Japon - Synchrotron SPring-8 : l'accélérateur de particule à prix cassés pour soutenir l'industrie et la recherche

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Damien Durand (Sayô, envoyé spécial)
Publié le 12 décembre 2017 - 08:56
Mis à jour le 14 décembre 2017 - 16:45
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Le synchrotron Sprin 8
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©Damien Durand/France-Soir
L'installation propose des prix bas pour les expérimentations des entreprises nippones.
©Damien Durand/France-Soir
Si le Japon se fait petit à petit dépasser sur le secteur des accélérateurs de particules, il continue d'offrir des infrastructures permettant une gamme d'expérimentation complète. Le site du SPring-8, non loin de Kobe (sud du pays) joue d'ailleurs la carte des prix cassés pour attirer, et offrir un soutien indirect de l'Etat, aux industries nationales.

(De notre envoyé spécial) Ce n’est pas le seul synchrotron dans le monde, ni même le plus moderne. Quant au laser à électrons libres du site, il n’est pas non plus unique sur Terre, ni même le plus puissant. Mais c’est l’alliance de ces deux installations sur le même pôle scientifique, non loin de Kobe (sud du Japon), qui fait la force de frappe de l’infrastructure. De même que sa mise à la disponibilité de l’industrie pour un tarif dérisoire.

C’est en effet une infrastructure unique qu’abrite le district de Sayô, au cœur de la préfecture de Hyôgo en réunissant sur un même lieu son Synchrotron SPring-8 et son laser "Sacla" (déformation japonaise de "sakura", soit "fleur de cerisier"). Le premier équipement est une immense boucle de 1.400 mètres de circonférence permettant d’étudier les trajectoires et les réactions d’un électron projeté à grande vitesse dans la boucle. Les variations de trajectoire permettent alors aux scientifiques d’étudier avec précision le comportement de la matière. Le laser, lui, permet de déchiffrer les compositions moléculaires des cellules et comprendre les variations de la matière à l'échelle de l'atome.

Si l’installation est éminemment scientifique, derrière les murs du site de Sayô, ce sont surtout les industriels qui se pressent pour utiliser les équipements. Le comportement de la matière sert surtout à mieux élaborer les produits qui se retrouveront demain dans les rayons des supermarchés japonais. Et si certains équipements des technologies du futur sont testés dans le Synchrotron et le Sacla, comme les futures batteries des Prius de Toyota, la voiture hybride par excellence, ce sont surtout des produits plus "classique" qui sont conçus. Produits agroalimentaires ou cosmétiques sont largement plus représentés parmi les équipes scientifiques que les centres de recherches universitaires.

Aller plus loin: Les déboires de Westinghouse, révélateurs du mal-être de l'atome

D’autant que le site joue clairement la carte des tarifs réduits, voire sacrifiés, pour attirer au maximum la demande. Le montant de la location d’un des 62 postes de travail de l’installation du synchrotron semble minime, même à l’échelle d’un particulier: 4.000 dollars (3.400 euros) de l’heure pour le SPring-8, 10.000 dollars (8.500 euros) les deux heures pour le laser Sacla. Un grain de sable pour une entreprise comme Toyota et ses 255 milliards de dollars de chiffres d’affaires en 2016. Les universités, elles, peuvent même profiter de l’installation entièrement, financée par le budget de l’Etat japonais, sans rien verser. "Nous acceptons 80% des demandes qui nous sont faites pour l’utilisation du SPring-8" expliquent à France-Soir les responsables du site, "mais pour la Sacla, les demandes sont trop nombreuses par rapport aux capacités et nous ne pouvons donner suite qu’à 20% des sollicitations".

Mais malgré ces avantages, l’installation va devoir jouer serrer pour rester attractive face à la multiplication des synchrotrons concurrents. La Chine prévoit ainsi de lancer en novembre 2018 la construction à Pékin de son quatrième synchrotron. Le chantier pharaonique, qui devrait durer six ans, accoucherait du synchrotron le plus puissant d’Asie, reléguant ainsi l’infrastructure de Sayô au second plan sur le continent. D’autant que l’installation japonaise doit aussi composer avec un environnement naturel hostile : la stabilité de l’alignement est capitale pour la bonne mesure de la trajectoire d’un électron. Or, l’archipel étant un noeud sismique majeur de la planète, le site doit subir chaque année deux mois de maintenance inévitables. Une spécificité locale qui représente un fardeau sur lequel saura s’appuyer la concurrence sur ce marché autant mondialisé qu'il est méconnu.

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