La BCE partagée entre une faible inflation et la colère de l'Allemagne

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La rédaction de FranceSoir.fr avec AFP
Publié le 21 avril 2016 - 10:26
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Pour faire remonter l'inflation, la BCE a promis de poursuivre sa politique très expansionniste.
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Mise en échec depuis plusieurs mois par une inflation très basse, la BCE a promis de poursuivre sa politique très expansionniste. Elle doit toutefois faire face aux critiques de plus en plus virulentes de la part de l'Allemagne qui l'accuse de spoiler les épargnants et de faire courir un risque aux banques. Ce jeudi, Mario Draghi s'exprimera publiquement sur le sujet.

Quelques semaines après avoir musclé son action pour tenter de faire remonter l'inflation, Mario Draghi devra rivaliser d'éloquence ce jeudi 21 pour convaincre que la BCE peut aller plus loin si nécessaire, tout en ménageant une Allemagne de plus en plus hostile. Le conseil des gouverneurs de l'institution tiendra dans la matinée sa réunion régulière de politique monétaire, suivie comme toujours d'une conférence de presse du président Mario Draghi, à partir de 12h30 GMT.

"Toute nouvelle mesure serait aussi surprenante qu'une victoire de l'Albanie" à l'Euro-2016 de football, prédit Carsten Brzeski, économiste chez ING. "Pour autant, étant donné la récente guerre des mots menée par l'Allemagne contre la BCE, la conférence de presse devrait être tout sauf ennuyeuse", souligne l'économiste. "Il faut s'attendre à peu d'action mais à des paroles de poids", ajoute-t-il.

La conférence de presse constituera la première intervention publique de M. Draghi après une récente vague de critiques en provenance d'Allemagne, où sa politique de taux bas et de liquidités abondantes est accusée de spolier les épargnants et de mettre les banques en péril. Le très influent ministre allemand des Finances Wolfgang Schäuble s'est illustré avec une pique particulièrement virulente contre la BCE, l'accusant de favoriser la montée des mouvements populistes. Son collègue à l'Economie, Sigmar Gabriel, en a remis une couche mercredi 20: "Il ne faut pas voir dans la politique de la BCE le coeur du problème, mais il ne faut pas non plus s'empêcher de juger et de critiquer la politique de la BCE", a-t-il dit. "L'Allemagne est actuellement le principal problème de la BCE", confie à l'AFP une source proche de la banque centrale. "Apparemment, Schäuble et Draghi ont aplani les choses lors de la réunion du FMI la semaine dernière, mais l'intérêt des médias pour ce conflit va perdurer", prédit M. Brzeski, pour qui "la guerre des mots va continuer".

La banque centrale, mise en échec depuis de longs mois par une inflation désespérément basse, a promis de poursuivre sa politique très expansionniste pendant encore plusieurs années. Pénalisés par le recul inexorable des cours du pétrole, les prix ont fait du surplace en mars, après un recul de 0,2% en février, là où la banque centrale vise une "inflation proche mais inférieure à 2%". Face à cette situation, l'institution monétaire européenne a été contrainte d'élargir par deux fois son action au cours des cinq derniers mois.

Début mars, elle a abaissé l'ensemble de ses taux directeurs à des niveaux historiquement bas, dévoilé un nouveau programme de prêts géants gratuits aux banques (TLTRO) et élargi le "QE", son vaste programme de rachats de dettes publiques et privées, se disant même prête à racheter des dettes d'entreprises, une opération encore inédite. "A l'heure actuelle, la BCE reste largement focalisée sur la mise en oeuvre des différentes mesures déjà annoncées. C'est notamment le cas du programme d'achats d'obligations d'entreprises pour lequel beaucoup de détails importants manquent encore", explique Marco Valli, analyste chez UniCredit.

M. Draghi aura donc pour mission d'éclaircir les zones d'ombre et de faire oeuvre de pédagogie sur les mesures, dont l'efficacité continue de faire débat. "La première évaluation des mesures décidées par la BCE en mars est plutôt désillusionnée: le +choc de confiance+ que la banque centrale avait espéré ne s'est pas matérialisé", affirme Michael Schubert, de Commerzbank. Et "plus la déception dure, plus il est probable que la banque centrale prenne de nouvelles mesures. Elle va probablement opter pour les mêmes instruments que jusqu'à présent, ce qui risque de ne pas améliorer significativement la confiance", juge-t-il. Mario Draghi devrait également être interrogé sur la récente remontée de l'euro face au dollar, qui pourrait fragiliser la compétitivité des exportateurs européens.

 

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