Retraites : face au"silence" du gouvernement, les avocats durcissent leur grève

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Par Caroline TAIX - Paris (AFP)
Publié le 05 janvier 2020 - 13:36
Mis à jour le 07 janvier 2020 - 13:09
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Les représentants des avocats ont appelé à durcir la grève dans les tribunaux à partir de lundi.
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"Le gouvernement n'entend que les professions qui bloquent la France": vent debout contre la réforme des retraites et déterminés à défendre leur régime autonome, les représentants des avocats ont appelé à durcir la grève dans les tribunaux à partir de lundi.

"Notre position, c'est + Non + au régime universel. Notre régime autonome a fait ses preuves depuis plus de 50 ans", affirme à l'AFP Christiane Féral-Schuhl, présidente du Conseil national des barreaux (CNB), qui représente les 70.000 avocats français.

La situation semble bloquée entre le gouvernement et la profession. La dernière rencontre avec la ministre de la Justice Nicole Belloubet et Jean-Paul Delevoye, alors haut-commissaire aux Retraites, remonte au 23 octobre, déplore le CNB.

"Notre porte reste ouverte", assure la Chancellerie. "Le ministère de la Justice a proposé au CNB de les recevoir avant les vacances de Noël mais ces derniers, qui sont à ce jour dans une ligne de refus de la réforme en refusant d’intégrer le régime universel, ont décliné".

"Nous sommes prêts à négocier dans le cadre du régime autonome", rétorque Christiane Féral-Schuhl, pour qui la profession d'avocats est "l’une des grandes perdantes" de la réforme. Les représentants des avocats ont envoyé vendredi une lettre ouverte à Nicole Belloubet: la grève "se nourrit de votre silence lorsqu’il s’agit de défendre notre profession", ont-ils écrit.

"Le gouvernement n'entend que les professions qui bloquent la France. Nous allons nous faire entendre en désorganisant la mécanique judiciaire", menace la présidente du CNB.

Les avocats sont appelés à demander le renvoi des audiences et à "cesser plus généralement toute activité judiciaire". Autre mode d'action: l'arrêt des désignations d'avocats en matière d'aide juridictionnelle, pour les gardes à vue, les étrangers et les mineurs, etc.

La profession se défend d'être un régime spécial: les avocats cotisent à une caisse qui s'autofinance. "Notre caisse est solidaire car nous versons tous les ans autour de 100 millions d'euros aux régimes déficitaires", souligne Christiane Féral-Schuhl.

- "L'universalité a volé en éclat!" -

"Notre système est vertueux car excédentaire, égalitaire et solidaire", vante Estellia Araez, présidente du Syndicat des avocats de France (SAF). A la retraite, les avocats perçoivent actuellement au minimum 1.416 euros par mois, met-elle en avant. Après la réforme, ce montant tomberait à 1.000 euros, alors que les cotisations doubleraient, passant de 14 à 28% pour ceux qui gagnent moins de 40.000 euros par an.

"Cela va se répercuter sur nos honoraires", prévient la syndicaliste. Le salaire médian des avocats, une profession avec de gros écarts de revenus, s'élève à 44.000 euros.

"Les jeunes avocats vont le plus pâtir de la réforme. L'impact économique n'est pas gérable", affirme la présidente du CNB. Le régime universel crée "une inégalité très forte pour les indépendants", qui devraient cotiser comme les salariés, sans pour autant avoir les congés payés, les 35 heures, les indemnités chômage, etc.

"On nous a vendu un régime universel, mais selon qui crie le plus fort, des régimes vont être conservés", s'emporte Estellia Araez, qui cite les pilotes de ligne et les policiers. "L'universalité a volé en éclats! On se demande si le gouvernement ne se moque pas de nous quand on voit ce que d'autres ont obtenu".

En septembre, des milliers d'avocats (20.000 selon le CNB) ont manifesté à Paris contre la réforme. Le 5 décembre, une journée "justice morte" a été organisée.

Des actions vont avoir lieu à partir de lundi aux quatre coins de France. A Lyon, les avocats sont appelés à participer à une assemblée générale puis à un rassemblement. Onze audiences vont être perturbées par le mouvement, selon le parquet qui s'attend à ce que l'appel soit "énormément suivi".

A Bobigny, "une journée totale de grèves" est prévue lundi, avec "demande de renvoi dans tous les dossiers, et une assemblée générale pour déterminer une éventuelle poursuite de ce mouvement sur toute la semaine, voire la semaine d'après", explique le bâtonnier Frédéric Gabet. "Ce qu'on souhaite expliquer, c'est que tous les avocats ne sont pas des nantis, loin de là".

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