Pyrénées : une mine de tungstène pourrait bientôt rouvrir

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La rédaction de FranceSoir.fr avec AFP
Publié le 19 juin 2016 - 17:36
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Une mine de tungstène en haut de la montagne.
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©Pascal Pavani/AFP
Le projet de réouverture d'une mine de tungstène a créé la polémique.
©Pascal Pavani/AFP
Fermée il y a 30 ans, une mine de tungstène pourrait bientôt rouvrir en Ariège. La société, Variscan Mines, qui veut exploiter plusieurs kilomètres de galeries endormies, a déposé en novembre 2014 une demande de permis exclusif de recherche (PER) pour 5 ans, qui doit être tranchée cet été par le ministère de l’Economie.

Le projet de réouverture d'une mine de tungstène, fermée il y a 30 ans, fait l'objet d'un vif débat dans une vallée des Pyrénées, les uns y voyant une opportunité économique quand d'autres s'alarment d'un danger pour l'environnement et l'avenir de la région. Un portail vert à flanc de montagne, deux bâtiments en désuétude, et au sol, une terre ocre qui affleure ici et là. Au bout d'étroits lacets, à 1.230 m d'altitude, se niche le carreau de la mine de Salau (Ariège), dont ont été extraits 14.350 tonnes de tungstène entre 1971 et 1986. Variscan Mines, une société française à capitaux australiens, veut aujourd'hui exploiter ces kilomètres de galeries endormies. Elle a déposé en novembre 2014 une demande de permis exclusif de recherche (PER) pour 5 ans, qui doit être tranchée cet été par le ministère de l’Économie.

Pour Michel Bonnemaison, son directeur général, Salau pourrait représenter un "enjeu national, si ce n'est européen". Le tungstène, utilisé dans l'outillage, l'aérospatiale ou l'armement, est "un métal dit +critique+, produit à 85% par la Chine", déclare-t-il à l'AFP. En révisant les modèles des années 1980, cet ancien du Bureau de recherches géologiques et minières (BRGM) pense y trouver "le premier ou le second gisement mondial" avec "au moins 30 ans d'exploitation", et compte investir 25 millions d'euros dans les travaux de recherche.

Arnaud Montebourg, alors à Bercy, avait relancé en 2012 la politique minière en France, une orientation confortée par l'actuel ministre de l'Economie, Emmanuel Macron. Une dizaine de permis ont été attribués en métropole depuis 2013. Mais à Couflens-Salau, où les HLM des 150 mineurs de l'époque sont encore là, des panneaux "Non à la mine" ont fleuri. Le conseil municipal a voté contre le projet "à l'unanimité" en février 2015, et son maire, Henri Richl, ex-responsable des équipements à la mine pendant 17 ans, est vent debout. "On ne vit pas au rythme d'une mine", certifie l'édile, qui juge que le retour de cette industrie va "détruire" l'économie locale: "Les gens vont foutre le camp".

Sceptiques sur le nombre d'emplois créés et inquiets de l'impact sur l'environnement dans cette zone Natura 2000, les riverains s'alarment aussi de la présence d'amiante, avec des cas documentés de mineurs malades. "On envoie les gens au casse-pipe", assure Marcel Ricordeau, du comité écologique ariégeois. Le comité et l'association Couflens-Salau-Demain ont lancé une pétition, qui compte 5.650 signatures, et promettent d'aller en justice "plutôt deux fois qu'une" si le permis est accordé.

Plus bas dans la vallée, le projet a reçu le soutien d'habitants réunis depuis décembre dans l'association "Pour le projet d'étude et de recherche de la mine de Salau" (PPERMS), qui revendique 2.000 pétitionnaires. "On ne part pas dans l'inconnu. Elle a tourné, cette mine", s'exclame Jacques Soucasse, vice-président de l'association et ex-technicien chimiste sur la mine. "La vallée, c'est un désert, magnifique certes, mais un désert". "On n'est pas pour la mine (à tout prix), mais pour savoir", tient à souligner Hélène Nirascou, autre vice-présidente de l'association, qui attend la conclusion des études pour se prononcer. "Le tourisme c'est très bien mais ça ne dure que quelques mois. Le reste de l'année, il faut que les gens vivent", renchérit Philippe Paillas, un commerçant en matériaux. "On veut la montagne au travail, la montagne vivante".

Chez Variscan, on veut rassurer: "il n'y a aucune évidence d'amiante au sens minéralogique du terme". Pourtant, la chercheuse en santé publique Annie Thébaud-Mony, qui s'était rendue sur place en 1986 et vient de rendre deux rapports transmis à la préfecture et au ministère, met en garde contre un "danger immédiat". "On se retrouve de nouveau en présence d'un industriel qui sait et tente de minimiser, de banaliser les risques", assure-t-elle par téléphone à l'AFP. Mais si le permis de recherche est accordé, les travaux d'exploration "seront soumis à des autorisations très exigeantes, avec des avis d'experts et une consultation du public", promet la préfète Marie Lajus, s'engageant à "une expertise tierce, parfaitement neutre" sur l'amiante.

 

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