Les exportations agricoles et alimentaires vers la Chine piégées par le coronavirus

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Par Isabel MALSANG - Paris (AFP)
Publié le 27 février 2020 - 12:32
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Très recherchée par les Chinois, la viande de porc française a vu ses exportations vers la Chine chuter de 22.000 tonnes en novembre 2020, juste avant l'explosion du coronavirus, à 7.000 tonnes en jan
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© Francois Nascimbeni / AFP/Archives
Très recherchée par les Chinois, la viande de porc française a vu ses exportations vers la Chine chuter de 22.000 tonnes en novembre 2020, juste avant l'explosion du coronavirus, à
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Les vins restent dans les chais, le lait en poudre n'est plus chargé dans les containers et la viande de porc s'empile dans les congélateurs: les exportations agroalimentaires françaises vers la Chine subissent un net ralentissement, depuis l'explosion de l'épidémie de Covid-19 qui bloque les flux logistiques.

"Avec la fermeture de la Chine, on a beaucoup de containers de viandes qui sont bloqués", a reconnu le ministre de l'agriculture Didier Guillaume sur Sud Radio. "C'est un drame. La Chine va avoir un problème de début de pénurie alimentaire avec cette maladie".

"Le Covid-19 commence à sacrément perturber l'ensemble des flux mondiaux et les flux agricoles particulièrement", approuve l'économiste Philippe Chalmin.

Très recherchée par les Chinois, la viande de porc française a vu ses exportations vers la Chine chuter de 22.000 tonnes en novembre, juste avant l'explosion du coronavirus, à 7.000 tonnes en janvier, a indiqué Didier Delzescaux, directeur de l'interprofession Inaporc, lors du salon de l'agriculture.

"Tout est grippé en Chine, avec les consignes de confinement, personne n'est dans les entreprises, ni dans les ports", note-t-il.

En 2019, les exportations de viande de porc avaient atteint un record historique à la hausse avec près de 170.000 tonnes, contre 103.000 tonnes en 2018, en raison de la peste porcine africaine qui a décimé les élevages de cochons en Chine alors que ce pays raffole de cette viande, poussant ainsi à la hausse les cours mondiaux.

"On peut imaginer que le coronavirus va ralentir la demande chinoise pendant un temps et limiter l'impact de la Peste porcine africaine", explique M. Chalmin. En janvier, rappelle-t-il, "les prix français (1,60 euro le kilo en moyenne, ndlr) étaient les plus bas de toute l'Europe".

- Baisse des cours du lait -

"L'autre sujet très préoccupant, c'est le lait", selon le ministre français. "Si on arrêtait d'en exporter, ça peut être un danger pour la filière. Ça poserait un vrai problème pour nos éleveurs, les prix s'effondreraient", redoute-t-il alors que les cours des poudres de lait ont déjà commencé à baisser, de l'ordre de 5% en moyenne.

"La Chine est le premier importateur mondial de produits laitiers, mais les bateaux n'étant pas déchargés par manque de personnel, ils attendent en mer", précise Gérard Calbrix, directeur des affaires économiques de l'association de la transformation laitière française (ATLA).

Selon lui, la "quasi-totalité du commerce de produits laitiers est bloquée". Du coup, la vingtaine d'entreprises françaises du secteur qui exportent essentiellement des poudres de lait vers la Chine "ne chargent plus les containers, et attendent que les flux logistiques se rétablissent", ajoute M. Calbrix.

"Cela commence à poser de gros problèmes de stockage, il faut trouver des clients rapidement", note l'économiste. "Si la situation ne se débloque pas dans les trois ou quatre semaines à venir, les marchés laitiers vont connaître un gros problème d'équilibre", prédit-il.

La situation du vin est plus floue. "On voit un ralentissement sur les exportations de vins, mais qui n'est pas encore quantifié", note une source à la Fédération des exportateurs de vins et spiritueux (FEVS) qui compte avoir des chiffres d'ici quelques semaines. "Car les bouteilles consommées aujourd'hui ont été exportées il y a deux mois", explique cette source.

Néanmoins, les exportations de vins et alcools vers la Chine avaient déjà ralenti de 4,7% en 2019 par rapport à 2018, essentiellement en raison de l'affaiblissement du rythme de la croissance économique chinoise.

Face aux difficultés qui fragilisent les échanges agroalimentaires, l'ambassadeur de Chine en France Lu Shaye est venu lui-même encourager les professionnels français au salon de l'Agriculture et a rencontré M. Guillaume.

Le diplomate chinois a surtout mis l'accent sur le développement d'une voie ferrée régulière France-Chine. Elle permettra à terme des échanges plus rapides que par voie navigable, dans le cadre du projet chinois "Routes de la Soie" visant à développer des réseaux commerciaux transcontinentaux.

Actuellement la seule liaison ferroviaire existante entre les deux pays, à raison d'un train par semaine, est arrêtée depuis fin janvier car elle est reliée à Wuhan, l'épicentre de l'épidémie.

"Bien sûr, il faut régler les problèmes techniques comme l'écartement des rails, (différent en Europe et en Russie, par où passe le train), mais on peut améliorer largement l'efficacité du commerce par voie ferroviaire" et "le potentiel d'exportation des produits agroalimentaires de qualité de la France vers la Chine", estime le diplomate chinois.

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