Salles désertées, inaugurations reportées : coup d'arrêt pour les musées français

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Par Jean-Louis DE LA VAISSIERE - Paris (AFP)
Publié le 24 mars 2020 - 10:00
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Vue aérienne du Grand Palais en juillet 2019 à Paris
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© Eric Feferberg / AFP/Archives
Vue aérienne du Grand Palais en juillet 2019 à Paris
© Eric Feferberg / AFP/Archives

Pour les musées français, l'effet coronavirus est brutal et financièrement lourd: des expositions phares, de Christo à Pompéi, attendent dans des salles vides et les ouvertures des nouveaux musées, évènements très attendus du printemps, sont retardées sine die.

Au Centre Pompidou, tout est accroché pour raconter au public la fabuleuse histoire de Christo à partir de ses oeuvres préparatoires: ou comment un pauvre étudiant bulgare passé à l'Ouest, aujourd'hui riche new-yorkais, avait emballé le Pont Neuf et prépare à l'automne l'emballage de l'Arc de triomphe.

Les salles Christo sont plongées dans un profond silence pour des semaines ou des mois. A côté, le démontage de l'exposition Boltanski reste en plan. On escompte que l'exposition Matisse, mi-mai, aura bien lieu, avec les prêts des Etats-Unis.

Pertes dues à l'arrêt des activités du Musée: 1,2 million d'euros par mois.

Pour l'exposition Pompéi au Grand Palais, les caisses d'objets précieux venues du site ont pu franchir in extremis le 9 mars la frontière, avant la fermeture totale de la péninsule.

Elles n'ont pas été déballées, alors que la scénographie, novatrice et spectaculaire, est presque achevée.

"C'est un coup dur. On attendait 3.000 personnes par jour dans le Salon d'honneur. On ouvrira quand on pourra", explique Emmanuel Marcovitch, directeur général délégué de la Réunion des musées nationaux - Grand Palais.

Mais "à l'automne le Salon est utilisé sans interruption. Et il n'y a pas beaucoup d'espaces à Paris avec 1.200 m2". Et puis d'autres expositions et évènements "importants pour le rayonnement de Paris" sont annulés comme le Saut Hermes, ou reportés comme le Forum du Bois et Art Paris.

Les prestigieux conservateurs-conférenciers en sont réduits à élaborer à domicile des "mallettes pédagogiques".

Au total, la perte sera de 50.000 euros par jour de fermeture pour le seul Grand Palais. Près de la moitié des salariés de la RMN-Grand Palais --plus de 400- (qui s'occupent des nombreuses boutiques, des billetteries, mais aussi des ateliers de moulage et chalcographie) sont sans activité.

Pour consoler les fans de Pompéi, le Grand Palais a décidé la mise en ligne dès mercredi de contenus audiovisuels et numériques de l'exposition.

- Un sprint interrompu -

De même que le musée de l'Hôtel de la Marine rénové, place de la Concorde, qui devait ouvrir en juillet, le chantier de transformation de la Bourse de Commerce, près des Halles, en musée d'art contemporain de la collection Pinault, est reporté à septembre.

"Toute une équipe était dans le sprint final, en surpression. Maintenant on vit au jour le jour. Garder la dynamique n'est pas facile. Il faudra se mettre en ordre de bataille pour redémarrer. Et cela aura un impact financier certain. L'installation des expositions devait débuter mi-avril", rappelle Martin Bethenod, directeur de la Bourse de Commerce.

L'ouverture de ce nouveau musée d'art contemporain devait être l'évènement de juin. "Le chantier a bien été livré et on en était dans la phase de levée des réserves. Restent tous les chantiers secondaires en cours" - abords, mobilier, billetteries...

Martin Bethenod ressent "une double tristesse" car à Venise aussi plusieurs expositions quasi-montées de la collection Pinault au Palazzo Grassi et à la Punto della Dogana sont reportées.

Par visioconférences ou confcalls, directeurs et conservateurs en télétravail des musées de France reprogramment fébrilement leur agenda annuel, décalant tout ce qu'ils peuvent - et c'est parfois la quadrature du cercle -, contactant les multiples acteurs qui concourent aux expositions.

Directeur du Centre Pompidou, Bernard Blistène ne veut pas être dans la plainte, rappelant que "le coronavirus est tellement plus contraignant pour d'autres". "Nous sommes privilégiés", assure-t-il, optimiste, à l'AFP.

"Plus l'attente est forte, plus le désir s'accroît. Les gens vont se précipiter voir Christo", prédit Bernard Blistène, qui table sur un retour à la normale en juin. Le nouveau Centre Pompidou Shanghai a rouvert. En Chine on a tout de suite senti le désir de revenir vers les musées, lieux de méditation et de partage". Il espère que les Français feront de même.

Quand il a appris le report, "Christo m'a lancé au téléphone: tu sais. J'en ai tant vu", raconte, amusé, Bernard Blistène.

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