Ultradroite : le renseignement surveille de près les dérives dans l'armée
L'affaire n'est pas une surprise pour les services de sécurité qui s'inquiète du phénomène. L'arrestation dimanche 24 au matin de dix hommes soupçonnés de préparer un attentat contre des musulmans en France fait resurgir le spectre d'une radicalisation violente d'éléments appartenant ou ayant appartenu à l'armée. Un profil auquel correspondent plusieurs de ceux qui ont débuté une garde à vue qui peut durer jusqu'à 96 heures, étant donné le caractère terroriste de l'information judiciaire ouverte.
Selon les premiers éléments de l'enquête, les suspects, des hommes ayant parfois atteint l'âge de la retraite (de 32 à 69 ans selon plusieurs sources), seraient membre d'une mouvance appelée "Action des forces opérationnelles". Proche de l'ultradroite, l'AFO serait issue d'une scission du groupe les "Volontaires pour la France". Le services de renseignement enquêtaient depuis plusieurs mois sur les VPF selon une information de Mediapart. Créé mi-2015, ce groupuscule (dont l'un des membres fondateurs a perdu sa fille au Bataclan) a pour objet de "défendre l'identité française" et de "combattre l'islamisation du pays". Il est composé majoritairement de gendarmes, de militaires issus des forces spéciales et de chasseurs alpins. Constituée depuis 2016 en association, la structure n'est jamais passé sérieusement à l'acte et s'est cantonnée à l'action respectueuse de la loi. Ce qui aurait frustré certains membres qui sont partis créer l'AFO avec un objectif: passer dans l'action violente.
Et les services de renseignement français craignent la menace depuis plusieurs années. Lors d'une audition devant la commission de la défense et des forces armées à l'Assemblée nationale en mai 2016, celui qui était directeur de la DGSI, Patrick Calvar, expliquait que "l’ultra-droite n’attend que la confrontation. Cette confrontation, je pense qu’elle va avoir lieu. Encore un ou deux attentats et elle adviendra. Il nous appartient donc d’anticiper et de bloquer tous ces groupes qui voudraient, à un moment ou à un autre, déclencher des affrontements intercommunautaires". C'était après le 13 novembre 2015 mais avant l'attentat de Nice qui fera 86 morts, et avant les multiples attaques de faible envergure ayant visé des militaires ou des policiers. Les efforts du renseignement se sont largement concentrés sur les forces de sécurité soupçonnées d'être des lieux possibles de recrutement. Ce que la dérive de l'AFO semble donc confirmer.
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La menace de l'ultradroite est de plus protéiforme. Si le profil du coup de filet de dimanche gravite plutôt autour de sujets âgés, en 2017 déjà plusieurs arrestations avaient eu lieu. Neuf hommes dont trois mineurs avaient notamment été appréhendés par la Sous-direction antiterroriste de la police judiciaire assistée de la DGSI. Ces suspects étaient liés à une autre organisation dirigée par Logan Alexandre Nisin et répondait à l'appellation "OAS".
Les dossiers de terrorisme liés à l'ultradroite restent cependant très minoritaires par rapport à ceux liés à l'islamisme radical. Mais les services de renseignement craignent que les attentats sucessifs depuis 2015 ne finissent par laisser de profondes séquelles dans la société, qui pourraient perdurer au-delà d'une hypothétique victoire contre les groupes islamistes de premier plan tel l'Etat islamique.
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