Quintuple infanticide : "Pour moi, ce n'était pas des bébés", répète Sylvie Horning

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Par Béatrice ROMAN-AMAT - Colmar (AFP)
Publié le 19 juin 2019 - 19:02
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"Pour moi, ce n'était pas des bébés": jugée pour un quintuple infanticide, Sylvie Horning l'a répété inlassablement mercredi devant la cour d'assises du Haut-Rhin, posant plus de questions qu'elle n'a apporté de réponse, tout en demandant pardon aux bébés comme à sa famille.

"Ce n'était pas des bébés pour moi, c'était des êtres que mon esprit et mon corps n'acceptaient pas", "quelque chose qui grandissait en moi que je n'acceptais pas", a dit la quinquagénaire, mère de trois grands enfants et quatre fois grand-mère, s'exprimant très distinctement.

"Quand ça sortait de mon corps, je ne voulais pas voir ce que c'était", a-t-elle expliqué, se souvenant avoir couvert les nouveau-nés pour ne pas les voir mais incapable de dire si elle les a étouffés ou étranglés tous les cinq.

Il y a eu des gestes néonaticides "sans doute pour un, deux, trois, mais pour tous je n'en suis pas sûre", a-t-elle dit, confrontée par la présidente à ses aveux en garde à vue et au fait que trois des nouveau-nés ont été retrouvés avec des liens autour du cou.

"Aujourd'hui, j'arrive à dire (que c'était) des bébés, avant je n'y arrivais pas", a-t-elle expliqué. Incarcérée depuis un an et demi à la maison d'arrêt de Mulhouse, l'ancienne graveuse industrielle est suivie par une psychologue une fois par semaine.

La femme qui a tué ces bébés, sur une période allant de 1995 à 2003, qu'elle décrit comme une période de sa vie "très difficile", "ce n'était pas moi", dit-elle aussi.

Elle raconte avoir accouché trois fois la nuit, une fois le matin, une fois l'après-midi, toujours dans la salle de bains de leur maison de l'époque, à Wittelsheim, en banlieue de Mulhouse, à l'insu de tous ses proches et notamment de l'homme qui a partagé sa vie pendant 34 ans.

C'est lorsqu'elle évoque son compagnon, décédé en 2018, auquel elle fait une véritable déclaration d'amour posthume, et ses relations avec ses enfants qu'elle vacille.

"Je regrette d'avoir fait autant de mal à ces bébés, à ma famille, c'est tout ce que je peux dire", assure-t-elle, la voix étranglée de sanglots.

"J'aime mes enfants, les trois", répète-t-elle, mais quand elle lance "regarde-moi" à son fils aîné, qui s'est porté partie civile, il ne lève pas la tête vers elle.

- "Pas une mère" -

Plus tôt dans l'après-midi, ses trois enfants avaient eu des mots très durs à son encontre.

"C'est une femme mais c'est pas une mère, elle n'aurait jamais dû avoir d'enfant", a lancé sa fille de 29 ans, qui n'avait plus de relations avec elle depuis presque 5 ans quand elle a été interpellée, en 2017, mais vient la voir en prison, par fidélité à son père, qui lui avait demandé de la soutenir.

Son fils aîné a évoqué "un manque réel d'affection", tandis que la benjamine, pourtant la "chouchoute" qui dit avoir été proche de sa mère, lui a reproché d'avoir détruit sa vie.

Pour ses deux premiers enfants, leur père avait appris la grossesse au 6ème ou 7ème, pour leur dernière fille seulement 3 heures avant sa naissance.

Les experts se sont divisés sur la thèse du déni de grossesse, le gynécologue Israël Nisand soutenant que toutes ses grossesses avaient donné lieu à des dénis, tandis que le psychiatre Henri Brunner a estimé que l'accusée "désirait être enceinte mais ne voulait pas des enfants".

"J'ai toujours eu peur des médecins", a avancé mercredi l'accusée, qui prenait la pilule de façon erratique et avait demandé la ligature des trompes après la naissance de sa benjamine.

Dans cette affaire restée longtemps non élucidée, Sylvie Horning a été identifiée et interpellée 14 ans après la découverte fortuite de quatre premiers corps de nouveau-nés dans une forêt. Un cinquième avait été découvert dans une glacière au domicile de la famille.

"J'ai eu envie de me dénoncer quand j'ai entendu ça (la découverte des corps, NDLR) à la radio mais j'avais un conjoint et trois enfants", a-t-elle raconté, disant avoir aussi envisagé le suicide.

Le verdict est attendu jeudi.

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