A Colmar en réa', la résilience du personnel prend le pas sur la fatigue

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Par Antoine POLLEZ - Colmar (AFP)
Publié le 23 janvier 2021 - 11:36
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Un patient atteint du Covid-19 dans le service de réanimation de l'hôpital de Colmar, le 22 janvier 2021
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© SEBASTIEN BOZON / AFP
Un patient atteint du Covid-19 dans le service de réanimation de l'hôpital de Colmar, le 22 janvier 2021
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"On est prêt, on est rodé": dans le service de réanimation chirurgicale de l'hôpital de Colmar, face à l'augmentation du nombre de patients atteints du Covid-19 et malgré la fatigue, le personnel soignant fait preuve d'une impressionnante résilience, fort de l'expérience accumulée l'an dernier.

Sur les portes des chambres, les affichettes "Covid" ont réapparu; les chariots de "matériel d'intubation" occupent les couloirs, qui résonnent au son des alarmes de monitoring: jusqu'ici concentrée sur d'autres pathologies, la "réa chir'" accueille de nouveau, depuis quelques jours, des malades porteurs du coronavirus, qu'elle n'avait plus soignés depuis plusieurs mois.

Dans cet hôpital, c'est un autre service, la réanimation médicale, qui avait pris en charge les cas les plus graves depuis la seconde vague, apparue en novembre.

Mais cette fois-ci la vague ne retombe pas. "On est sur un plateau élevé qui, en plus, a tendance à monter", relève Elisabeth Gaertner, la cheffe du pôle anesthésie-réanimation, pour justifier la mobilisation d'un service supplémentaire.

Laurence Jallon fait partie du personnel soignant qui renoue avec le Covid. Si cette infirmière expérimentée reste "marquée" par l'expérience du printemps dernier, cette nouvelle confrontation avec l'épidémie ne lui "fait pas peur". "On est prêt, on s'y attendait. Et puis les patients arrivent au compte-goute donc on peut gérer, ce n'est pas brutal. Même si je pense qu'à un moment donné, le service sera de nouveau rempli de patients Covid".

- "Je kiffe mon travail" -

"Les cas sont aussi moins graves que ce qu'on a eu dans le passé", souligne-t-elle derrière ses lunettes et sa charlotte de protection. De fait, dans le service, un seul patient est intubé, et aucun n'est placé sur le ventre, une position utilisée contre les affections très sévères.

"La prise en charge en amont de la réanimation a été grandement améliorée grâce aux médicaments corticoïdes, qu'on donne beaucoup plus tôt", souligne François Demumieux, médecin anesthésiste réanimateur.

"Ils permettent d'éviter la flambée inflammatoire et l'attaque des poumons". Les patients présentent donc généralement un stade moins avancé de la maladie à leur arrivée dans le service.

Tous ces éléments soutiennent l'état d'esprit des soignants. "On le vit mieux", témoigne Magali Riche, infirmière d'une trentaine d'années. "Je pense qu'on a la capacité de résilience, et on s'adapte. On a une bonne équipe, on ne manque pas de matériel, on s'est habitué, on a beaucoup appris, ça nous a unis... Moi je kiffe mon travail", s'enthousiasme-t-elle.

Derrière cette réelle solidarité, un gros point noir demeure: le manque de personnel spécialisé, particulièrement les aides-soignantes et les infirmières de réanimation.

"Vous pouvez avoir des machines, si vous n'avez pas le personnel qui sait s'en servir, ça ne résout pas le problème", remarque Magali Riche. "Pour être efficace en réa, ça prend deux ans, ça ne s'improvise pas".

"C'est un grand casse-tête", concède François Demumieux. "Et c'est parfois mal vécu par nos collègues infirmiers, qui ont parfois l'impression d'être des pions envoyés pour boucher les trous".

- "Beaucoup d'arrêts maladie" -

En attendant, pour tenter d'apporter davantage de souplesse aux plannings, l'hôpital a formé 180 personnes pendant de l'été, au cours de "petites séances", comme l'explique Elisabeth Gaertner. Mais le remède n'est pas toujours suffisant.

"Les gens sont très fatigués moralement. Ils attendent qu'on sorte de tout ça, mais on a l'impression que la sortie est loin. On a aussi beaucoup d'arrêts maladie", reconnaît la cheffe de pôle. Sur le tableau de service, le numéro de téléphone d'un "psychologue du personnel" est indiqué en gros caractères.

Heureusement, les services peuvent s'appuyer sur une meilleure coordination. "On a des réunions de communication tout le temps, c'est nécessaire" pour adapter au mieux les capacités d'accueil, souligne-t-elle. "J'ai aussi accès à des tableaux de bord au niveau de la région, je sais quotidiennement combien il y a de places disponibles dans les autres établissements". Autant d'outils qui n'existaient pas il y a dix mois.

Surtout l'ensemble du personnel mise désormais sur la vaccination. Tous les médecins du pôle ont exprimé le souhait d'être vaccinés lorsque les doses seront disponibles. "Ce sera notre porte de sortie", veut croire le docteur Demumieux.

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