Amiante : le parquet de Paris requiert un non-lieu dans le dossier Eternit

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Par AFP
Publié le 26 octobre 2017 - 19:02
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Périmètre de protection mis en place pour isoler le chantier de désamiantage du campus de Jussieu, l
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Périmètre de protection mis en place pour isoler le chantier de désamiantage du campus de Jussieu, le 25 janvier 2005 à Paris
© JEAN AYISSI / AFP/Archives

Plus de vingt années d'enquête et un premier non-lieu demandé par le parquet dans les dossiers de l'amiante: les dirigeants d'Eternit pourraient finalement échapper à un procès, ouvrant la voie à d'autres décisions du même ordre.

Ce réquisitoire aux fins de non-lieu, révélé par Europe 1 et confirmé par une source judiciaire, est le prolongement attendu de l'annonce en juin de la volonté des juges et du parquet de clore les investigations dans une vingtaine de dossiers similaires, faute de pouvoir identifier précisément des responsables.

"C'est désolant. Cela repose sur une interprétation erronée des expertises. Soit ils sont malhonnêtes, soit ils sont incompétents", a réagi auprès de l'AFP François Desriaux, vice-président de l'Association nationale de défense des victimes de l'amiante (Andeva).

Il a souligné que son association ferait appel, si un non-lieu était effectivement rendu.

Interrogé par l'AFP, le parquet de Paris a de nouveau invoqué le "temps de latence extrêmement long et variable qui s'écoule entre l'exposition à la substance et l'apparition des premiers signes cliniques d'une pathologie".

"Ce délai, évalué scientifiquement entre 15 et 40 ans, empêche de situer dans le temps avec précision le moment de l'intoxication et, par voie de conséquence, d'identifier le responsable de cette intoxication", a-t-il ajouté. Or, en matière pénale, la responsabilité ne peut être qu'individuelle et la notion de responsabilité pénale des personnes morales n'est apparue qu'en 1994, relève le parquet.

Il revient désormais aux juges d'instruction de mettre ou non un terme à la procédure, mais l'Andeva a déjà contesté leur position.

Dans une série d'observations transmise aux magistrats instructeurs en septembre, et dont l'AFP a eu connaissance, elle fait valoir que le rapport d'expertise demandé par les juges en charge de l'enquête précise que, dans le cas de l'amiante, "la période d'exposition est à la fois la période de contamination et d'intoxication".

"C'est donc à tort que les juges considèrent que la contamination et l'intoxication ne peuvent être datées", insiste l'association dans sa note.

Mi-octobre, un millier de personnes avaient manifesté à Paris pour dire leur "nausée" car aucun procès pénal dans ces dossiers n'est à l'ordre du jour.

- Dossier hautement symbolique -

Outre celui d'Eternit, les dossiers instruits au pôle de santé publique de Paris et concernés par l'annonce de juin portent notamment sur l'entreprise Everite (ancienne filiale de Saint-Gobain), les anciens chantiers navals de la Normed à Dunkerque ou encore le campus de Jussieu.

Mi-septembre, la Cour d'appel de Paris avait annulé, pour la deuxième fois, la mise en examen des responsables nationaux de cette entreprisedans deux affaires emblématiques de la fibre cancérogène, le campus parisien de Jussieu et les chantiers navals Normed de Dunkerque.

Le dossier Eternit est lui aussi hautement symbolique. Il s'agissait du premier producteur français d'amiante-ciment jusqu'à l'interdiction de la fibre et du premier visé par une plainte du genre, déposée pour homicides et blessures involontaires par d'anciens salariés en 1996.

Selon les autorités sanitaires, qui imputent à l'amiante 10 à 20% des cancers du poumon, l'exposition à cette fibre pourrait provoquer jusqu'à 100.000 décès d'ici à 2025. D'après l'Andeva, 3.000 personnes en meurent chaque année.

Les victimes de l'amiante ont essuyé un revers important en 2015 quand la Cour de cassation a remis en cause la responsabilité des décideurs publics dans l'ensemble des dossiers.

La haute juridiction a confirmé en septembre l'annulation de la mise en examen de plusieurs hauts fonctionnaires, dont l'ex-ministre Martine Aubry, un temps mise en cause pour son rôle entre 1984 et 1987 au ministère du Travail, en tant que directrice des relations du travail.

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