La mosquée de Grigny s'érige petit à petit avec l'argent des fidèles

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La rédaction de FranceSoir.fr avec AFP
Publié le 04 août 2016 - 19:36
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musulmans prière mosquée ramadan
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©Adek Berry/AFP
Les travaux ont commencé en 2012.
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En plein débat sur le financement de l'islam en France, la mosquée de Grigny avance doucement sa construction. Budgetée à plus de 4 millions d'euros, elle doit reposer intégralement sur les fidèles locaux.

Le béton des murs nus n'en laisse rien paraître mais, sous la coupole, "il y aura un arbre fruitier". A Grigny, dans l'Essonne, les musulmans rêvent de leur mosquée depuis 13 ans, sans financement étranger mais seulement avec l'argent des fidèles.

Alors que le Premier ministre Manuel Valls souhaite interdire les financements étrangers pour la construction des mosquées "pour une période à déterminer", l'imam Laïd Ziara ne cache pas sa fierté en faisant visiter le chantier en cours.

"80% de l'argent vient de Grigny et des Grignois, le reste des communes voisines", insiste le secrétaire général de l'Union des musulmans de Grigny, l'association cultuelle fondée pour superviser la construction de la mosquée.

Dès le début du projet, dans cette ville d'immigration aux nombreux musulmans de diverses sensibilités, "on a décidé de ne pas prendre d'argent de l'extérieur pour rester indépendant", explique M. Ziara, l'un des quatre imams à assurer le prêche.

Lancés dans la collecte des fonds en 2003, les responsables ont inauguré les travaux en 2012, après avoir réuni plus d'un million d'euros. De quoi financer 80% des murs et de la charpente, comme l'exigeait la mairie. Celle-ci a alloué un terrain de 2.700 m2 au centre de la ville, à la condition que la mosquée soit intégralement financée par les fidèles.

A l'heure actuelle, "il manque deux millions" sur le budget total de 4,5 millions d'euros, compte M. Ziara.

Mais le plus dur semble fait: le bâtiment principal et ses deux salles de prière ont été érigés. Au rez-de-chaussée, celle des hommes peut accueillir 1.200 fidèles, tandis que 500 femmes peuvent se partager l'étage.

La communauté musulmane utilise déjà exceptionnellement la mosquée pour les prières du ramadan, même si plomberie, électricité et décoration restent à faire.

"On a hâte qu'elle arrive, que le chantier se termine enfin", confie Hassan Elhassani. Ce Marocain de 72 ans se souvient de son arrivée à Grigny en 1981. Sans lieu de prière musulman, il avait été le premier à démarcher les commerçants pour un local privé, bien avant que la municipalité communiste ne mette en place des salles de prière.

"Peut-être que je vais mourir avant la fin du chantier", rit Haidara Bama, 75 ans. Ce Malien fait partie de l'équipe qui parcourt inlassablement le marché de Grigny pour inciter les fidèles à verser leur obole.

Sa famille et lui ont donné "plus de 20.000 euros" au fil des ans, confie-t-il.

La collecte est désormais en vitesse de croisière et chaque mois de ramadan, temps fort de jeûne dans l'islam, permet de lever des sommes importantes. En juin, l'association cultuelle a ainsi récolté 180.000 euros, selon M. Ziara.

L'organisation fait valider son action par un commissaire aux comptes et est contrôlée par la préfecture, souligne la mairie.

Le cas de Grigny est loin d'être exceptionnel. "Entre 70 et 80% des mosquées de France sont financées intégralement par les fidèles", rappelle à l'AFP Nathalie Goulet, auteure d'un récent rapport sénatorial sur le financement de l'islam en France.

Et le gros des fonds étrangers "viennent de pays de l'islam du juste milieu" comme le Maroc et l'Algérie, plutôt que de nations rigoristes comme l'Arabie Saoudite et le Qatar, poursuit la sénatrice UDI. Ces fonds financent surtout des grosses mosquées, qui ne sont pas des foyers de radicalisation et comblent un vide réel, constate-t-elle: "Sans financement, on va retourner à l'islam des caves, et c'est précisément ce contre quoi on se bat."

M. Ziara avertit: "Les mosquées qui peinent à ramasser l'argent qu'il leur faut, sont obligées d'aller tendre la main ici et là."

Il aimerait "qu'on leur facilite la tâche", par exemple avec des prêts à taux zéro, car l'emprunt classique auprès d'une banque est interdit par la finance islamique. Et surtout éviter les amalgames: "Je ne peux pas croire que l'argent étranger finance la radicalisation dans les mosquées", dit-il, assurant que "les radicaux se forment sur internet ou en prison".

 

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