Le mystérieux vote des "Latinos" dans l'Amérique de Trump

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Par Javier TOVAR avec Laura BONILLA à New York - Los Angeles (AFP)
Publié le 03 novembre 2018 - 09:31
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Un panneau rédigé en anglais et en espagnol pour diriger les électeurs vers un bureau de vote, lors des primaires organisées par le parti républicain, le 28 août 2018 à Phoenix, en Arizona
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© Ralph Freso / Getty/AFP/Archives
Un panneau rédigé en anglais et en espagnol pour diriger les électeurs vers un bureau de vote, lors des primaires organisées par le parti républicain, le 28 août 2018 à Phoenix, en
© Ralph Freso / Getty/AFP/Archives

Trafiquants de drogue, délinquants sexuels, "serpents venimeux" accusés de tous les maux de la société américaine: les immigrés "latinos" sont régulièrement pris pour cible par le président Donald Trump pour mobiliser son électorat conservateur avant le vote crucial du 6 novembre.

Mais curieusement, les millions d'Américains d'origine "hispanique" n'ont pas l'air décidé à prendre leur revanche dans les urnes: aucun vote massif de cette communauté pour chasser du Congrès le camp républicain n'est attendu mardi.

Plus exactement, les insultes et brimades répétées de Donald Trump ne semblent pas suffire à mobiliser les électeurs latinos en faveur du parti démocrate. Elles les dissuaderaient simplement de voter tout court, expliquent des experts.

"En 2016, de nombreux analystes estimaient que les déclarations du candidat Trump contre les immigrés pouvaient être un facteur de mobilisation électorale des latinos" mais en réalité, "la participation a chuté", déclare à l'AFP Mark Lopez, directeur de recherches sur les migrations et la démographie à l'Institut Pew, basé à Washington.

Et 30% des électeurs "hispaniques" ont tout de même voté pour Donald Trump.

Au total, 29 millions d'entre eux sont inscrits pour ce vote dit de mi-mandat, qui doit renouveler la totalité des 435 élus de la Chambre des représentants (chambre basse), un tiers du Sénat (chambre haute), les gouverneurs de 36 Etats ainsi qu'une multitude d'élus locaux, juges, shérifs, etc.

Echaudés par les résultats de la dernière élection présidentielle, les politologues se veulent cette fois prudents. "On va bien voir ce qui se passe cette année", dit M. Lopez. "Les Latinos seront peut-être impliqués dans le scrutin, mais différents indices montrent que la participation n'augmentera pas beaucoup par rapport à 2014", estime-t-il.

Lors de ces précédentes élections générales de mi-mandat, les électeurs hispaniques affichaient un taux de participation de seulement 27%, au plus bas depuis 1986, selon l'Institut Pew.

- Vétérans et évangéliques -

Cercle vicieux: moins les Latinos sont mobilisés, moins les grands partis politiques sont enclins à investir dans des campagnes pour les inciter à voter et à aborder des thèmes qui les concernent...

Et moins les grands partis s'en soucient, moins les Latinos ont une image positive de ces derniers. Certes, ils sont généralement mieux disposés envers le parti démocrate, mais celui-ci "n'en fait pas assez" pour cette catégorie d'électeurs, estime Christine Marie Sierra, professeur émérite de sciences politiques à l'Université du Nouveau Mexique.

"On ne cesse de dire que les démocrates doivent aller chercher la classe ouvrière blanche, ou les femmes blanches dans certaines banlieues. C'est bien joli mais ce n'est pas ça leur base, ce sont les communautés +de couleur+", affirme-t-elle à l'AFP.

Pour elle, les démocrates doivent "investir beaucoup plus" dans cet électorat s'ils veulent mobiliser, "surtout chez les Latinos".

Selon une étude de l'ONG Latino Decisions, 63% des Hispaniques inscrits sur les listes électorales disent vouloir aller voter mardi. Mais plus de la moitié d'entre eux n'ont pas été contactés par un quelconque candidat de leur circonscription.

"Or les électeurs contactés sont toujours plus susceptibles que les autres d'aller effectivement voter", explique David Ayon, qui a participé à cette enquête.

Pour la défense des états-majors politiques, le vote latino est d'autant plus insaisissable qu'il n'est pas issu d'un bloc monolithique mais d'une mosaïque de communautés très diverses, dont l'identification aux grands partis n'est pas nécessairement liée à la nationalité d'origine, relève M. Lopez.

Les républicains peuvent par exemple compter sur le soutien massif des Américains d'origine cubaine, farouchement opposés au régime communiste de l'île, mais aussi de la plupart des vétérans de l'armée ou encore des fidèles des cultes évangéliques qui font florès en Amérique centrale.

Les nombreux électeurs d'origine mexicaine au Texas voteront-ils pour le démocrate Beto O'Rourke? En Floride, où ils se sont réfugiés en masse après l'ouragan Maria, les Porto-Ricains feront-ils pencher la balance en faveur des démocrates? Le suspense restera entier jusqu'à mardi soir.

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