Confinement : les Français ont fait preuve d'une grande maturité, selon un chercheur

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Par Anne CHAON - Paris (AFP)
Publié le 08 mai 2020 - 12:07
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Quais du métro à Paris, le 1er avril 2020. La fréquentation a plus diminué dans les pays Latins.
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© THOMAS COEX / AFP/Archives
Quais du métro à Paris, le 1er avril 2020. La fréquentation a plus diminué dans les pays Latins.
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Les Français ont fait preuve de discipline et "d'une grande maturité" pendant le confinement, infirmant les clichés du Latin frondeur, affirme Jocelyn Raude, maître de conférence en psychologie sociale, spécialiste des épidémies.

Chercheur à l'Ecole des hautes études de Santé publique (EHESP), M. Raude a conduit une étude avec l'institut Arcane Reasearch auprès de 4.005 Français en avril.

Q: Quelle a été votre principale surprise?

R: D'abord, ce ne sont pas dans les départements les plus touchés que l'inquiétude a été la plus marquée, mais autour, comme si la population anticipait son tour... Chez les 22% les moins bien logés, la promiscuité a ajouté à l'anxiété avec un téléscopage des enjeux sanitaires et socio-économiques. Et cette anxiété a augmenté avec le temps.

Clairement, on a une France à deux vitesses: 60% des gens n'ont pas trop mal vécu le confinement parce qu'il les a rassurés face à la peur très vive de l'infection contre une grosse minorité qui l'a jugé excessif... Surtout, la dimension économique est en train de monter avec la crainte des effets pervers, réels, du confinement.

Mais il y a eu un soutien massif et surtout un respect massif des consignes officielles, malgré les errements initiaux des autorités sur les masques par exemple. Les Français ont fait preuve d'une énorme maturité. Et contrairement à ce qu'on pouvait attendre, on a noté très peu de relâchement: 55% des personnes ne sortaient de leur domicile qu'une fois par semaine voire moins. Même les malades chroniques (deux sur trois) n'ont pas consulté depuis le début du confinement.

Q: Vous constatez même que les Français ont été plus disciplinés que les Anglo-Saxons.

R: On a raisonné sur la base de stéréotypes culturels, peut-être vrais en temps ordinaires, mais là, toutes les enquêtes et les +big data+ montrent le contraire - puisqu'avec leur portable on sait à peu près où sont les gens. Selon les données transmises par Google, les Français, mais aussi les Italiens et les Espagnols - les "Latins européens" - ont été beaucoup plus disciplinés que les Anglais ou les Américains : la fréquentation des commerces a baissé en France de 73% comparé à la période 3 janvier-6 février, et même 82% en Espagne contre 34% aux Etats-Unis ou 58% à New York pourtant durement frappée.

Celle des transports en commun a baissé de 75% en France, 71% en Italie, 74% en Espagne, mais 69% au Royaume-Uni et 47% aux Etats-Unis (69% à New York). On a sous-estimé l'énorme capacité des Français en des temps difficiles à faire preuve de résilience et de discipline.

Il faut aussi noter que si la notion d'épidémie est inédite en France métropolitaine, qui a complètement oublié les grandes grippes de 1959 ou 1968, les Outremer en revanche la connaissent bien, entre le chikungunya et le zika qui ont des taux de contamination autrement plus élevés, jusqu'à 40% de la population de la Réunion pour le premier.

Q: comment les Français appréhendent-ils le déconfinement?

R: Paradoxalement, ce sont les catégories populaires - ouvriers et employés - et les populations défavorisées qui sont les plus inquiètes, alors qu'elles sont globalement bien plus mal logées et ont pu davantage souffrir pendant le confinement - la moitié des actifs à l'arrêt ont déclaré des difficultés financières et près de 3/4 des Français en recherche d’emploi. Les cadres supérieurs et les retraités sont plus confortables. C'est du 50/50. Mais 80% (des Français) approuvent un déconfinement sur mesure, par département et tout autant affirment qu'ils maintiendront un haut niveau de protection : port du masque, respect des distances sociales... Cependant, cette discipline aura-t-elle toujours cours en cas de deuxième vague, il est beaucoup trop tôt pour le dire.

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