A Marseille, une aide sociale "sur mesure" pour 800 jeunes de cités

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Par Francois BECKER - Marseille (AFP)
Publié le 18 juin 2019 - 18:37
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Vue du quartier Félix Pyat de Marseille, en janvier 2017
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© ANNE-CHRISTINE POUJOULAT / AFP/Archives
Arpenter les cages d'escalier et ramener, porte après porte, les jeunes vers l'emploi: c'est la recette d'un programme présenté comme unique en France et qui a permis, depuis deux ans, d'épauler 800 jeunes de cités dans les Bouches-du-Rhône.
© ANNE-CHRISTINE POUJOULAT / AFP/Archives

Arpenter les cages d'escalier et ramener, porte après porte, les jeunes vers l'emploi: c'est la recette d'un programme présenté comme unique en France et qui a permis, depuis deux ans, d'épauler 800 jeunes de cités dans les Bouches-du-Rhône.

"Que ce soit au stade de foot, à la chicha ou sur le canapé de leurs parents, j'ai vu quasiment tous les jeunes de la cité", explique Julie Landon, l'une des responsables du programme "Impact Jeunes", dont un premier bilan a été présenté mardi dans le quartier marseillais de Malpassé, touché par la pauvreté et le trafic de drogue.

Ce programme souhaite rompre avec le "saupoudrage" des aides en concentrant les efforts sur une échelle réduite et une masse critique d'habitants, et faire "basculer positivement" une cité, s'inspirant de ce qui a pu être fait dans un quartier de Harlem à New York.

"On est tout à la fois : éducateur, médiateur et aussi grande sœur", ajoute cette jeune femme, ingénieure de formation. Elle a rejoint ce programme piloté par un acteur privé reconnu d'utilité publique, la Fondation d'Auteuil, dès son lancement à Marseille en avril 2017.

Sur les 4 millions d'euros prévus sur trois ans, 1,7 million ont déjà été dépensés. Plus de 450 jeunes de 15 à 30 ans sont de nouveau "en marche vers l'emploi", dont 200 ont signé un CDD ou un CDI, selon la Fondation d'Auteuil. Une seconde tranche est prévue à partir de 2020 dans trois autres quartiers, et le concept a été décliné par d'autres dans l'agglomération de Lille.

Dans les trois quartiers visés dans les Bouches-du-Rhône, cité Félix Pyat et quartier Malpassé à Marseille, ainsi qu'une grosse partie de Tarascon, la ville la plus pauvre du département avec 40% de chômage chez les jeunes, le contact a été établi avec deux jeunes sur trois.

Selon les calculs présentés par la fondation, 600.000 euros d'argent public ont été économisés grâce au programme. Son originalité repose sur les "boosters", des responsables chargés d'aller au devant de tous les jeunes de la cité pour les aider, et de créer des liens avec les entreprises.

- "Dignité" -

Ces "boosters" ont des profils atypiques, à l'image de Lucile Ranger, diplômée d'école de commerce, qui revenait de plusieurs années au Brésil et au Sénégal, lorsqu'elle a décidé d'emménager plusieurs mois cité Félix Pyat, l'une des plus pauvres et délabrées de Marseille, puis de travailler pour Impact Jeunes.

Dans son bureau sans âme ni fenêtre prêté par une association locale, son téléphone vibre sans arrêt : des dizaines de messages chaque jour, de jeunes qu'elles connaît par leur prénom et qui, souvent, "laissent pourrir leurs démarches administratives". Elle va les aider à rédiger leur CV, trouver un service civique ou remplir un formulaire, avant, peu à peu, de les conduire vers l'emploi.

"Elle connaît tous les jeunes du quartier. Elle est ici à la maison maintenant", explique Fakroudine Ibrahim, un jeune qui cherche du "hazi" (travail en comorien), en intérim dans la logistique. "Ici, on est à l'aise, comme en famille, alors qu'avec Pôle Emploi, c'est trop +pro+, on est frustrés", ajoute Nasuf Darovechi, 26 ans.

Parmi les jeunes aidés par le programme, Eli Souleymanne, 20 ans, a été accompagné et va partir un an au Japon pour travailler et apprendre la langue, grâce à un mécène privé. Haikel Maayoufi explique de son côté avoir fini par décrocher un emploi de téléopérateur: "Ça m'a rendu ma dignité".

Malgré tout, le concept est limité par ses débouchés, pas forcément florissants et souvent circonscrits à de l'intérim ou des services civiques, rémunérés 600 euros par mois. "Il y a tellement de besoins, c'est dur de répondre de manière suffisante", concède Lucile Ranger.

Mais l'enjeu pour "Impact Jeunes" est aussi de créer un effet "tache d'huile" à partir d'exemples positifs. A Félix Pyat, Lucile Ranger ne compte plus les jeunes qui l'ont appelée sur les conseils d'un grand frère, une sœur ou un ami qu'elle a suivi.

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