Frappée au cœur, Barkhane dans l'épreuve au Sahel

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Par Daphné BENOIT - Paris (AFP)
Publié le 26 novembre 2019 - 16:46
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Un soldat français participant à l'opération Barkhane, le 27 mars 2019 au Mali
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© Daphné BENOIT / AFP/Archives
Un soldat français participant à l'opération Barkhane, le 27 mars 2019 au Mali
© Daphné BENOIT / AFP/Archives

La mort accidentelle de treize militaires français en opération au Mali frappe Barkhane au moment où l'efficacité et les marges de manœuvre de l'armée française sont mises à l'épreuve par une grave détérioration sécuritaire au Sahel.

"L'heure n'est pas au questionnement sur le bien-fondé ou pas de cette opération, l'heure est au recueillement", a tranché mardi la ministre des Armées, Florence Parly, lors d'une conférence de presse au cours de laquelle, visage tendu, elle a rendu hommage aux "treize héros, morts pour la France" lundi dans la collision de deux hélicoptères.

Il s'agit du bilan humain le plus lourd essuyé par les militaires français depuis le début de l'opération Serval au Mali en 2013 pour barrer la route aux jihadistes.

Depuis 2014, l'opération Barkhane a pris le relais de Serval avec 4.500 hommes déployés dans la bande sahélo-saharienne. Mais, malgré six ans de présence ininterrompue, l'horizon est de plus en plus plombé.

Les violences jihadistes persistent dans le nord du Mali et se sont propagées au centre du pays ainsi qu'au Burkina Faso et au Niger voisins. Depuis 2012, les hostilités, doublées de violences intercommunautaires, ont fait des milliers de morts et déplacé des centaines de milliers de civils.

Malgré les efforts de formation déployés par l'Union européenne, la Mission des Nations unies au Mali (Minusma) et Barkhane, les armées nationales des pays sahéliens, parmi les plus pauvres au monde, semblent quant à elles incapables d'enrayer la progression des attaques. Ces derniers mois, l'armée malienne a subi de lourdes pertes.

Et sous l'effet d'une guerre qui empire, les troupes étrangères au Sahel font face à un rejet apparemment grandissant chez une partie de la population du Burkina Faso, du Mali et du Niger.

"Depuis le début de l'engagement français dans la région, il n'y a pas de progrès, la situation s'est dégradée. Ce qui démontre que la solution n'est pas militaire", juge Jeremy Keenan, spécialiste du Sahel et enseignant à la Queen Mary University de Londres.

"Peut-être que cet incident va faire réaliser aux Français que cela ne marche pas et que la situation ressemble de plus en plus à l'Afghanistan", tranche l'expert britannique.

- "Patience stratégique"

Dans un communiqué, le groupe La France Insoumise (gauche radicale) à l'Assemblée nationale a estimé mardi qu'il était "temps d'ouvrir une discussion sérieuse et rationnelle pour envisager les voies de sortie d'une guerre dont le sens échappe désormais à nombre de nos compatriotes et de Maliens eux-mêmes".

Malgré les tourments au Sahel, Paris affiche jusqu'ici sa détermination à persévérer. Le président français Emmanuel Macron a annoncé mi-novembre qu'il serait appelé prochainement à "confirmer et conforter l'engagement" dans la région, tout en estimant qu'il fallait "repréciser le rôle de Barkhane".

"C'est un accident dramatique, la position de la France n'a pas changé, nous combattons contre le terrorisme, avec des soldats de grande qualité, souvent au péril de leurs vies", a commenté mardi le ministre français des Affaires étrangères Jean-Yves Le Drian.

"Quelles sont les stratégies alternatives ? Il faut avoir de la patience stratégique, de la persévérance, c'est fondamental", soulignait début novembre à l'AFP le commandant de Barkhane, le général Pascal Facon.

Pour aider les Français à accompagner les Maliens au combat, des forces spéciales européennes seront déployées au Sahel courant 2020, a récemment promis Florence Parly.

"Ces pertes malheureuses doivent appeler à un sursaut. Il faut que nos amis européens, s'ils veulent assurer leur sécurité dans la durée contre ce terrorisme, ce jihadisme, nous aident et s'engagent maintenant", "pour éviter cette catastrophe que serait la création d'un État islamique en Afrique, parce que c'est ce qui nous guette, a averti mardi sur RTL le général Jean-Paul Paloméros, ancien chef d'état-major de l'armée de l'Air française.

Au ministère des Armées, nombreux sont ceux à admettre que la solution n'est pas dans les mains des militaires mais du côté des gouvernements des pays sahéliens.

Mais "toutes les notes du ministère comme du Quai d'Orsay (ministère des Affaires étrangères, ndlr) concluent à une absence de volonté politique" des partenaires régionaux, soupire un haut gardé français.

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