Procès de Fabienne Kabou : le récit glaçant d'une mère infanticide

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La rédaction de FranceSoir.fr avec AFP
Publié le 22 juin 2016 - 12:36
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Fabienne Kabou, accusée d'avoir abandonné sa petite fille sur une plage de Berck à marée montante, a livré le récit glaçant de son crime.
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"Quand je rentre à Paris, j'ai l'attitude de quelqu'un qui est allé faire une course...": au deuxième jour de son procès devant les assises du Pas-de-Calais mardi, Fabienne Kabou, accusée d'avoir abandonné sa petite fille sur une plage de Berck à marée montante, a livré le récit glaçant de son crime.

Le 19 novembre 2013, Fabienne Kabou prend le train Gare du Nord, à Paris, avec Adelaïde, 15 mois, et arrive "vers 16h00" à Berck-sur-Mer où elle demande à des passants de lui indiquer un hôtel "proche de la plage". "Je trouve ça ridicule qu'un criminel s'adresse à autant de gens avant de commettre son acte; quand on prémédite un crime, on ne souhaite pas qu'on remonte à l'assassin", analyse sans sourciller Fabienne Kabou, élégante femme de 39 ans aux traits fins, se moquant d'elle-même.

Dans la soirée, après avoir "joué avec Ada", lui avoir "donné le sein", elle rejoint la plage quand la fillette s'est assoupie et la dépose sur le sable. Elle raconte sur un ton neutre: "elle ne bouge pas, elle est silencieuse", alors "je m'enfuis, je rebrousse chemin en courant". "J'ai compris que la mer était sur ma fille à mes bottes enfoncées dans l'eau", se souvient-elle. Et de détailler : "Il faisait tellement noir, la lune était comme un projecteur, comme un appel de phare". Elle décrit "une belle machine", "qui se passe bien jusqu'à la fin, le bus, le train, les gens charmants". "Je fais tout ça parfaitement machinalement, c'est comme si une partie de moi était anesthésiée".

Le lendemain du crime, elle quitte l'hôtel en affirmant au gérant avoir passé "une excellente nuit", puis rentre à Saint-Mandé, en région parisienne, "avec l'attitude de quelqu'un qui est allé faire les courses". Dans son agenda, à la page du 20 novembre 2013, elle mentionne: "rien".

Kabou ne quitte pas son domicile jusqu'à son interpellation dix jours plus tard par la police, qui a remonté sa trace grâce "aux petits cailloux qu'elle a semés". Pendant l'enquête, au juge d'instruction, elle évoque "un voyage d'agrément" à Berck, et déclare qu'elle aurait pu aussi "congeler (son) bébé" car "c'était à la mode".

"Vous répondez avec humour à des questions très graves. Vous mesurez l'impact de vos propos?", lui demande la présidente, Claire Le Bonnois. C'est "une façon de me donner du courage", répond l'accusée.  "Qu'est-ce qui aurait pu expliquer que je commette cet acte? Je suis toujours à la recherche d'une explication rationnelle d'un geste qui ne l'est pas", poursuit-elle, faisant les questions et les réponses.

Alors "par défaut", parce que "quelque chose s'est réalisé à mon insu, je me tourne vers des explications irrationnelles", analyse Fabienne Kabou. Lundi 20, elle avait affirmé n'avoir "pas d'autres explications que la sorcellerie" à son geste.

Mais ses explications mystiques semblent agacer l'avocat général, Luc Frémiot: "Comment osez-vous dire que vous n'avez pas voulu tuer cette gamine alors que, depuis le début, vous niez son existence?" lance-t-il. Il enchaîne: "Depuis le départ, vous mettez cette enfant en danger, en ne la déclarant pas, en la cachant à tout le monde, en accouchant seule, sans aucun suivi médical".

"Si je ne voulais pas d'Ada, je ne l'aurais pas portée neuf mois, je ne l'aurais pas élevée 15 mois, je ne l'aurais pas aimée", répond-elle, en sanglotant. Elle était "émerveillée de la voir courir, de l'entendre dire +maman+, de la voir montrer le chocolat noir parce qu'elle adore ça".

"Je ne comprends pas ce qui m'est arrivée, je ne me reconnais pas dans mon geste, stupide, grotesque...", insiste-t-elle encore, avant d'ajouter, devant une salle ébahie: "on ne pourrait même pas en rire, c'est terrible".

Michel Lafon, le père d'Adelaïde noyée par sa mère sur une plage de Berck en 2013, a affirmé dans la soirée devant le jury avoir été trompé par les "mensonges" de Fabienne Kabou. "J'ai tout gobé aux mensonges de Fabienne", a déclaré mardi devant le jury son compagnon, père du bébé de 15 mois. Dans ce crime, "ma responsabilité est totale, j'ai protégé Fabienne, mais je n'ai pas pu protéger Ada, je me reproche tout", a affirmé Michel Lafon, homme coquet de soixante-dix ans.

 

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