Procès de l'effondrement mortel d'un terminal à Roissy : "c'est une faute collective"

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Par Alice LEFEBVRE - Bobigny (AFP)
Publié le 12 décembre 2018 - 01:37
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Une "faute collective": mardi, au deuxième jour de leur procès, deux sociétés poursuivies pour l'effondrement mortel du terminal 2E de Roissy en 2004 ont reconnu leurs responsabilités tout en se justifiant, au cours de longs débats techniques.

Au total, quatre sociétés dont le groupe ADP (Aéroports de Paris), le constructeur GTM (filiale de Vinci), le bureau d'études Ingerop et le groupe d'inspection et de certification Bureau Veritas sont jugés pour homicides et blessures involontaires jusqu'à vendredi par le tribunal correctionnel de Bobigny.

Les faits remontent au 23 mai 2004. Au petit matin, le toit de l'aérogare du deuxième aéroport européen avait cédé, entraînant la destruction d'une partie du terminal, 11 mois après son inauguration. Six arcs en béton et quatre passerelles s'étaient effondrés sur une trentaine de mètres faisant quatre morts et sept blessés.

En forme de long tunnel, le terminal 2E, vitrine de Roissy, avait été dessiné par l'architecte Paul Andreu, également concepteur de l'Opéra de Pékin. Sa construction avait coûté à ADP quelque 650 millions d'euros.

Mardi, les quatre sociétés questionnées sur leurs responsabilités se sont justifiées point par point, n'hésitant pas à pointer les erreurs des uns et des autres.

Pendant la conception, "ADP n'a pas attiré l'attention des autres entreprises sur la spécificité architecturale de cette zone. C'est un reproche que vous ont fait les experts", rappelle la présidente à Guillaume Sauvé, directeur ingénierie d'Aéroports de Paris. "Elles auraient dû comprendre toutes seules selon vous ?"

"Nous avons adopté le même système que partout en France dans le milieu du bâtiment", répond Guillaume Sauvé.

"Chaque entreprise a ses responsabilités au cours des différents stades, de la conception à l'exécution", ajoute-t-il, rappelant les étapes de la construction de cet ouvrage de prestige, qu'il voit comme la "porte d'entrée de la France".

Le bureau d'études Ingerop était chargé des calculs pour vérifier si le béton résistait bien à la pression. Veritas devait de son côté contrôler si ces calculs étaient bons. "Nous, nous ne gérions pas les calculs", souligne M. Sauvé.

- "Tout le monde est passé à côté" -

"Faux", réagit à la barre le représentant d'Ingerop. Selon lui, ADP "rentrait dans les détails des calculs". Il ajoute: "c'est une faute collective".

De son côté, la représentante du bureau de contrôle Veritas assure que "la mission de contrôleur technique ne donne pas le droit à Veritas de s'immiscer dans l'architecture et de refaire les calculs".

Les calculs opérés pour la construction de cette structure étaient une "erreur technique" collective, ajoute-t-elle, mais "notre mission nous empêchait d'aller plus loin". Alors, "cessons de nous accuser de tout", lance l'un des trois avocat du groupe d'inspection et de certification.

"Tout le monde est passé à côté du problème si je comprends bien", soupire la présidente.

Les experts avaient aussi relevé au cours de l'instruction les "difficultés relationnelles" existant entre ADP et les sociétés sous-traitante. "ADP était très exigeant, on le savait", raconte mardi le représentant d'Ingerop. "Dès que l'on changeait 1 mm sur un plan, cela remontait aux oreilles de l'architecte Andreu".

Lundi, les trois entreprises sous-traitantes, avaient regretté à la barre n'avoir jamais eu "une vue d'ensemble du projet". Elles avaient aussi mis en cause le "délai extrêmement contraignant" exigé par Aéroports de Paris. Cela aurait-il pu provoquer des "erreurs", a demandé mardi la présidente à Ingerop. Le bureau d'études n'a pas répondu.

L'audience, suspendue mercredi à cause de la grève des avocats qui protestent contre le projet de réforme de la justice, reprendra jeudi avec l'audition des parties civiles.

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