Laïcité : le Conseil d'Etat autorise les crèche dans les bâtiments publics, retour sur une polémique

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Damien Durand
Publié le 08 novembre 2016 - 17:35
Mis à jour le 09 novembre 2016 - 17:10
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Une crèche de Noël.
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©FaceMePls/Flickr
Le rapporteur du Conseil d'Etat est plutôt favorable aux crèches, avec quelques précautions.
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Le Conseil d'Etat a rendu ce mercredi sa décision sur la compatibilité entre le principe de laïcité et l'installation d'une crèche de Noël dans un bâtiment public. Aucune jurisprudence claire n'émerge en effet des décisions contradictoires rendues par la justice.

C’est la deuxième fois depuis le début de l’année que le Conseil d’Etat, la plus haute juridiction administrative de France, s'est prononcé sur une question ayant trait à la laïcité. Quelques semaines avant les fêtes de Noël, il a répondu par la négative, mercredi 9, à la question suivante: "Une crèche de Noël est-elle un signe ou emblème religieux dont l'installation dans un bâtiment ou emplacement public est systématiquement interdite par les dispositions de la loi du 9 décembre 1905 garantissant le respect du principe de laïcité?".

Autrement dit, les crèches qui sont parfois installées dans les bâtiments officiels publics, notamment les mairies où les hôtels de département, ne vont pas à l'encontre de la laïcité à la française. Elles sont considérées comme l’expression d’une tradition française qui dépasse largement le strict cadre spirituel.

Cette décision porte une responsabilité symbolique et juridique forte: harmoniser la jurisprudence sur la question des crèches, pour laquelle les tribunaux administratifs n’arrivent pas encore à se mettre d’accord. Le Conseil d’Etat intervient en effet pour trancher entre deux décisions rendues en cour administrative d’appel, arrivant à deux conclusions différentes… le même mois. En octobre 2015 en effet, la cour administrative d’appel de Paris avait donné raison à une association de "libre penseurs" qui avait attaqué devant la justice l’installation d’une crèche dans la mairie de Melun (Seine-et-Marne) arguant d’une atteinte à la laïcité. Mais ce même mois, la cour administrative d’appel de Nantes avait considéré que la crèche hébergée dans les locaux du conseil général de Vendée n’avait pas de dimension prosélyte particulière et s’inscrivait dans une "tradition relative à la préparation de la fête familiale de Noël".

Autant dire que le rapporteur public Aurélie Bretonneau n’avait pas eu une tâche aisée lorsqu’elle a dû rendre le 21 octobre ses conclusions devant l’assemblée des 17 juges qui devait rendre une décision. Selon le fonctionnement du Conseil d’Etat en effet, le rapporteur doit rendre des conclusions après une étude minutieuse de l’affaire, conclusions qui sont généralement suivies. Mais pas nécessairement.

Aurélie Bretonneau, dans ses conclusions particulièrement prudentes, estimait que le principe de neutralité du service public n’était pas incompatible avec l’installation d’une crèche tant qu’il ne s’agit pas d’un "geste de reconnaissance d’un culte".

Question: à quel niveau considère-t-on alors que l’on est face à la reconnaissance d’un culte? Le rapporteur a tenté de définir quelques limites: l'installation doit être temporaire, être présentée "dans le temps festif lié à la célébration de Noël", et ne doit en aucun cas être accompagnée d'une "initiative teintée de prosélytisme religieux". Le tout doit présenter le "caractère d'une manifestation culturelle, ou à tout le moins festive".

Le rapporteur s’est basé pour ses conclusions sur les ventes de santons et la pratique de préparation de crèches dépassant largement la seule communauté des catholiques pratiquants. Le rapporteur propose également, dans une volonté "d’apaisement" de laisser une certaine lattitude aux collectivités et d’appeler la justice administrative prête à sanctionner les "instrumentalisations". Autant de précautions montrant que le dossier rend mal à l’aise et est l’objet de toute les précautions.

Fin août, le Conseil d’Etat avait déjà dû se prononcer sur les arrêtés municipaux interdisant le port du burkini, ce vêtement de plage recouvrant une large partie du corps et de la tête. La juridiction avait considéré que ces actes administratifs allaient à l’encontre des libertés individuelles, et qu’ils devaient absolument être basés sur des risques "avérés" pour l’ordre public afin d’être maintenus, ce qui avait donc amené à l’annulation de la plupart d’entre-eux.

 

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