Coronavirus : Macron rend une visite surprise au professeur controversé Raoult

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Par Jérôme RIVET et Estelle EMONET - Marseille (AFP)
Publié le 09 avril 2020 - 20:25
Mis à jour le 10 avril 2020 - 00:30
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Olivier Veran à Paris, le 28 mars 2020
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© GEOFFROY VAN DER HASSELT / POOL/AFP/Archives
Olivier Veran à Paris, le 28 mars 2020
© GEOFFROY VAN DER HASSELT / POOL/AFP/Archives

La visite d'Emmanuel Macron jeudi au controversé professeur marseillais Didier Raoult, héraut du traitement à l'hydroxychloroquine contre le Covid-19, illustre la volonté du président de consulter tous azimuts avant de nouvelles décisions dans la crise du coronavirus.

Dans le cadre de ses consultations avant son allucution de lundi, le chef de l'Etat est resté 3h30 à l'Institut Hospitalo-Universitaire (IHU) Méditerranée Infection, dont il a visité les installations modernes avant de s'entretenir avec le professeur Raoult, sans la présence de journalistes.

Le spécialiste des maladies infectieuses lui a présenté la dernière étude de ses services qui confirme, selon lui, l'efficacité de l'hydroxychloroquine (dérivé de la chloroquine, un médicament contre le paludisme) dès l'apparition des premiers symptômes du coronavirus. Des résultats dont un certain nombre de médecins et de scientifiques mettent la portée en doute.

Mais l'Elysée a insisté sur le fait que cette rencontre ne représentait pas "une reconnaissance" de la méthode du professeur. "Le président a la volonté de prendre en compte l'ensemble des essais et des études, dont celle du professeur Raoult (...) Ce n'est pas à lui de trancher le débat, qui doit être tranché scientifiquement", a souligné son entourage.

Dans la matinée, Emmanuel Macron avait effectué un premier déplacement de plus de deux heures à l'hôpital du Kremlin-Bicêtre (Val-de-Marne), où il a rencontré des équipes hospitalo-universitaires impliquées dans la recherche clinique sur le coronovarus.

Il a été accompagné durant toute la journée par le Pr Jean-François Delfraissy, président du conseil scientifique du Covid-19 qui le conseille depuis le début de la crise sanitaire.

- "Reconnaissance" -

Depuis le début de l'épidémie, Emmanuel Macron s'est déplacé une dizaine de fois au contact des soignants ou des travailleurs sociaux mobilisés, mais la visite surprise à Marseille a pris un caractère particulier en raison du débat qui agite tant l'opinion que la classe politique sur le professeur Raoult.

"Dans son souci d'incarner l'unité nationale, Emmanuel Macron veut montrer qu'il écoute les différents points de vue", et ne veut "pas faire l'impasse sur une voie de travail qui fait largement débat", remarque Bruno Cautrès, chercheur au Cevipof.

Pour l'expert Frédéric Dabi, cette visite, qui est "un acte fort", est à la fois "une manière de contrôler la parole de Didier Raoult parce qu'il ne pourra pas dire qu'il n'a pas été écouté" mais aussi "une formidable légitimation de ce chercheur" pourtant controversé.

Les réactions politiques ont été nombreuses, en particulier des élus de droite qui ont pris fait et cause pour le protocole du professeur Raoult. A l'image de Renaud Muselier, président LR de la Région Sud Provence-Alpes-Côte d'Azur, qui a vu dans la visite "une marque de reconnaissance de l’Etat pour ce grand médecin mais aussi la démonstration qu'Emmanuel Macron sait écouter".

"Le président a parfaitement raison de prendre l'avis du Dr Raoult", a réagi Christian Estrosi, le maire LR de Nice, soigné du Covid-19 par le Pr Raoult. "C'est ce qu'on attend d'un chef de guerre: ne pas simplement s'entourer de conseillers qui peuvent vous ballotter du matin au soir, mais d'être capable d'arbitrer en allant vous rendre compte par vous-même des réalités sur le terrain", a-t-il ajouté sur BFMTV.

Pour Marine Le Pen, la présidente du RN, le chef de l'Etat "court après les événements" en allant rencontrer Didier Raoult, dont la demande pour laisser la liberté aux médecins de pouvoir prescrire la chloroquine aux malades est approuvée par une majorité de Français selon les sondages.

"Il ne faut voir aucune dimension politique à ce déplacement", a insisté l'Elysée.

Le ministre de la Santé Olivier Véran avait appelé le week-end dernier à ne pas brûler les étapes, en soulignant qu'on connaitrait prochainement les premiers résultats intermédiaires d'études cliniques, qui visent à déterminer si la chloroquine mais aussi "d'autres médicaments prometteurs" sont efficaces quand ils sont pris dès le début de la maladie.

Dans les prochains jours, Emmanuel Macron va continuer à préparer son allocution, prévue lundi à 20H02, notamment sur le prolongement du confinement, et, selon l'Elysée, "consulter un grand nombre d'acteurs publics et privés, français, européens et internationaux".

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