Une ex-directrice de Tati condamnée pour harcèlement moral

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Par Sofia BOUDERBALA - Paris (AFP)
Publié le 11 juillet 2018 - 15:43
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La détresse de France Javelle, qui s'est suicidée en janvier 2012 en laissant des lettres accablant sa supérieure de l'enseigne à bas coût Tati, a été entendue: la justice a condamné mercredi l'ancienne directrice et fustigé "l'impéritie" de l'entreprise.

Catherine C., ancienne directrice du magasin historique du quartier populaire parisien de Barbès, a été condamnée mercredi à un an de prison avec sursis, une lourde peine au regard des six mois avec sursis requis par le procureur.

Le tribunal a considéré que "les éléments établissant la culpabilité de Mme C. étaient nombreux, précis et concordants" et a justifié la peine par "la gravité des faits" de harcèlement qui ont eu pour "conséquence le long dépérissement de Mme Javelle... et son suicide".

La justice a également accordé des dommages à la fille de la victime -30.000 euros pour elle et 10.000 pour son fils - et à son beau-fils - 8.000 euros -, ainsi que 2.000 euros chacun au titre des frais de justice.

Réprimant difficilement ses larmes, la fille de France Javelle a dit son "soulagement après six ans d'attente", satisfaite d'une décision qui "condamne la directrice et qui parle aussi de la responsabilité de l'entreprise".

"Ma cliente est abasourdie par cette décision qu'elle considère comme profondément injuste", a déclaré à l'AFP Me Thibault de Montbrial, l'avocat de Catherine C., qui a décidé de faire appel.

La présidente de la 31e chambre a précisé que la peine infligée à Mme C. était entièrement assortie du sursis car le tribunal estimait qu'elle n'était pas seule fautive, fustigeant "l'impéritie dramatique de la société Tati", "également responsable du harcèlement moral" de France Javelle, du fait de ses méthodes de management et des cadences folles imposées aux salariées du magasin.

- "Descente aux enfers" -

Employée depuis 25 ans chez Tati, France Javelle avait elle-même décrit son calvaire, avant de se suicider en avalant un puissant détergent: "Tout est matière à me détruire. Je suis tout et rien. On m'humilie. C'est une descente aux enfers chaque jour".

Sur son lit avait été retrouvé un tract syndical de 2008 intitulé "une scie pour diriger Tati Barbès" dénonçant la brutalité de la nouvelle directrice, et trois lettres manuscrites, noircies de quinze mois de souffrances et d'humiliations au travail.

"Calomnies" pour Catherine C., qui s'est retranchée derrière les cadences infernales imposées par la direction de la marque au vichy rose et blanc, dans un contexte de concurrence tendue, entre deux crises financières.

L'inspection du travail, après avoir "entendu 51 personnes" sur les quelque 250 salariés du magasin à l'époque, avait conclu que c'étaient bien "l'attitude et les paroles de sa directrice" qui avaient "fait sombrer France Javelle dans une situation dépressive". Et dressé d'une manière générale un bilan sévère de "l'absence de la prise en compte du risque psychosocial" chez Tati.

Créé en 1948 par Jules Ouaki, le magasin de Barbès, après avoir essaimé en France et dans le monde dans le créneau du discount textile, était sorti de la famille en 2004 après moult déboires financiers.

A l'époque du suicide de France Javelle, la célèbre marque était entre les mains de Vetura, une filiale du géant Eram, et employait 1.800 collaborateurs dans une centaine de magasins.

Depuis, Eram s'est séparé de plusieurs enseignes en difficulté: en juin 2017, Tati a été repris par Gifi, dont l'offre permettait de sauver 1.428 emplois.

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