Mélanie Witte, le combat contre le cancer "commence dans l'assiette"

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Par Rémy ZAKA - Épinal (AFP)
Publié le 04 décembre 2020 - 08:54
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Mélanie Witte à son domicile à Epinal le 27 novembre 2020
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© JEAN-CHRISTOPHE VERHAEGEN / AFP/Archives
Mélanie Witte à son domicile à Epinal le 27 novembre 2020
© JEAN-CHRISTOPHE VERHAEGEN / AFP/Archives

Mélanie Witte, atteinte d'un cancer très virulent, sait combien les séances de chimiothérapie sont éreintantes: cette Vosgienne se bat donc pour convaincre de la nécessité impérieuse de pouvoir se faire livrer des repas tout prêts à domicile.

L'idée a frappé cette pharmacienne-nutritionniste de 48 ans, résidant à Épinal, dès sa première séance de chimiothérapie. Après six heures de traitement, cette mère d'un garçon de 10 ans et d'une fille de 16 ans s'était sentie "si épuisée" qu'elle ne pensait qu'à dormir. Et pas à manger, ni à cuisiner. "Je connaissais les autres effets secondaires mais pas celui-là", précise-t-elle.

Une jeune femme de 29 ans, compagne d'infortune de ses séances de chimio, lui a confirmé l'urgence du besoin: "Elle vivait à Paris. Elle est revenue chez ses parents dans les Vosges, et elle aussi était exténuée après les séances", raconte Mme Witte.

Elle s'est plongée corps et âme dans ce projet de repas pour les malades du cancer, qui s'est mué pour elle "en thérapie".

La maladie lui est tombée dessus en août. Après des alertes pendant le premier confinement, qu'elle avait refusé d'affronter, de violentes douleurs l'ont décidée à téléphoner à son père, radiologue à Vittel. Le lendemain, un dimanche matin, il effectuait une échographie. Diagnostic, rapide mais implacable: cancer colorectal de stade 4.

"Jamais je n'aurais pensé avoir ce type de cancer", déplore-t-elle, estimant avoir eu une vie "sans excès" en nourriture et alcool, et sans tabac.

- "Lanceuse d'alerte" -

"La littérature scientifique commence à parler du stress comme cause du cancer (...) L'intestin est le deuxième cerveau. Il a un peu trop travaillé et il +expulse la merde+ de mes quatre dernières années!", note-t-elle, allusion à son divorce et sa reconversion professionnelle.

Elle a été obligée de reprendre des cours et a passé un diplôme de nutritionniste.

Ses cheveux blonds parfaitement coiffés, souriante, fine, lunettes suspendues au décolletée de sa robe noire, Mme Witte ne donne pas l'impression d'être si gravement malade. "Ma chimio n'est pas alopéciante", elle ne fait pas tomber ses poils, précise-t-elle.

Après sa dernière séance de chimiothérapie, comme elle le fait depuis le début du traitement, Mélanie Witte s'est donc installée fin novembre chez ses parents à Vittel pour qu'ils s'occupent d'elle. Ainsi, elle n'a pas besoin de cuisiner elle-même. "Je lui fais des bons petits plats même si elle n'a pas faim car le combat est aussi dans l'assiette", confie sa maman, Marie-Odile.

Ensuite, Mélanie Witte, requinquée, peut repartir et courir les rendez-vous politiques pour pousser son projet.

Le nouveau maire (LR) d'Épinal, Patrick Nardin est devenu l'un de ses précieux soutiens. "C'est une lanceuse d'alerte", affirme l'édile avec "émotion" pour cette femme parvenue à mettre "sur la table un sujet nouveau qui mérite toute notre attention".

- "Lettre à Brigitte Macron" -

Dans les Vosges, avec notamment plusieurs villes favorables (Épinal, Remiremont...), une expérimentation de ce service de livraison de repas à domicile pourrait débuter dès 2021.

Une réunion est programmée mi-décembre à Épinal, prévoit M. Nardin. "Aujourd'hui, l'objectif est de mobiliser et Mélanie arrive à fédérer à travers le mécénat", note l'élu, à propos du financement du projet.

Mme Witte imagine que son projet de repas puisse "fonctionner avec des tickets restaurants ou en faisant appel aux restaurants locaux", grâce à une somme fixe allouée aux malades et un reste à charge s'il y a un dépassement. "L'important est que le repas soit bon et pour toute la famille".

Cependant, selon elle, ce service de livraison devra être limité "à trois jours" car ensuite "le patient doit bouger pour guérir".

Pour pérenniser et étendre son idée en France, Mélanie Witte est consciente qu'il "faut une loi". "S'il faut écrire à Brigitte Macron, je le ferai. Elle sera peut-être plus sensible pour m'aider", lance Mélanie.

A ce jour, les personnes âgées ou certains handicapés peuvent sous conditions bénéficier d'aides, notamment des repas. "Dans le système français toutes les aides se calculent à partir d'une grille d'incapacité permanente" (IPP), souligne-t-elle. "Mais le cancer est (considéré) lui temporaire", ajoute-t-elle, bravache.

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