Trente ans après, le double meurtre de Montigny-lès-Metz reste un mystère

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La rédaction de FranceSoir.fr avec AFP
Publié le 23 septembre 2016 - 15:38
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Une allégorie de la Justice.
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©Damien Meyer/AFP
Un cinquième procès pour le meurtre des deux enfants doit se tenir en 2017, sans aucune garantie que la vérité y soit dévoilée.
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Qui a tué à coups de pierres Cyril et Alexandre, 8 ans, le 28 septembre 1986 sur un talus SNCF près de Metz? Trente ans après la justice cherche encore, mais la question pourrait rester sans réponse, faute de preuves.

"Nous ne saurons jamais la vérité, je ne me fais aucune illusion", soupire Dominique Rondu, avocat de la grand-mère d'Alexandre Beckrich depuis 1986. Il sera encore à ses côtés pour le 5e procès consacré à ce double meurtre, qui devrait se tenir en 2017, avec le tueur en série Francis Heaulme dans le box des accusés.

"L'expérience de ce dossier nous amène à avoir l'exigence de la preuve" ajoute l'avocat, qui décrit les multiples rebondissement de l'affaire comme "autant d'étapes du chemin de croix que vivent les familles" Beckrich et Beining.

De 1986 à 2002, pourtant, on croyait tenir le coupable: Patrick Dils, grand et gauche adolescent, arrêté quelques mois après les faits. Voisin des victimes, le jeune homme de 16 ans (et 8 d'âge mental selon les experts) avoue les avoir tués après des dizaines d'heures de garde-à-vue éprouvantes, qu'il racontera dans un livre à sa sortie de prison.

Dils a beau revenir sur ses aveux, il est condamné deux fois - en 1989 à perpétuité, puis en 2001 à 25 ans de réclusion criminelle. Mais en 2002, il comparaît une troisième fois: la présence du "Routard du crime" Francis Heaulme à Montigny-lès-Metz ce dimanche de septembre 1986 a poussé la justice à rouvrir le dossier. Le double meurtre porte la "quasi signature criminelle" de Heaulme, selon les enquêteurs.

Patrick Dils en sort finalement acquitté, blanchi par de nouvelles investigations concluant qu'il lui était matériellement impossible d'être sur le talus à l'heure supposée du crime.

Un "tremblement de terre" dont Me Rondu et sa cliente ne se sont pas tout à fait remis. "On l'a d'autant moins compris qu'il était dû a la présence de Francis Heaulme sur les lieux, mais on n'en savait pas plus. Il n'y avait pas plus de certitudes que Francis Heaulme ait pu monter sur le talus et qu'il ait tué les enfants". Il n'y a pas vraiment de preuve non plus: quand le nom de Heaulme arrive dans le dossier, "tous les scellés ont été détruits", résume Liliane Glock, son avocate.

Les négatifs des photos de la scène de crime, ou la trace d'une main ensanglantée sur un wagon, ont disparu. Sans compter les preuves manquantes dès les premières heures: les vêtements des deux petits garçons n'ont pas été mis sous scellés, le médecin légiste n'a pas mesuré précisément la température de leurs corps...

Si les scellés avaient été conservés on aurait aujourd'hui pu "trouver, ou non, l'ADN de Heaulme", souligne Me Glock, qui "ne peut qu'espérer" que la vérité éclate un jour. En 2017?

On ignore encore si Francis Heaulme sera seul dans le box des accusés: à ses côtés pourrait prendre place Henri Leclaire. Cet ex-manutentionnaire travaillait dans une imprimerie à deux pas des lieux du meurtre et avait pour habitude de houspiller les enfants qui venaient y jouer. Premier à faire des aveux en 1986, il s'était finalement rétracté, et les enquêteurs avaient abandonné cette piste.

Revenu dans le dossier en 2014 à l'occasion du premier procès Heaulme, mais comme témoin, il était devenu suspect après deux témoignages de dernière minute. Balayée par la chambre de l'instruction, "l'hypothèse Leclaire" est aujourd'hui entre les mains de la cour de cassation.

Si Heaulme est seul face aux jurés, alors la justice "sera tributaire de la parole d'un homme au développement psychique différent du nôtre", prévient l'ancien gendarme Jean-François Abgrall, celui qui, le premier, avait fait tomber le tueur en série.

"Il ne sera pas dans l'aveu, parce qu'avouer c'est un peu demander pardon", continue l'ancien enquêteur qui a passé des années à traquer les meurtres que le tueur n'a jamais avoués - mais pour 9 desquels il a été condamné. "Dans sa structure mentale, (Heaulme) n'a ni la notion d'empathie ni celle d'affect".

Ce qui amenuise, pour les familles, l'espoir d'entendre des aveux, et de pouvoir connaître, 30 ans après, le nom du meurtrier de leur enfant.

 

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