L'orobanche, vampire des cultures de Charente-Maritime

Auteur(s)
La rédaction de FranceSoir.fr avec AFP
Publié le 07 juillet 2016 - 16:26
Image
De l'orobanche parasitant du colza.
Crédits
Xavier Leoty/AFP
L'orobanche parasite le colza mais aussi d'autres plantes.
Xavier Leoty/AFP
En Charente-Maritime, les céréaliers et notamment les producteurs de colza doivent faire face à l'invasion d'orobanche, une plante parasite qui se répand dans d'autres départements.

Tige blafarde et écaillée, "poilue et glanduleuse", l'orobanche, qui parasite le colza dans le Poitou-Charentes, faisant chuter les rendements agricoles, a tout de la plante-vampire, un monstre qui colonise un peu plus la France chaque année.

"En moyenne, je produisais environ 35 quintaux de graines de colza à l'hectare. Avec l'orobanche, je récolte jusqu'à 20 quintaux de moins": le bilan dressé par Maxime Guiberteau, céréalier installé près de Saint-Jean-d'Angély (Charente-Maritime), suffit à résumer les ravages de cette plante invasive, dont rien ne semble pouvoir venir à bout.

L'orobanche rameuse est entièrement dépourvue de chlorophylle et incapable de réaliser seule la photosynthèse. Elle a donc besoin d'une espèce "hôte" pour se fournir en eau et en nutriments, ce qui réduit fortement les rendements des plantes qu'elle parasite, voire les détruit totalement.

Dans l'Est de la Charente-Maritime, identifié par les biologistes comme le berceau de l'orobanche dans la région, la présence du prédateur se remarque de loin, avec les grandes zones sombres créées dans les parcelles de colza arrivé à maturité. De près, il faut pourtant se courber pour apercevoir les petites fleurs bleu-violet de cette plante, haute d'une dizaine de centimètres seulement, fixée systématiquement à un pied de colza.

Mais le colza n'est pas la seule victime de l'orobanche rameuse, qui se répand lentement mais sûrement vers d'autres départements. Sa présence a d'abord été détectée sur le tabac dans les années 1950, puis sur le colza dans les années 1990, sur le chanvre dans les années 2000, le melon en 2004 et le tournesol en 2007.

Dernièrement, l’institut technique des producteurs d'oléagineux, de protéagineux, de chanvre et de leurs filières, Terres Inovia (ex-Cétiom), l'a même observée sur des cultures maraîchères comme la tomate, la pomme de terre ou le haricot. Si l'on en croit la cartographie établie par les agriculteurs et les chercheurs, le fléau s'étend désormais bien au-delà du Poitou-Charentes, jusque dans l'Est de la France.

"L'orobanche est classée comme espèce à problème dans 27 départements. Mais la situation du colza est catastrophique", avertit Xavier Reboud, du département Santé des plantes et environnement de l'Institut national pour la recherche agronomique (INRA).

En Charente-Maritime, Maxime Guiberteau n'a pas d'autre choix que d'arrêter de cultiver du colza ou de réduire drastiquement le nombre de parcelles qu'il y consacre, comme beaucoup d'agriculteurs. "Au début des années 2000, jusqu'à 1.800 hectares étaient semés de colza. Aujourd'hui c'est moitié moins", souligne Jacky Auvinet, conseiller à la coopérative agricole de Saint-Pierre-de-Juilliers.

Pour Xavier Reboud, l'espèce est "d'autant plus difficile à éradiquer que chaque pied d’orobanche mature produit sans peine 100.000 graines, capables d'attendre 15 ans leur hôte" pour germer.

Pour contrer l'orobanche, les agronomes n'ont pour l'instant pas de solution miracle, à part diminuer la fréquence du colza dans la rotation des cultures, comme le fait Maxime Guiberteau. "Je l'ai remplacé par des pois et du tournesol, mais ces cultures n'offrent pas les mêmes marges que le colza. J'ai perdu entre 10 et 15% de mon chiffre d'affaires", d'autant que le colza favorise la reprise du blé cultivé après lui, "trois à quatre quintaux en plus à l'hectare".

Les recherches s'orientent aussi vers des variétés de colza plus résistantes, ou des croisements. Mais le parasite peut évoluer et trouver à son tour une parade: "c'est d'ailleurs comme ça qu'il existe une variante de l'orobanche sur la tomate. Elle a trouvé comment s'adapter", explique Xavier Reboud, évoquant une "course aux armements" entre la plante-hôte et son parasite.

Victime collatérale de cette guerre, l'abeille, privée d'une partie de sa nourriture au printemps, quand les fleurs sont encore peu nombreuses. "Avec le tournesol, le colza assure environ les deux tiers de la production de miel en France", insiste Pierre Testu, animateur du Réseau biodiversité pour les abeilles. "Sa disparition risque d'avoir des conséquences dramatiques pour un secteur apicole déjà en crise", s'alarme-t-il.

 

À LIRE AUSSI

Image
Olives Olivier Arbre
Xylella fastidiosa : la bactérie tueuse d'olives détectée en Corse
Un premier cas de Xylella fastidiosa, une bactérie tueuse d'arbres et de plantes –et notamment les oliviers– vient d'être signalé dans le sud de la Corse. Le préfet a ...
23 juillet 2015 - 12:44
Société

L'article vous a plu ? Il a mobilisé notre rédaction qui ne vit que de vos dons.
L'information a un coût, d'autant plus que la concurrence des rédactions subventionnées impose un surcroît de rigueur et de professionnalisme.

Avec votre soutien, France-Soir continuera à proposer ses articles gratuitement  car nous pensons que tout le monde doit avoir accès à une information libre et indépendante pour se forger sa propre opinion.

Vous êtes la condition sine qua non à notre existence, soutenez-nous pour que France-Soir demeure le média français qui fait s’exprimer les plus légitimes.

Si vous le pouvez, soutenez-nous mensuellement, à partir de seulement 1€. Votre impact en faveur d’une presse libre n’en sera que plus fort. Merci.

Je fais un don à France-Soir

Dessin de la semaine

Portrait craché

Image
Castex
Jean Castex, espèce de “couteau suisse” déconfiné, dont l'accent a pu prêter à la bonhomie
PORTRAIT CRACHE - Longtemps dans l’ombre, à l’Elysée et à Matignon, Jean Castex est apparu comme tout droit venu de son Gers natal, à la façon d’un diable sorti de sa ...
13 avril 2024 - 15:36
Politique
Soutenez l'indépendance de FS

Faites un don

Nous n'avons pas pu confirmer votre inscription.
Votre inscription à la Newsletter hebdomadaire de France-Soir est confirmée.

La newsletter France-Soir

En vous inscrivant, vous autorisez France-Soir à vous contacter par e-mail.