Crash du Rio-Paris : le parquet demande un procès pour Air France et un non-lieu pour Airbus

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Par Mehdi CHERIFIA et Eléonore DERMY - Paris (AFP)
Publié le 17 juillet 2019 - 14:23
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Photo transmise par la Marine brésilienne le 9 juin 2009 montrant la récupération d'une partie de l'Airbus A330 qui a sombré lors d'un vol Rio-Paris le 1er juin 2009
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© HO / BRAZILIAN NAVY/AFP/Archives
Photo transmise par la Marine brésilienne le 9 juin 2009 montrant la récupération d'une partie de l'Airbus A330 qui a sombré lors d'un vol Rio-Paris le 1er juin 2009
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"Négligence" et "imprudence" d'Air France mais pas de charges suffisantes à l'encontre d'Airbus: le parquet de Paris demande un procès devant le tribunal correctionnel contre la compagnie aérienne uniquement, à l'issue de l'enquête sur le crash du vol Rio-Paris qui a fait 228 morts en 2009.

Il appartient désormais aux juges d'instruction de décider s'ils suivent ces réquisitions et ordonnent donc un procès pour Air France uniquement.

Le 1er juin 2009, le vol AF447 s'était abîmé dans l'océan Atlantique. Les 228 passagers et membres d'équipages, de 34 nationalités, avaient péri dans l'accident, le plus meurtrier de l'histoire de la compagnie française.

Point de départ de la catastrophe: le givrage en vol de sondes de vitesse Pitot, qui a conduit à un dérèglement des mesures de vitesse de l'Airbus A330 et désorienté les pilotes jusqu'au décrochage de l'appareil. Ces sondes ont la forme de petites prises d'air placées sur le nez de l'appareil ou sous les ailes.

Dans cette procédure, qui dure depuis plus de dix ans, les deux entreprises avaient été mises en examen en 2011 pour "homicides involontaires".

Dans son réquisitoire daté du 12 juillet, dont a eu connaissance l'AFP, le parquet de Paris considère notamment que la compagnie aérienne "a commis une négligence et une imprudence" en ne délivrant pas à ses pilotes suffisamment d'informations sur la procédure à adopter en cas d'anomalies liées aux sondes qui permettent de contrôler la vitesse de l'appareil, après plusieurs incidents du même genre au cours des mois précédents.

Il pointe le fait qu'il n'y avait pas de formation particulière pour les pilotes afin qu'ils sachent traiter les problèmes d'indications de vitesse erronées à haute altitude.

- Bataille d'experts -

"Cette négligence et cette imprudence sont en lien certain avec l'accident, dans la mesure où les pilotes, insuffisamment informés, ont ressenti une forte surprise lors de la déconnexion du pilotage automatique et n'ont pas pu avoir la réaction appropriée", souligne le ministère public.

Sollicités par l'AFP, Airbus et son avocat n'ont pas voulu commenter ces informations.

Air France a pour sa part indiqué qu'elle allait "confirmer sa demande de non-lieu dans les observations en réponse qu'elle va adresser aux juges d'instruction".

Les familles de victimes, elles, "sont sous le choc d'une décision aussi inique qu'inattendue. Pour le parquet, manifestement, la mort de 228 personnes ne justifie pas que soit organisé un procès contradictoire et public avec Airbus dont les manquements ont été établis, notamment dans le rapport des experts judiciaires de 2012", a regretté auprès de l'AFP Danièle Lamy, présidente de l'association Entraide et Solidarité AF447, qui regroupe quelque 360 proches des victimes.

Depuis ses débuts, l'enquête a donné lieu à une bataille d'experts pour établir les responsabilités dans l'enchaînement ayant mené au crash de l'appareil et les parties civiles poussent pour qu'Airbus et Air France soient jugés tous les deux.

En 2012, la première expertise avait pointé à la fois des défaillances de l'équipage, des problèmes techniques et un déficit d'information des pilotes en cas de givrage des sondes, malgré une recrudescence d'incidents antérieurs signalés à Airbus.

Le constructeur avait alors sollicité une contre-expertise, qui mettait surtout l'accent sur une "réaction inappropriée de l'équipage" et les manquements d'Air France.

La jugeant trop favorable à Airbus, des proches des victimes et la compagnie aérienne avaient attaqué le rapport devant la cour d'appel de Paris, qui avait ordonné son annulation et la réouverture de l'enquête.

Toutefois la dernière contre-expertise, remise en décembre 2017, a de nouveau suscité l'indignation des parties civiles. Les experts y réaffirmaient que la "cause directe" de l'accident "résulte des actions inadaptées en pilotage manuel" de l'équipage et tendaient à dédouaner Airbus.

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