Financement libyen : Alexandre Djouhri bientôt aux mains de la justice française

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Par Benjamin LEGENDRE - Paris (AFP)
Publié le 23 janvier 2020 - 20:52
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Après deux ans de bataille judiciaire, la justice britannique va remettre à la France l'homme d'affaires Alexandre Djouhri, protagoniste clé de l'enquête sur des soupçons de financement libyen de la campagne présidentielle de Nicolas Sarkozy en 2007.

Une cour britannique a confirmé mercredi la décision, rendue en février 2019 par le tribunal de Westminster, de remettre M. Djouhri aux magistrats anticorruption français, a appris l'AFP auprès du parquet national financier et de source judiciaire britannique, confirmant une information de Marianne.

L'homme d'affaires franco-algérien avait été arrêté en janvier 2018 à l'aéroport de Londres, en vertu d'un mandat d'arrêt européen émis par la justice française, notamment pour "détournements de fonds publics" et "corruption".

Selon les textes européens, la justice britannique a dix jours pour exécuter cette décision qui n'est pas susceptible de recours, a précisé une source judiciaire. Ce délai peut être toutefois prorogé de dix jours pour des raisons exceptionnelles.

Alexandre Djouhri, 60 ans, est très attendu par les juges d'instruction français qui souhaitent le mettre en examen, les investigations ayant mis au jour plusieurs flux financiers suspects l'impliquant dans cette affaire.

- Peinture flamande -

Le nom de ce proche de l'ancien Premier ministre Dominique de Villepin puis de Claude Guéant, ex-ministre de Nicolas Sarkozy, est notamment apparu dans l'enquête pour la vente en 2009 d'une villa située à Mougins, sur la Côte-d'Azur, à un fonds libyen géré par Bachir Saleh, ancien dignitaire du régime de Khadafi.

Il est soupçonné d'en avoir été, derrière plusieurs prête-noms, le véritable propriétaire et de l'avoir cédée à un prix surévalué, permettant de dissimuler d'éventuels versements occultes.

"C'est l'imaginaire et la machination, j'ai jamais eu de villa en prête-nom et j'ai jamais vendu de villa à Bachir Saleh", s'était-il défendu en mars dernier sur LCI.

Lors d'une perquisition à son domicile à Genève en mars 2015, la découverte d'un RIB au nom de M. Guéant avait aussi intrigué les magistrats.

Ceux-ci soupçonnent le bras droit de Nicolas Sarkozy d'avoir reçu 500.000 euros pour rétribuer diverses interventions en faveur de M. Djouhri, notamment auprès d'EADS (devenu Airbus group) à qui l'homme d'affaires aurait réclamé plusieurs millions d'euros de commission pour une vente d'avions à la Libye.

Claude Guéant a toujours soutenu que cette somme était le fruit de la vente de deux tableaux de peinture flamande.

- 1,13 million d'euros de caution -

Mais les enquêteurs français n'arrivaient pas à auditionner l'insaisissable "Monsieur Alexandre", son surnom dans le milieu politique, qui évitait la France depuis 2015.

Les magistrats ont donc décidé d'émettre un premier mandat d'arrêt en décembre 2017, complété par de nouvelles charges contre lui en février 2018, après son arrestation.

Mais M. Djouhri, qui a dénoncé plusieurs fois une justice "politique" et une "persécution", en conteste la validité.

Sa défense avance que la loi helvétique ne contraignait pas ce résident suisse à se rendre en France. Et que les convocations informelles des enquêteurs, par e-mail et par téléphone en juillet 2016, n'ont pas respecté la procédure française.

"Ils ont fait une perquisition (à son domicile, ndlr), ils n'ont absolument rien trouvé donc ils ont inventé une fuite pour pouvoir m'arrêter à Londres", avait-il déclaré à la sortie du tribunal en février 2019.

Hospitalisé après une série d'accidents cardiaques, il avait été assigné à résidence dans la capitale britannique, après avoir payé 1,13 million d'euros de caution.

Ses recours contre les mandats doivent être examinés le 19 mars par la cour d'appel de Paris, en même temps que des requêtes en nullité déposées par Nicolas Sarkozy, ses anciens ministres Claude Guéant, Eric Woerth et Brice Hortefeux, tous mis en examen sauf ce dernier.

Témoignages de dignitaires libyens, notes des services secrets de Tripoli, accusations d'un intermédiaire... Après six ans de travail, une somme d'indices troublants ont donné corps à la thèse d'un financement, par le régime de Khadafi, de la campagne présidentielle victorieuse de Nicolas Sarkozy.

Mais aucune preuve matérielle n'a été retrouvée, même si des mouvements de fonds suspects ont conduit à huit mises en examen à ce jour.

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