Vivendi en panne de stratégie

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Par Lucie GODEAU - Paris (AFP)
Publié le 18 avril 2018 - 18:32
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Vivendi apparaît en panne de stratégie puisque son projet de construire un géant latin des médias et contenus se heurte à un mur en Italie et qu'il cherche un plan B dans le jeu vidéo, soulignent des analystes.

A l'occasion de son assemblée générale qui se tient à l'Olympia à Paris jeudi, les actionnaires attendent des indications sur la direction prise par le groupe qui n'a pas donné de perspectives financières pour l'année en cours et dont le titre a perdu 7% depuis janvier.

"Il y a une grosse panne de stratégie" chez le géant des médias, estime Claire Barbaret, analyste pour Invest Securities interrogée par l'AFP.

"La musique va bien, mais Canal+ est très fragile et Havas va mal", souligne-t-elle.

Les résultats du groupe dirigé par Vincent Bolloré sont essentiellement soutenus par Universal Music Group, la première major de l'industrie de la musique devant Sony et Warner qui fournit 45% de son chiffre d'affaires.

Cette activité soutient aussi le cours de Bourse de Vivendi grâce à l'optimisme des investisseurs sur le streaming, encouragés par le succès de l'entrée en Bourse du suédois Spotify.

"Depuis un an tout bascule avec le streaming et chez Canal+ l'hémorragie des abonnés s'est arrêtée", se réjouit une source proche du groupe.

Si les pertes de la filiale de TV payante sont jugulées et qu'elle se développe rapidement en Afrique, Canal+ a du mal à faire signer en France de nouveaux abonnés au tarif plein.

- Interrogations sur Havas -

Quant au groupe de publicité Havas, que Vivendi a absorbé l'an dernier, il a accusé une baisse de ses revenus de 0,8% (à périmètre et changes constants) en 2017.

L'agence de conseil aux actionnaires Proxinvest s'interroge d'ailleurs sur les conditions du rachat de Havas: "Le prix retenu pour la transaction (9,25 euros par action) a été fixé alors qu'Havas était la seule agence média à rester optimiste sur le premier semestre 2017 pour finalement faire un profit warning fin août" après l'acquisition de la participation du groupe Bolloré, souligne-t-elle.

"Les actionnaires sont maintenant en droit de demander des comptes" sur cette opération "dont l'intérêt stratégique et les conditions financières semblent peu évidents pour les minoritaires de Vivendi", écrit Proxinvest dans un document publié début avril.

Parallèlement, les synergies promises entre les différentes activités du groupe se font attendre.

- Projet avec Mediaset en échec -

Et le projet d'alliance entre Vivendi et le groupe italien Mediaset pour créer un nouveau géant latin des médias capable de rivaliser avec Netflix a fait flop.

"Toutes les ambitions de Vivendi pour créer un géant sud-européen des médias prennent l'eau", estime Jean-Baptiste Sergeant, analyste pour Mainfirst.

Le groupe se retrouve en conflit avec la famille Berlusconi, principal actionnaire de Mediaset, depuis sa décision de revenir sur le rachat du bouquet Mediaset Premium.

Un accord commercial dévoilé début avril entre Mediaset et Sky, le groupe de Rupert Murdoch, pourrait augurer d'un partenariat beaucoup plus large entre les deux anciens ennemis jurés, qui va contre les intérêts de Vivendi.

L'autre investissement de Vivendi en Italie, une part de 23,9% dans l'opérateur Telecom Italia (Tim) est aussi en danger.

Le fonds activiste Elliott, monté jusqu'à près de 9% du capital de Tim, dénonce la gestion de l'opérateur par Vivendi et pourrait remettre en cause son contrôle sur son conseil d'administration. Pis, Elliott a obtenu le soutien de l'Etat italien dans son offensive.

Dans ce bras de fer pour le contrôle de l'opérateur historique italien, une assemblée générale a été convoquée le 24 avril pour trancher sur le remplacement de six membres du conseil d'administration de Tim par des personnalités italiennes. Mais Vivendi a provoqué une autre AG le 4 mai destinée à désigner l'ensemble des administrateurs.

"En Italie c'est un fiasco sur tous les fronts", résume un autre analyste sous couvert d'anonymat.

Vivendi a dû aussi renoncer en mars à ses ambitions sur le groupe français Ubisoft, troisième éditeur mondial de jeux vidéo, faute d'avoir convaincu ses fondateurs de son projet.

"C'est un échec stratégique et industriel mais c'est une réussite financière", nuance Jean-Baptiste Sergeant.

La vente de sa participation de 27,27% dans l'éditeur apporte à Vivendi une cagnotte de 2 milliards d'euros qu'il pourrait utiliser pour de futures acquisitions.

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