Entre la Russie et le Conseil de l'Europe, le spectre d'une crise durable

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Par Romain COLAS, Laurent GESLIN - Strasbourg (AFP)
Publié le 20 janvier 2018 - 12:37
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Près de quatre ans après avoir privé la Russie de ses droits de vote à l'assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe, la plus vieille institution européenne cherche une issue pour éviter un éloigne
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© SEBASTIEN BOZON / AFP/Archives
Près de quatre ans après avoir privé la Russie de ses droits de vote à l'assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe, la plus vieille institution européenne cherche une issue po
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Près de quatre ans après avoir privé la Russie de ses droits de vote à l'assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe, la plus vieille institution européenne cherche une issue pour éviter un éloignement durable voire définitif de Moscou.

Sauf coup de théâtre, les 18 parlementaires russes, suspendus depuis avril 2014, en riposte à l'annexion de la Crimée par Moscou, ne devraient pas se présenter lundi à la première session de l'année de l'Assemblée parlementaire, organe consultatif du Conseil de l'Europe (APCE).

En tant qu'Etat membre du Conseil, la Russie peut présenter une délégation de parlementaires au début de chaque session annuelle. Seule condition: être acceptée par les 46 autres délégations.

Mais il y a peu chance que cela se produise. "Une partie du Donbass étant toujours hors du contrôle de Kiev, et la Crimée restant annexée, ce serait un signal très étrange si cette sanction était levée. La nouvelle majorité (de l'APCE) serait alors obligée d'expliquer ce qui a changé sur le terrain", analyse Lauri Mälksoo, spécialiste des relations entre la Russie et le Conseil de l'Europe.

La question du retour des parlementaires russes à l'assemblée, auquel s'oppose fermement l'Ukraine, est pourtant cruciale pour l'avenir du Conseil.

D'autant que les autorités russes, en guise de protestation, ont décidé fin juin 2017 de geler leur contribution annuelle de 33 millions d'euros au budget du Conseil de l'Europe.

Un coup dur pour l'institution strasbourgeoise, dont Moscou est l'un des six principaux contributeurs avec l'Italie, la France, l'Allemagne, le Royaume-Uni et la Turquie.

Fin février, la Russie devrait théoriquement s'acquitter de la première partie de sa contribution pour le budget 2018, mais des "rumeurs contradictoires" courent sur ce versement, selon un diplomate.

Au désengagement financier de Moscou s'ajoute celui de la Turquie qui a annoncé en novembre ne plus vouloir faire partie des principaux contributeurs et a réduit sa contribution de 33 à 13 millions d'euros millions pour l'année 2018.

"Si la Russie ne verse pas sa contribution de 33 millions d'euros, le budget du Conseil de l'Europe risque d'accuser un trou de 50 millions d'euros. C'est beaucoup", s'inquiète le représentant d'un Etat membre.

"Des mesures préventives" ont été prises et "certains crédits gelés" pour éviter l'impasse budgétaire, indique ce diplomate.

L'APCE compte 318 députés issus des Parlements nationaux des 47 pays membres du Conseil de l'Europe. La Russie l'a rejoint en 1996, après la fin de l'Union soviétique.

- Le risque d'un 'désengagement progressif' -

Ces tensions avec Strasbourg sont prises au sérieux par les organisations de défense des droits de l'homme russes, qui craignent que plus de 140 millions de citoyens russes ne se retrouvent sans la protection de la CEDH, le bras juridique du Conseil, qui veille au respect de la Convention européenne des droits de l'Homme.

"La Russie n'a jamais eu l'intention de quitter le Conseil de l'Europe", a assuré à l'AFP Ivan Soltanovski, ambassadeur de Russie auprès du Conseil.

"Le fait que la Russie ne participe pas actuellement à l'Assemblée parlementaire ne signifie aucunement que mon pays cherche à limiter ou réduire sa coopération au sein des autres instances du Conseil", a-t-il insisté.

"Mais si ces tensions se poursuivent, il y a le risque d'un désengagement progressif de Moscou", nuance une source diplomatique occidentale.

Sur le plan juridique, le bras de fer a pris une tournure nouvelle: en 2015, la Cour constitutionnelle russe s'est donné le droit de refuser l'application d'une décision de la CEDH.

Le danger d'une telle décision, "c’est que les grandes puissances, comme la Russie, choisissent ce qu’elles veulent et peuvent imposer un souverainisme juridique", affirme l'expert Lauri Mälksoo.

Le cas russe a poussé l'APCE à engager une réflexion sur ses statuts. Une "commission ad-hoc" d'une soixantaine de parlementaires issus des Etats membres doit aborder cette question à partir de mardi, avec la participation de deux élus russes, permettant de maintenir le dialogue.

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