Michel de Lorgeril : "Les autorités sanitaires ont fermé les yeux sur l'essai de Pfizer"

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FranceSoir
Publié le 09 décembre 2021 - 22:58
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Michel de Lorgeril
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Cardiologue reconnu, Michel de Lorgeril était l'invité de FranceSoir.
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Qu’est-ce qu’un scientifique ? À quoi correspond une forme grave ? Comment mesure-t-on l’efficacité d’un vaccin ? À quoi correspond le chiffre de 95 % avancé par Pfizer ? Comment mesurer les effets indésirables ? Tels sont les grands thèmes abordés par Michel de Lorgeril, docteur en médecine, chercheur au CNRS, expert international en cardiologie et nutrition, membre de la Société européenne de cardiologie, dans ce debriefing.



L'essentiel de l'entretien :

Qu’est-ce qu’un scientifique ?

Michel de Lorgeril : Un scientifique donne des explications sur les mystères de la nature, des explications qui peuvent évoluer avec le temps et qui ne sont jamais définitives. Un scientifique est un hésitant, un sceptique et s’il peut y avoir des divergences le but, in fine, est de parvenir à un consensus, un compromis. Les scientifiques se reconnaissent et ne se disputent pas avec n’importe qui. Les exemples de déclarations non valables permettent d’aborder les changements de notre époque qui, depuis le début de la pandémie, a vu fleurir les affirmations les plus invraisemblables tandis que les normes disparaissent.

Quelles sont ces normes qui auraient disparu ?

Pour faire reconnaître un nouveau vaccin, il faut mettre toutes les autorités sanitaires d’accord et faire un essai randomisé en double aveugle. Une exigence à laquelle Pfizer n’a pas répondu. À ce travail scientifique bâclé s’ajoute le laxisme des régulateurs dont le premier d'entre eux, est l’éditorialiste en chef du New England Journal of Medecine qui a publié cette étude, n'hésitant pas à affirmer qu'elle avait été faite en double aveugle alors que de l’aveu de leurs auteurs, c’est de l’observation.

Si, en temps normal les autorités sanitaires exigent ces normes pour connaître les bénéfices d’un médicament ou d’un vaccin, et ce afin d’accorder les autorisations de mise sur le marché, force est de reconnaître qu’elles ont fermé les yeux sur cet essai et permis une vaccination sur des millions de personnes.

Par conséquent, ce 95 % ne veut rien dire puisque la méthodologie n'a pas été respectée. À ceci vient s’ajouter un autre biais : l’essai a été effectué par l’industriel, qui a donné lui-même les résultats. Une pratique qui enlève toute crédibilité à ses annonces. 

Comment définir une forme grave ?

S’il est reconnu que le vaccin n’empêche pas la transmission et la contamination, on entend partout qu’il empêcherait de faire des formes grave. Pour répondre à la question, il faut d’abord s’entendre sur ce qu’est une forme grave. La sévérité d’une maladie se mesure à la mortalité. Or, l’essai Pfizer n’ayant montré aucun décès, il ne peut contenir d’informations sur les formes graves. Par conséquent, cette affirmation viendrait de l’observation de ce qui se passe dans les hôpitaux. Mais l’on ne peut tirer aucune conclusion solide scientifiquement lorsqu’on se place dans l’observationnel et le rétrospectif.

Malgré cela, il est possible d’obtenir des informations indirectes notamment en examinant les courbes de mortalité d’un pays comme Israël qui a vacciné au moment de la troisième vague toute la population éligible, couvrant par là toutes les catégories qui présentaient des risques de mourir de la Covid.

À la fin de cette vague, les autorités ont déclaré que cette campagne de vaccination avait permis de stopper l’épidémie. Une déclaration fausse puisqu'il y avait au moins trois facteurs possibles pour l’arrêt de cette troisième vague, à savoir le confinement strict, le decrescendo naturel du pic de contamination, et enfin la campagne de vaccination. Cependant, si l’on considère ce dernier critère, comment expliquer la quatrième vague tout aussi meurtrière trois mois plus tard ?

Comment mesurer les effets secondaires ?

S’il existe une méthodologie acceptable pour mesurer l’efficacité avec l’essai randomisé en double aveugle, il n’existe pas de méthode acceptable sur le plan éthique pour démontrer les effets secondaires. Prenons l’exemple d’un médicament anti-coagulant. Une personne qui présente des risques de caillots et qui accepte de participer à l’étude peut en tirer un bénéfice y compris si elle se retrouve dans le groupe placébo. En effet, cette personne sera la première à connaître l’efficacité de ce nouveau médicament et aura tous ses frais de santé pris en charge, une chose qui n’est pas négligeable, notamment aux États-Unis.

En revanche, le raisonnement ne peut être le même lorsqu’il s’agit de mesurer les effets secondaires puisqu’il n’est pas éthiquement acceptable de proposer un produit de santé potentiellement dangereux. Par conséquent, les effets secondaires ne se mesurent qu’à postériori même s’il peut exister des informations importantes au moment de l’essai clinique. Mais ces données sont rares puisqu’un industriel qui désire obtenir les autorisations de mise sur le marché ne sélectionne pas des individus fragiles.

Mesurer a posteriori n’est pas simple et la pharmacovigilance peut être très difficile à appliquer. Établir une corrélation entre un vaccin et un effet secondaire grave peut prendre beaucoup de temps tandis que ceux qui défendent leurs produits de santé n’hésitent pas à parler de hasard ou de coïncidence.

Si certaines affaires comme le scandale du Mediator ont pris plusieurs décennies, les effets secondaires liés aux différents vaccins, s’ils ont été niés au départ, sont malgré tout peu à peu reconnus. Cette reconnaissance a même signé l’arrêt des vaccins adénovirus à vecteur recombiné comme AstraZeneca et Janssen. De son côté, Pfizer a reconnu que son vaccin pouvait provoquer des péricardites et des myocardites même si la fréquence et la sévérité de ces pathologies sont encore minimisées.

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