"Gilets jaunes" : du sursis requis contre le premier policier jugé à Paris pour violences

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Par Alice LEFEBVRE - Paris (AFP)
Publié le 21 novembre 2019 - 20:11
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Un CRS au palais de Justice de Paris le 21 novembre 2019, jugé pour avoir lancé un pavé en direction de "gilets jaunes" le 1er mai
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© Benoit PEYRUCQ / AFP
Un CRS au palais de Justice de Paris le 21 novembre 2019, jugé pour avoir lancé un pavé en direction de "gilets jaunes" le 1er mai
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Acte disproportionné ou "geste de défense"? Le parquet a requis jeudi trois mois de prison avec sursis à l'encontre du premier policier jugé à Paris pour des "violences volontaires" commises en marge du mouvement des "gilets jaunes".

Ce CRS, âgé de 44 ans dont vingt dans la police, comparaissait "pour violences volontaires de la part d'une personne dépositaire de l'autorité publique" après avoir lancé un pavé en direction de manifestants lors de la mobilisation du 1er mai, dans le XIIIe arrondissement de la capitale.

Sur deux vidéos visionnées à l'audience, on le voit se saisir d'un pavé au sol, puis prendre de l'élan et le lancer vers les manifestants, qui se tenaient à environ huit mètres, derrière un bosquet. Les images ne montrent pas où a atterri le projectile.

"Les auditions et les vidéos du dossier montrent la haute intensité de cette manifestation", relève le président en ouvrant l'audience, qui se tient quelques jours après le premier anniversaire du mouvement émaillé une nouvelle fois de heurts dans la capitale.

Pour le juge, qui "sait" que la décision du tribunal sera "très commentée", ces extraits vidéos sont "ravageurs" pour l'image des forces de l'ordre, même s'il prend soin d'évoquer également la "foule agressive" et le "choc des projectiles".

Ému, le visage fermé, le fonctionnaire, cheveux courts noirs, lunettes rectangulaires, tente d'expliquer son acte en évoquant "un geste de peur" et "absolument pas" de colère, sans pour autant exprimer de regrets.

Sur le terrain ce jour-là depuis le matin, le fonctionnaire parle de "scènes de guérilla" et d'une "pluie permanente de projectiles": "On n'a pas le temps de descendre en pression", se défend-il.

Moins d'une heure avant les faits, le prévenu avait vu son chef de section gravement blessé au visage par un pavé jeté par un manifestant.

"Notre capitaine était sérieusement blessé, c'est notre boss, donc on s'inquiète pour lui, en plus ça bouge de partout", avance le policier.

Alors, "par réflexe", le fonctionnaire dit avoir renvoyé "ce pavé pour avoir une distance de sécurité", affirmant qu'il se "sentait agressé" par les manifestants.

Mais, "je ne voulais blesser personne", rajoute-t-il, en soulignant avoir lancé le projectile "dans une zone neutre". Selon lui, "à l'instant T, c'était la seule chose à faire".

Présent à l'audience, son chef de section blessé le 1er mai estime que le prévenu "a donné plus que de sa personne ce jour-là". "Je suis convaincu que c'est un geste de défense", assure-t-il, évoquant "6h30 de combats" avec les black blocs et les "ultra-jaunes".

- "Pas le procès de la police" -

En commençant son réquisitoire, la procureure dit ne pas vouloir faire de ce dossier "un exemple", assurant qu'il ne s'agissait pas du "procès de la police".

Mais elle pointe la dangerosité de cet acte, même si aucun blessé n'est à déplorer.

"Peu importe le résultat mais lorsque le prévenu lance ce pavé il ne peut pas ignorer qu'il peut provoquer des blessures graves", poursuit la magistrate, assurant que le geste n'était "pas strictement proportionné".

Plaidant la relaxe, l'avocat du prévenu Me Laurent Boguet a jugé "hors-sol" le réquisitoire, estimant que le "jet minable" du policier ne pouvait blesser personne.

Toujours en poste, le CRS encourt jusqu'à 3 ans emprisonnement et 45.000 euros d'amende. Le jugement sera rendu le 19 décembre.

Cette audience inédite sera suivie avant la fin de l'année du procès d'un autre policier qui doit comparaitre à Paris pour avoir giflé un manifestant.

Depuis le début de leur mouvement de contestation sociale il y a un an, les "gilets jaunes" dénoncent régulièrement les "violences policières", l'usage des grenades et lanceurs de balles de défense (LBD) et certains ont porté plainte.

Au total, 212 enquêtes ont été confiées à Paris à l'IGPN, la "police des polices".

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