Carnival, première cible devant la justice américaine de Cubains spoliés en 1959

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Par Leila MACOR - Miami (AFP)
Publié le 02 mai 2019 - 06:00
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L'aéroport de La Havane et la compagnie Cubana de Aviacion, deux biens confisqués pendant la révolution de 1959
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© ADALBERTO ROQUE / AFP
L'aéroport de La Havane et la compagnie Cubana de Aviacion, deux biens confisqués pendant la révolution de 1959
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"Les frères Castro et leurs amis du parti communiste ont volé ce qui appartenait à mon grand-père": soixante ans après la révolution à Cuba, Mickael Behn a été l'un des premiers jeudi à demander réparation devant la justice américaine pour les biens confisqués à sa famille.

Cet Américain d'origine cubaine s'est attaqué, avec Javier Garcia Bengochea, au numéro un mondial des croisières Carnival pour son utilisation de terminaux portuaires à Santiago de Cuba et à La Havane, dont les deux hommes revendiquent la propriété.

Leur plainte a été déposée dès 00H01 (04H01 GMT), a fait savoir leur avocat Bob Martinez. C'est un tribunal fédéral de Miami qui a été saisi.

Carnival, dont le siège se trouve en Floride, "fut le premier groupe de croisières à bénéficier de notre propriété volée, il mérite donc l'honneur peu enviable d'être le premier à être poursuivi dans le cadre de (la) loi" Helms-Burton, a dit M. Garcia Bengochea.

En décidant récemment d'activer le chapitre III de cette loi de 1996, suspendu jusqu'ici pour des raisons diplomatiques, l'administration de Donald Trump a ouvert aux Américains d'origine cubaine une voie légale, effective depuis ce jeudi, pour demander compensation aux Etats-Unis.

La justice américaine peut être saisie de demandes visant l'Etat cubain, mais aussi des entreprises privées considérées comme bénéficiant du "vol" de ces biens.

- Centaines de recours -

Plusieurs centaines de recours pourraient être déposés aux Etats-Unis contre quiconque est accusé par des ayants-droit d'avoir tiré profit des nationalisations.

Autre plaignant attendu dans les prochains jours: José Ramon Lopez Regueiro, qui avait 6 ans quand son père a fui Cuba alors que les révolutionnaires renversaient son ami proche, le dictateur Fulgencio Batista.

Ses biens, comme ceux de nombreux riches Cubains, ont été confisqués par le régime castriste. Il était, entre autres, actionnaire majoritaire de l'aéroport Rancho Boyeros de La Havane, de la compagnie aérienne Cubana de Aviacion, de quatre hôtels et d'un journal.

"Je vais déposer en premier la réclamation concernant l'aéroport de La Havane et Cubana de Aviacion", a indiqué M. Lopez Regueiro, 65 ans. Selon lui, le terminal valait 24 millions de dollars en 1958.

Il compte cibler "tous ceux qui utilisent" cet aéroport, comme les compagnies American Airlines, Aeromexico, Air Canada, Air France et Iberia.

L'ancien président américain Barack Obama avait engagé un réchauffement des relations avec Cuba en 2014 mais son successeur républicain Donald Trump a fait marche arrière, rétablissant notamment des sanctions contre ce qu'il a appelé la "troïka de la tyrannie", formée de Cuba, du Nicaragua et du Venezuela.

Dans ce contexte, la pleine application de la loi Helms-Burton vise à affaiblir le régime cubain, considéré par Washington comme le marionnettiste des présidents Nicolas Maduro à Caracas et Daniel Ortega à Managua.

Une méthode qui devrait être efficace, estime l'avocat Marcell Felipe, président de l'ONG Inspire America, qui conseille à Miami des cabinets d'avocats sur la loi de 1996.

"En plus du droit fondamental qu'est celui de la propriété privée et de promouvoir un Etat de droit, il s'agit aussi d'un arsenal considérable pour soustraire aux familles des généraux (cubains) l'argent frais des investisseurs", a expliqué M. Felipe.

- "Complication importante" -

L'Union européenne, principal partenaire commercial de l'île depuis 2017, et le Canada ont promis de protéger les intérêts de leurs entreprises.

Mais sans même présager de l'issue de chaque plainte, ni de l'exécution des éventuels jugements, la simple perspective de poursuites représente une "complication importante pour Cuba", a relevé l'avocat Jason Poblete, expert en matière de sanctions internationales.

Selon lui, les investisseurs potentiels ayant des intérêts aux Etats-Unis vont désormais réfléchir à deux fois avant de réaliser une transaction à Cuba impliquant une propriété confisquée. Un avis partagé par d'autres observateurs.

"Le spectre du risque politique a toujours existé. Mais désormais ce spectre s'est un peu concrétisé et il ne s'agit plus uniquement d'un risque politique, mais aussi potentiellement juridique", a poursuivi M. Poblete.

Donald Trump a accru encore davantage la pression sur La Havane mardi en menaçant d'instaurer un embargo "total" sur l'île si elle continuait de soutenir le dirigeant vénézuélien Nicolas Maduro, tandis que des soldats se soulevaient contre lui.

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