Au procès des attentats de janvier 2015, perpétuité requise contre le principal accusé

Auteur:
 
Par Valentin BONTEMPS, Anne-Sophie LASSERRE - Paris (AFP)
Publié le 08 décembre 2020 - 05:00
Image
Hayat Boumedienne et son mari Amedy Coulibaly, sur cette photo montage transmise par la pmolice française le 9 janvier 2015
Crédits
© - / FRENCH POLICE/AFP/Archives
Croquis d'audience réalisé le 4 décembre 2020 montrant l'avocat Richard Malka au Tribunal de Paris
© - / FRENCH POLICE/AFP/Archives

Près de six ans après l'onde de choc des attentats de janvier 2015, le parquet antiterroriste a réclamé mardi de lourdes peines contre la plupart des 14 accusés, dont la perpétuité pour le "complice" présumé Ali Riza Polat, sa défense dénonçant un "acharnement".

En conclusion d'un réquisitoire à deux voix entamé lundi matin, l'avocate générale Julie Holveck a demandé à la cour d'assises spéciale de Paris des condamnations "à la hauteur de l'extrême gravité des faits".

"Votre décision sera scrutée, soupesée, regardée à la loupe", a-t-elle martelé.

L'accusation a réclamé les peines les plus lourdes, la réclusion criminelle à perpétuité, contre deux "complices" présumés des attentats: Mohamed Belhoucine, jugé par défaut après son départ pour la Syrie, et Ali Riza Polat, présenté comme la "pièce maîtresse" des actes préparatoires.

"Même s'il le conteste", Ali Riza Polat avait "une connaissance précise du projet terroriste" de son "ami" Amedy Coulibaly, ont martelé les avocats généraux, pour qui l'accusé est apparu à "chaque stade" des préparatifs et a côtoyé "tous les protagonistes".

Premiers à plaider en défense, les avocats de M. Polat, Isabelle Coutant Peyre et Antoine Van Rie, se sont employés dans l'après-midi à torpiller un dossier d'accusation reposant, selon eux, sur des "hypothèses" et des "approximations", voire des "fantasmes".

"M. Polat n'est pas le grand organisateur", a rétorqué Me Van Rie, pointant la "faiblesse" des éléments matériels à l'encontre de son client. "Il n'a jamais été le bras droit d'Amedy Coulibaly, ni le complice des frères Kouachi", qu'il n'a "jamais vus", a-t-il insisté.

Afin d'éviter une nouvelle "erreur judiciaire", Me Coutant Peyre a demandé "l'acquittement" d'Ali Riza Polat.

- "Princesse de l'EI" -

Les 7, 8 et 9 janvier 2015, les frères Saïd et Chérif Kouachi et Amedy Coulibaly avaient porté le combat jihadiste sur le sol français, lors d'attaques perpétrées contre Charlie Hebdo, une policière municipale à Montrouge et un magasin Hyper Cacher.

Les attaques, premières d'une sanglante série, avaient fait 17 morts et semé l'effroi en France et dans le monde.

Revenant de façon méthodique sur ces événements, le parquet a réclamé trente ans de réclusion assortie d'une période de sûreté des deux tiers à l'encontre d'Hayat Boumeddiene, ex-compagne d'Amedy Coulibaly, introuvable depuis sa fuite en Syrie quelques jours avant les attentats.

Cette figure du jihad féminin "n'a jamais démenti le bien-fondé de l'action" de Coulibaly, qui a rejoint les rangs de l'Etat islamique (EI). "Elle est devenue un instrument de propagande, c'est elle la princesse de l'EI", a pointé Julie Holveck.

Un éventail de peines plus large a été demandé à l'encontre des 11 autres accusés. Pour la plupart d'entre eux, le parquet national antiterroriste a réclamé que les peines soient assorties d'une période de sûreté et qu'ils soient inscrits au fichier des auteurs d'infractions terroristes, le Fijait.

Vingt ans ont été réclamés contre Mehdi Belhoucine, jugé en son absence et présumé mort en zone irako-syrienne comme son frère Mohamed.

Une même peine de vingt ans de réclusion a été demandée contre Nezar Mickaël Pastor Alwatik, ancien codétenu d'Amedy Coulibaly décrit comme radicalisé, et dix-sept et treize ans contre Amar Ramdani et Saïd Makhlouf, accusés d'avoir recherché des armes pour le tueur de l'Hyper Cacher dans le cadre d'une filière "lilloise".

Concernant Metin Karasular, Michel Catino, Abdelaziz Abbad et Miguel Martinez, impliqués dans le volet "belgo-ardennais" du dossier, le parquet a requis quinze à dix-huit ans de réclusion. "Ils possédaient les clés pour comprendre que leurs interlocuteurs évoluaient dans un milieu radicalisé", a jugé Mme Holveck.

Dix-huit ans de réclusion criminelle ont été requis contre Willy Prevost, qui a reconnu en partie avoir acheté du matériel pour Amedy Coulibaly.

- "Zones d'ombre" -

Les magistrats ont demandé des peines plus légères (cinq et sept ans d'emprisonnement) à l'encontre de Christophe Raumel et de Mohamed Fares pour association de malfaiteurs délictuelle, et non criminelle, estimant qu'ils n'avaient pas eu connaissance du projet ou de la radicalisation des auteurs des attentats.

Dès le début de son réquisitoire, le Pnat avait appelé à une réponse "ferme et équilibrée", estimant que "sans" les accusés, le "trio" formé par les frères Kouachi et Coulibaly "n'était rien".

Depuis le début du procès le 2 septembre, les accusés, déjà condamnés à de multiples reprises mais jamais pour des affaires de terrorisme, ont tous nié avoir participé à la préparation des attentats, la défense pointant les nombreuses "zones d'ombre" du dossier.

Les plaidoiries de la défense se poursuivent jusqu'à lundi. Verdict attendu le 16 décembre.

L'article vous a plu ? Il a mobilisé notre rédaction qui ne vit que de vos dons.
L'information a un coût, d'autant plus que la concurrence des rédactions subventionnées impose un surcroît de rigueur et de professionnalisme.

Avec votre soutien, France-Soir continuera à proposer ses articles gratuitement  car nous pensons que tout le monde doit avoir accès à une information libre et indépendante pour se forger sa propre opinion.

Vous êtes la condition sine qua non à notre existence, soutenez-nous pour que France-Soir demeure le média français qui fait s’exprimer les plus légitimes.

Si vous le pouvez, soutenez-nous mensuellement, à partir de seulement 1€. Votre impact en faveur d’une presse libre n’en sera que plus fort. Merci.

Je fais un don à France-Soir

Dessin de la semaine

Portrait craché

Image
Castex
Jean Castex, espèce de “couteau suisse” déconfiné, dont l'accent a pu prêter à la bonhomie
PORTRAIT CRACHE - Longtemps dans l’ombre, à l’Elysée et à Matignon, Jean Castex est apparu comme tout droit venu de son Gers natal, à la façon d’un diable sorti de sa ...
13 avril 2024 - 15:36
Politique
Soutenez l'indépendance de FS

Faites un don

Nous n'avons pas pu confirmer votre inscription.
Votre inscription à la Newsletter hebdomadaire de France-Soir est confirmée.

La newsletter France-Soir

En vous inscrivant, vous autorisez France-Soir à vous contacter par e-mail.