Gynécologue d'Arras accusé de viol : deux plaignantes demandent une audition au juge

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Par Elia VAISSIERE - Lille (AFP)
Publié le 18 février 2020 - 20:53
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Plus de 60 victimes potentielles, une vingtaine de plaintes déposées... Deux femmes qui accusent un ex-gynécologue d'Arras de viol et d'agression sexuelle demandent une audition au juge d'instruction, "souffrant", selon leur avocat, de ne pas avoir été entendues depuis l'ouverture de l'information judiciaire en 2015.

Angélique, 38 ans, avait déposé plainte en 2014, quelques jours après une consultation "de rééducation post-accouchement", lors de laquelle elle dit avoir "senti le souffle, puis la langue" du médecin sur son vagin, a expliqué à l'AFP son avocat Me Loïc Bussy. Sa soeur, A., 33 ans, avait elle porté plainte "quelques mois plus tard", elle aussi pour "viol et agression sexuelle".

L'enquête menée par la brigade de recherches de la gendarmerie d'Arras, sous la direction du parquet de Béthune, a depuis permis d'identifier "62 potentielles victimes", parmi lesquelles "une vingtaine ont déposé plainte", selon une source proche du dossier. Les plaignantes dénoncent notamment des attouchements déplacés avec la main et un appareil de gynécologie dans le cadre de consultations de rééducation du périnée.

Pour retrouver ces femmes, les enquêteurs avaient exploité la liste des patientes du gynécologue, adressant ainsi un questionnaire à environ 2.000 personnes. "Les investigations ont été clôturées fin 2018" mais, depuis, "une bataille d'expertises et de contre-expertises se joue", a confié à l'AFP une source proche du dossier.

Depuis 2015, Angélique et sa soeur "attendent d'être entendues par la justice. Nous savons que ce dossier est complexe au vu du nombre de plaignantes, que les juges d'instruction sont débordés mais, dans des dossiers aussi douloureux, cinq ans d'attente, c'est trop long. Angélique a le sentiment de ne pas être prise au sérieux", déplore Me Bussy, qui "ne peut pas avoir accès au dossier" tant que l'audition n'a pas lieu.

"Traumatisée", Angélique avait démissionné de son emploi peu après les faits, ne souhaitant plus se rendre à Arras ni consulter le moindre gynécologue. Atteinte d'endométriose et en l'absence de suivi, "elle a dû un jour être hospitalisée" en urgence et se faire retirer "l'intégralité de son appareil génital", selon l'avocat. Avant l'affaire, "elle consultait ce médecin de manière régulière depuis plusieurs années et lui faisait entièrement confiance".

- "Procès médiatique honteux" -

"Mon client est innocent. Il conteste les faits" et n'a "pratiqué aucun geste" contraire à la pratique médicale usuelle, a réagi auprès de l'AFP Me Frank Berton, avocat du mis en cause, appelant au respect de la "présomption d'innocence".

L'avocat dénonce un "procès médiatique honteux", dans un dossier "bien plus compliqué que ne veut le présenter" un confrère "qui n'y a pour l'instant pas accès". Et si le médecin a été privé en 2015 du droit d'exercer la gynécologie, "il n'a pas interdiction de pratiquer la médecine. Si c'était un violeur en série, la justice y aurait mis un terme", estime Me Berton.

"La méthode d'enquête est très particulière, on a envoyé des questionnaires très orientés à des centaines de patients", a encore jugé l'avocat du médecin.

"Dans cette affaire, on est vraiment dans des délais anormaux", regrette de son côté Me Alain Reinsenthel, dont la cliente, aujourd'hui quadragénaire, a porté plainte pour agression sexuelle en août 2016 puis s'est constituée partie civile en 2018. "Toujours pas été entendue non plus", elle dénonce "plusieurs séances de rééducation post-accouchement" et même "pré-accouchement" anormales.

"La loi prévoit qu'il puisse y avoir un collège de deux ou trois juges dans des dossiers aussi lourds (...) mais la justice n'a pas les moyens de ses ambitions (...) Les juges passent leur temps à gérer des urgences, comme les crimes pour lesquels les suspects sont en détention provisoire...", a-t-il regretté auprès de l'AFP.

Me Antoine Vaast défend lui quatre plaignantes, dont l'une a récemment été entendue par le juge "dans la mesure où elle n'allait pas bien". Les autres "commencent à trouver le temps long...", a-t-il déclaré à l'AFP.

Contacté par l'AFP, le parquet de Béthune n'a pas souhaité s'exprimer sur cette affaire.

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