Incendie de la rue Myrha : l'accusé se présente comme "une victime"

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Par Alain JEAN-ROBERT - Paris (AFP)
Publié le 07 décembre 2020 - 19:10
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Incendie rue Myrha à Paris, le 2 septembre 2015, qui a fait huit morts
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© Norman GRANDJEAN / AFP/Archives
Incendie rue Myrha à Paris, le 2 septembre 2015, qui a fait huit morts
© Norman GRANDJEAN / AFP/Archives

"En théorie, je suis une victime". Accusé d'avoir mis volontairement le feu à son immeuble de la rue Myrha en 2015, Thibaud Garagnon a une nouvelle fois choqué la cour d'assises de Paris en tentant d'alléger sa responsabilité dans le sinistre qui a causé la mort de huit personnes.

"J'aurais pu faire partie des victimes de cet incendie. J'ai vu des personnes se défenestrer, j'ai entendu des cris, j'aurais pu y rester...", n'a pas hésité à affirmer l'accusé au cours d'une audience consacrée à sa personnalité.

Huit personnes dont deux enfants âgés de 8 et 14 ans ont péri dans l'incendie.

L'accusé qui, depuis le début de son procès insiste sur son "mal-être profond", admet que pour les parties civiles son discours victimaire "n'est pas audible". "Mais, insiste-t-il de nouveau, j'ai quand même vécu cet incendie".

"Est-ce que quelquefois c'est de votre faute ?", s'agace la présidente.

"C'est possible que je me positionne facilement en victime", concède l'accusé.

Une enquêtrice de personnalité qui l'a rencontré en prison en février 2017 a confirmé que lors de leur entretien il se définissait "en victime".

A aucun moment au cours de son audition de près de trois heures, le jeune homme qui encourt la réclusion criminelle à perpétuité, n'a évoqué les victimes de l'incendie qu'il a provoqué.

Locataire d'un appartement de l'immeuble du 4 rue Myrha dans le 18ème arrondissement de Paris, Thibaud Garagnon a reconnu avoir mis le feu, aux petites heures du matin du 2 septembre 2015, à une des poussettes entreposées dans le hall d'entrée pour exprimer son "désarroi" et sa "souffrance".

En quelques minutes, l'édifice s'est embrasé comme une torche, piégeant ses habitants, notamment ceux des derniers étages.

Thibaud Garagnon qui résidait au 2e étage et était remonté se coucher après avoir déclenché l'incendie a pu échapper aux flammes en se glissant le long de la gouttière de l'immeuble avant l'intervention des pompiers.

Il n'avouera son crime qu'un an après les faits alors qu'un innocent croupissait en prison à sa place.

- Une enfance difficile -

Toujours prêt à s'apitoyer sur son sort, l'accusé, âgé de 24 ans, a décrit une enfance rythmée par les "brimades" notamment de la part d'un père décrit comme "plus que rigide".

"Pendant une grande partie de mon enfance, mon père m'a battu, m'a enfermé dans la cave, m'a obligé à manger seul dans la buanderie...", a affirmé le jeune homme qui évoque aussi "des gifles et des fessées démesurées".

"Mon enfance fut une période très difficile", résume-t-il. La cour rappelle qu'adolescent, au collège, il tenta de se suicider en se jetant d'une fenêtre.

Appelé à la barre, le père de l'accusé a reconnu avoir été "exigeant" avec son fils.

"Depuis tout petit, Thibaud était toujours en colère contre tout", se rappelle le père de l'accusé.

"Oui, admet le père, Thibaud a reçu des fessées principalement quand il était en colère".

"Oui, poursuit-il, c'est arrivé qu'il soit conduit à la cave".

"Thibaud faisait des colères tellement violentes qu'il fallait l'isoler", se justifie le père de l'accusé.

Les parents de l'accusé se sont séparés en 2008. Pour le père de Thibaud Caragnon, il était "beaucoup, beaucoup protégé par sa mère".

Appelée également à la barre, la mère de l'accusé défend son fils bec et ongles.

Certes, reconnait-elle, son fils était "parfois colérique". Mais, ajoute-t-elle, "c'était un enfant différent parce que précoce".

Si elle admet que son fils avait "un sentiment de persécution", elle explique que cela était "exacerbé par sa précocité".

"Nous avons essayé de lui apprendre la bienveillance et l'empathie", poursuit-elle.

Dans son box, après avoir expliqué "le plaisir" qu'il ressent à porter des couches" ou "à se comporter façon bébé", l'accusé songe déjà à l'avenir.

Il se verrait bien conducteur de train à sa sortie de prison. "C'est un désir qui est possible", estime-t-il provoquant un haussement d'épaules de l'avocat général.

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