Affaire des "écoutes" : un magistrat a accusé l'ex-cheffe du PNF d'avoir causé la fuite

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Par AFP - Paris
Publié le 28 février 2021 - 12:46
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Eliane Houlette en juin 2017 à Paris
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© JACQUES DEMARTHON / AFP/Archives
Eliane Houlette en juin 2017 à Paris
© JACQUES DEMARTHON / AFP/Archives

Un haut magistrat du Parquet national financier a accusé en 2019 sa patronne d'alors, Eliane Houlette, d'avoir indirectement permis à Nicolas Sarkozy et son avocat de se savoir sur écoutes en 2014, selon un courrier à sa hiérarchie révélé par Le Point et consulté dimanche par l'AFP.

Ces accusations, jugées "non fondées" par la supérieure hiérarchique, sont révélées à l'approche du délibéré, lundi, dans le procès de l'ancien président: une accusation de trafic d'influence et corruption née de ces écoutes controversées.

L'accusation contre Mme Houlette, première dirigeante du PNF (2014-2019), émanait du premier vice-procureur au PNF, Patrice Amar. Il était chargé du suivi du dossier de M. Sarkozy ainsi que de l'enquête pour identifier l'éventuelle taupe ayant prévenu l'ancien président et Me Thierry Herzog en février 2014.

En janvier 2019, lorsque Mme Houlette lui avait retiré la charge de ces affaires, M. Amar avait listé ses griefs contre elle auprès de la procureure générale Catherine Champrenault. Mais cette dernière avait jugé ces accusations "infondées en l'état" et l'avait muté jusqu'au départ de Mme Houlette l'été suivant.

Entre autres reproches - "conflits d'intérêts", "harcèlement", "obstruction systématique", ... - M. Amar rapportait comment il était arrivé à la conviction que Mme Houlette avait, par "incompétence", "panique" et "inexpérience", permis à l'ancien président de découvrir la mise sur écoute de sa ligne cachée au nom de "Paul Bismuth".

Selon M. Amar, Mme Houlette aurait pu transmettre des informations à sa fille, stagiaire dans un cabinet d'avocats, qui aurait pu les communiquer à son patron. Et ce dernier aurait pu, via son associé et un autre ténor du barreau, prévenir Me Herzog.

"Il ne s'agit là, bien sûr, que d'une supposition, même si j'ai la conviction qu'elle est hautement probable et la plus vraisemblable", écrivait le magistrat.

"L'enquête contre son chef est paranoïaque ! J'ai été consterné d'apprendre que M. Amar, après avoir été un temps déplacé, se trouve aujourd'hui réaffecté au PNF", a réagi auprès de l'AFP l'avocat de Mme Houlette, Me Jean-Pierre Versini-Campinchi.

"Patrice Amar s'en est expliqué en détail devant l'Inspection générale de la justice (IGJ) lors de ses auditions", précisent dans un communiqué Mes Marie Lhéritier et François Saint-Pierre, qui défendent M. Amar et sa collègue, visés par une enquête administrative.

"Le but du Point était à l'évidence de faire pression sur le tribunal quelques jours avant le prononcé de son jugement", ont-ils ajouté, dénonçant un "procédé déplorable".

Les efforts déployés sans succès pour identifier "la taupe" ont suscité un vif émoi pendant l'été parmi les avocats et à droite, lorsque Le Point a dévoilé que lors de cette enquête avaient été épluchés les relevés téléphoniques détaillés ("fadettes") de ténors du barreau.

L'un d'entre eux, Éric Dupond-Moretti, avait dénoncé des "méthodes de barbouzes" et déposé une plainte, retirée lors de sa nomination comme ministre de la Justice.

Le garde des Sceaux a ensuite ordonné l'enquête de l'IGJ visant M. Amar, une de ses collègues et Mme Houlette.

Cette décision fait l'objet d'une enquête judiciaire visant le ministre pour "prise illégale d'intérêts".

Concernant les trois magistrats, une décision du Premier ministre Jean Castex sur d'éventuelles sanctions est attendue prochainement.

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