Dans les entreprises, les fautes d'orthographe ne sont plus une fatalité

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Par Estelle PEARD - La Défense (France) (AFP)
Publié le 28 mars 2019 - 09:15
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Les fautes d'orthographe, susceptibles de faire dérailler une embauche ou de freiner une carrière, sont la hantise des salariés comme des employeurs
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© FRED TANNEAU / AFP/Archives
Les fautes d'orthographe, susceptibles de faire dérailler une embauche ou de freiner une carrière, sont la hantise des salariés comme des employeurs
© FRED TANNEAU / AFP/Archives

"Il faut savoir se remettre en question". A 41 ans, Amelle, agent administratif en région parisienne, participe à une remise à niveau en orthographe, "prête à revoir les bases" à travers une formation suggérée par sa supérieure.

Car les fautes d'orthographe, susceptibles de faire dérailler une embauche ou de freiner une carrière, sont la hantise des salariés comme des employeurs.

Selon un sondage OpinionWay pour Bescherelle publié en février, 92% des quelque 200 DRH interrogés estiment qu'une mauvaise expression écrite des salariés peut avoir un impact sur l'image de leur entreprise. La moitié d'entre eux jugent même que le niveau en expression écrite a pu jouer dans la mise à l'écart d'une candidature au moment d'un recrutement.

D'où l'importance de se perfectionner quand on a "quelques lacunes", comme Yacine, technicien de 22 ans dans le secteur des télécoms, qui participe au même stage organisé à La Défense par Demos, spécialiste de la formation professionnelle.

Le jeune homme, détenteur d'un BTS, avait un temps délaissé l'écrit, avant de devoir dans son nouveau poste rédiger une quinzaine de courriels par jour, parfois à l'attention de prestataires et dans la précipitation. "Je ne faisais pas attention à mon orthographe, jusqu'à ce qu'un collègue me fasse une remarque", raconte-t-il à l'AFP.

Dans une ambiance "décomplexée" qui tourne parfois à la franche rigolade, sous l'oeil bienveillant du formateur, Yacine voit défiler les exercices et parvient à déjouer les pièges les plus vicieux de la langue française, comme ceux offerts par l'accord du participe passé.

Lunettes rouges entourant des yeux bleus, cheveux poivre et sel ébouriffés, Bernard Fripiat, l'extravagant formateur belge, ne laisse aucun répit aux stagiaires embarqués dans une "dictée cruelle". Mais il n'oublie pas d'instiller une pointe d'humour pour détendre l'atmosphère, ni de livrer de savoureuses anecdotes sur l'origine des mots.

"J'avais peur de ce stage parce que les règles d'orthographe me barbaient à l'école, mais là c'est ludique", respire Jessica, 34 ans, qui rencontre quelques difficultés avec "les accents, la ponctuation et certains accords". Cette remise à niveau lui permettra, espère-t-elle, "d'avoir plus de responsabilité et d'autonomie" dans son travail en gestion immobilière, qui l'amène à rédiger de nombreux courriers.

- "Maladie honteuse" -

Aguerri, M. Fripiat se souvient d'avoir assisté à un "pic" de demandes de stages en orthographe à partir des années 2000. "Avant, il n'y avait personne de l'encadrement dans ces formations, c'était surtout des secrétaires". "Aujourd'hui, avec l'informatique, tout le monde écrit des mails" et "le public est très mélangé lors des stages", assure-t-il.

Le sujet reste sensible. Certains participants "ne veulent pas que ça se sache", constate-t-il. "Les gens vont dire presque avec fierté qu'ils sont nuls en maths mais c'est très difficile pour eux de dire qu'ils sont nuls en français", observe le formateur.

Cofondateur du Projet Voltaire, qui se présente comme le numéro un de la remise à niveau en orthographe et en grammaire françaises, Pascal Hostachy se souvient également d'une époque pas si lointaine où les "problèmes d'orthographe étaient vécus comme une maladie honteuse" tant par les salariés que par les employeurs.

"Il a fallu montrer aux entreprises que le problème était général", alors que "70% des salariés écrivent tous les jours et que dans le même temps le niveau en orthographe a baissé", explique-t-il.

"Une mauvaise orthographe soulève des questions sur le sérieux, les compétences" de la personne qui écrit et peut nuire à "l'image de marque" de l'entreprise, souligne M. Hostachy.

Le Projet Voltaire, qui propose une plateforme d'apprentissage en ligne, revendique désormais 1.000 entreprises partenaires, petites et grandes, dont BNP Paribas, Michelin et SFR.

Conscients du potentiel de ce marché, les éditeurs Le Robert et Bescherelle se sont également lancés dans la remise à niveau en orthographe, proposant comme leurs concurrents des certifications à intégrer au curriculum vitae.

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