Affaire Kulik : 30 ans de réclusion pour Bardon, placé en réanimation après le verdict

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Par Elia VAISSIERE - Amiens (AFP)
Publié le 06 décembre 2019 - 14:15
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Willy Bardon, condamné à 30 ans de réclusion criminelle par la Cour d'assises de la Somme pour enlèvement et séquestration suivis de mort et le viol d'Elodie Kulik, se trouvait vendredi soir "en réanimation, dans un état grave" après avoir avalé "un produit" suite à l'énoncé du verdict.

"On ne sait pas quel est le produit qu'il a ingéré", ni "comment il a pu cacher ça" alors qu'il avait "été fouillé", a déclaré à la presse le procureur de la République d'Amiens Alexandre de Bosschère, précisant que Willy Bardon avait confié à un "proche" qu'il "attenterait à ses jours s'il était condamné".

Quelques secondes après l'énoncé du verdict, Willy Bardon, abattu et tremblant, avait ingurgité "quelque chose" - selon son avocat Me Stéphane Daquo - ressemblant à un cachet, puis le contenu d'une bouteille d'eau, alors que sur le banc des parties civiles, le père de la victime Jacky Kulik s'effondrait, en larmes, la famille et les proches présents derrière pleurant ou s'enlaçant.

A l'issue de 13 jours d'audience qui ont vu défiler 47 témoins et experts à la barre, relater les 180 auditions menées par les enquêteurs, les jurés ont suivi les réquisitions de l'avocate générale, allant même au-delà en condamnant l'accusé pour viol. Mais ils l'ont acquitté du chef de "meurtre".

"Je ne comprends pas ce verdict (...) je ne vois pas les éléments qui emmenent à condamner cet homme", a réagi Me Daquo, annonçant son intention de faire appel. Concernant le geste de Bardon, "on n'a pas d'explication, je pense que la volonté qui est la sienne, c’est de ne pas supporter la prison", a-t-il dit.

Regrettant lui aussi le geste de l'accusé, le père de la victime Jacky Kulik s'est dit "soulagé" de ce verdict qui "rend enfin justice à Elodie". "Je pourrai aller demain sur leur tombe et dire que j’ai fait mon travail", a-t-il déclaré, évoquant aussi son épouse Rose-Marie, décédée.

Elodie Kulik, employée de banque de 24 ans avait été enlevée, violée, étranglée, puis brûlée en janvier 2002 à Tertry, à une vingtaine de kilomètres de Saint-Quentin (Aisne). Avant de mourir, la jeune femme avait appelé les secours, un enregistrement glaçant de 26 secondes considéré comme la pièce maîtresse du dossier, qui a ébranlé la salle d'audience à de nombreuses reprises pendant deux semaines.

Si la participation de Grégory Wiart, décédé en 2003 et dont on avait retrouvé l'ADN sur la scène du crime en 2012, est "indéniable", les deux hommes entendus sur l'enregistrement "font forcément partie de ses ravisseurs" et "le seul proche" qui est "reconnu sur la bande" par plusieurs témoins est Willy Bardon, avait déclaré vendredi matin l'avocate générale Anne-Laure Sandretto.

"Dans ce dossier, nous avons 12 témoins" de l'entourage de Bardon, interrogés sur la bande sonore, parmi lesquels "six sont formels et le reconnaissent", avait elle rappelé.

- "Failles" de l'enquête -

"M. Kulik, je suis innocent, je vous jure je n'y étais pas !", avait plus tard lancé Willy Bardon, des larmes dans la voix, après les plaidoiries de ses avocats.

Appelant les jurés à ne pas fonder leur conviction sur "une simple impression", l'avocat de la défense Stéphane Daquo avait détaillé méthodiquement toutes les "failles" de l'enquête, comme le fait "qu'on demande à Willy Bardon d'avoir un alibi" dix ans après les faits, critiquant aussi "l'incompétence" et les "bidouillages" de certains enquêteurs lors des auditions.

Par ailleurs, le timbre de voix, c’est un visage "flou", aperçu "de manière furtive", surtout avec cette bande sonore de qualité "médiocre". "Vous l’acquitterez, parce que cette bande est inaudible (…) et parce qu’il est innocent", avait-il plaidé.

Evoquant les comportements et traits de personnalité reprochés à Willy Bardon, Me Marc Bailly, autre avocat de la défense, a dénoncé un "procès des intuitions, des rumeurs, des ragots", une accusation basée sur "un château de sable".

Le troisième avocat de la défense Gabriel Dumenil a lui fustigé une enquête "déloyale", "scandaleuse", "profondément à charge". Après dix années d'enquête sans suspect, puis la découverte d'un suspect déjà mort, les gendarmes devaient "trouver un coupable vivant, coûte que coûte (...) quitte à en fabriquer un", a-t-il jugé.

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