livrera donc, en cas d’arrestation, avant tout une bataille de l’image pour s’ouvrir le chemin à l’élection présidentielle de 2024. 

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