Paris perd son âme et ça nous met en boîte !
EDITO - Vendredi 17 novembre 2023, lors d'un "test de faisabilité” effectué par les services municipaux avant les Jeux Olympiques, la mairie de Paris a démonté quatre des boîtes de bouquinistes emblématiques des bords de Seine. Elles étaient fixées là depuis cinquante ans. Trois heures après, elles ont été remises en place.
🇫🇷 Lors d'un test de faisabilité avant les Jeux olympiques, la mairie de Paris a démonté hier soir quatre des boîtes des bouquinistes, emblématiques des bords de Seine dans la capitale #AFP #AFPTV ⤵️ pic.twitter.com/pzxCrabFG6
— Agence France-Presse (@afpfr) November 18, 2023
L'opération a suscité consternation et tristesse chez les bouquinistes. Des inquiétudes également. Michel Bouetard, secrétaire général de l'association des bouquinistes, a déclaré : “Comme on a l'habitude de dire : ce que les crues de 1910, l'Occupation et Napoléon III n'ont pas réussi à faire, les Jeux Olympiques vont peut-être parvenir à le faire : nous faire disparaître ! Non, je ne vais pas pleurer. Mais c'est dommage, c'est stupide. C'est vraiment une souffrance qu'ils nous imposent qui n'est pas nécessaire. Parce que les boîtes, c'est... comment vais-je dire ? Oui : les bouquinistes sont aussi fragiles que leurs boîtes.”
Vendeur d'une des quatre boîtes qui ont fait l’objet du test, Jean-Guy Penchenat ajoute : “Le problème, c'est que nous n'allons pas pouvoir travailler pendant un mois ou deux après. Car ils ne vont pas réinstaller les boîtes dès le lendemain. On n'avait pas à enlever les livres du centre de Paris pour que les gens vivent bien. Pour que'ils puissent s'amuser et voir les bateaux passer. Les livres pourraient rester là. Surtout qu'on pouvait même, à notre mesure, participer à la fête.”
Les inquiétudes des bouquinistes sont fondées. La Préfecture de police de Paris réclame le démontage de 600 boîtes sur 900 avant la cérémonie d'ouverture des Jeux.
Pourquoi enlever ces symboles de Paris et pas d'autres ? Au hasard, tenez, l'Obélisque, la colonne de Juillet ou celles de Buren, par exemple ?
Pas de blagues : les boîtes de bouquinistes ne peuvent en rien nuire à la sécurité des personnes et des biens durant les Jeux. Et comme M. Bouetard le dit fort justement, elles ne cachent nullement les quais de Seine, et elles ne gêneront donc pas les touristes venus assister aux Jeux, qui — ça on peut l'affirmer valablement — regretteront de ne pas pouvoir profiter d'un des symboles les plus emblématiques de la capitale, inscrit à l’inventaire du patrimoine culturel immatériel français en 2019.
Les bouquinistes parisiens ont fait leur apparition aux alentours au XVIe siècle. En 1649, un règlement interdisait les étalages de livres sur le Pont-Neuf afin d’éviter les marchés parallèles qui permettaient de contourner la censure.
Le symbole emblématique de Paris qui gêne le plus la vue et sur absolument tout dans la capitale, c'est la tour Montparnasse construite entre 1969 et 1973. Enlevez-là donc elle aussi ou démontez la tour Eiffel, construite, elle, en 1889 ! Tant qu’on y est...
Et surtout, tant par nature que par destination, les boîtes de bouquinistes sont nettement moins enclines à gêner les touristes que... les rats !
Pour ceux qui avaient encore un doute, avec cette nouvelle manifestation de sa volonté de lui nuire, ils ont la confirmation du drame que vit la capitale depuis qu'elle a Anne Hidalgo pour maire, Paris, cité millénaire qui, avant d'être la proie de l'incompétence, de l'insalubrité et du manque de goût, rayonnait sur l'humanité avec le titre alors pleinement mérité de "plus belle ville du monde".
Et, avec le démontage de ces boîtes, elle prive en outre la Seine de sa spécificité unique décrite par Blaise Cendrars dans Bourlinguer : "La Seine est le seul fleuve au monde qui coule entre deux rangées de livres."
Honte à vous !
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