Dans les cités de Marseille, accompagner les malades du covid du dépistage au relogement

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Par AFP - Marseille
Publié le 20 avril 2020 - 18:10
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Des Marins-Pompiers de Marseille examinent une femme de 19 ans, soupçonnée d'être infectée par le nouveau coronavirus, dans un dispensaire à Marseille, le 6 avril 2020
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© Christophe SIMON / AFP/Archives
Des Marins-Pompiers de Marseille examinent une femme de 19 ans, soupçonnée d'être infectée par le nouveau coronavirus, dans un dispensaire à Marseille, le 6 avril 2020
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Nabil, fébrile, vient se faire tester au Covid-19: "Si je suis positif, je ne vais pas risquer de tuer mes parents, je devrai dormir ailleurs". Dans ce quartier défavorisé de Marseille où les habitants s'entassent souvent dans des appartements surpeuplés, la quarantaine est une gageure.

"On peut s'en tenir à la consigne de confinement et fermer les yeux sur les difficultés à l'appliquer, nous on a choisi de les ouvrir", résume le docteur Annie Lévy, généticienne à l'hôpital Nord, à l'origine d'un dispositif spécial ville/hôpital déployé au pied des tours.

Le cri d'alerte est venu des acteurs mêmes de ces territoires, quelques semaines plus tôt. Le docteur Slim Hadiji, dont le cabinet est installé dans le quartier pauvre de Malpassé, a observé fin mars "un raz-de-marée" de patients positifs, "dont pas mal ont été admis en réa". "Ici il y a énormément de promiscuité, en moyenne 5-6 personnes dans un T2", explique-t-il, ce qui rend cette population, déjà fragile, plus vulnérable au virus.

Face à cet enjeu, les médecins consultant dans ces centres de dépistage de fortune, installés sous des tentes prêtées par Médecins sans frontières, partenaire du projet, vont au-delà de l'auscultation médicale. Ils réalisent aussi un diagnostic social des personnes.

En cas de test positif, si le malade ne peut pas se confiner efficacement chez lui, le docteur Hadiji lui propose "un isolement à l'hôtel". Une solution financée par les médecins eux-mêmes, "à défaut que les pouvoirs publics prennent les devants", précise M. Hadiji.

"La réussite de ce parcours de soin dans les quartiers défavorisés nécessite obligatoirement des lieux d’hébergement de transition", martèle Annie Lévy. La démarche est soutenue par l'Agence régionale de santé, assure-t-elle, dont elle attend un accompagnement concret, "d'autant plus que ce sera aussi la clé du déconfinement".

"Ce problème concerne aussi les s d’hospitalisation et le retour à domicile de patients covid + maintenus inutilement à l’hôpital uniquement pour des raisons d’habitat non compatible avec un confinement de qualité", a ajouté la médecin, aussi élue au conseil municipal, dans une lettre à la préfecture.

- les gens consultaient "à un stade avancé" de la maladie -

En attendant une réponse institutionnelle à la hauteur de l'enjeu, les médecins reçoivent tout le monde dans leur cabinet de fortune, sans distinction: avec ou sans carte vitale ni ordonnance, gratuitement.

Autant d'efforts pour favoriser un accès aux tests dans des quartiers où jusqu'à présent "les gens arrivaient aux urgences relativement tard, à un stade avancé de la maladie", décrit Aloys Vimard, coordinateur pour MSF.

Nabil Ben Hardi, militaire de 27 ans, se sentait "trop faible, trop mal" pour aller se faire dépister à la Timone, dans le centre de Marseille. "Ici c'est plus pratique, j'habite à côté", assure-t-il. Jusqu'à présent, la seule option pour beaucoup des habitants de Malpassé, était de se rendre au centre-ville en transports en commun, "ce qui est absolument déconseillé en période de confinement", insiste M. Vimard.

Les tests sont traités par le laboratoire covid de l'hôpital Nord. Même si ce grand hôpital public est à moins d'un km à vol d'oiseau, son laboratoire d'urgence dédié au nouveau coronavirus n'était jusqu'à présent destiné qu'à dépister les soignants et les personnes hospitalisées.

"J'ai proposé qu'au lieu de tourner le dos aux quartiers défavorisés, on vienne leur prêter main forte", raconte Mme Lévy, qui glisse que ce premier maillon du parcours de soin en "circuit court" qu'elle promeut a été "le plus difficile à mettre en place", "car la gratuité ça s'organise".

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