Syrie : loin du front de Raqa, on pense déjà à la reconstruction

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Par AFP
Publié le 13 octobre 2017 - 20:43
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La ville de Raqa, en Syrie, ravagée par les combats contre les combattants de l'Etat islamique, le 1
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© BULENT KILIC / AFP
Des immeubles détruits dans la ville de Raqa, le 1er octobre 2017
© BULENT KILIC / AFP

Mohamed Hassan étale une grande carte de Raqa sur une table: avec d'autres volontaires, le jeune ingénieur se penche déjà sur la reconstruction de cette ville syrienne dévastée où des forces antijihadistes bataillent toujours contre le groupe Etat islamique (EI).

"Nous connaissons chaque centimètre de Raqa", affirme M. Hassan, 27 ans, membre du Conseil civil de Raqa, une administration locale. "Tout ce dont nous avons besoin, c'est l'annonce de la libération, que nous attendons dans les prochains jours".

Il fait partie des dizaines d'avocats et d'ingénieurs qui, depuis Aïn Issa, à quelque 50 km au nord de Raqa, étudient les premiers travaux à lancer en priorité dans la ville qui fut la "capitale" de facto de l'EI en Syrie.

Une alliance de combattants kurdes et arabes soutenue par Washington a conquis près de 90% de Raqa mais plusieurs mois de bombardements aériens menés par la coalition internationale antijihadistes l'ont transformée en un paysage de ruines et de désolation.

Sur la carte, Mohamed Hassan indique des stations de pompage d'eau qui attendent d'être restaurées et montre des avenues bloquées par des gravats à déblayer.

"Nous allons commencer de l'extérieur et progresser vers l'intérieur", explique-t-il.

Créé il y a six mois, le Conseil civil de Raqa regroupe quelque 100 volontaires originaires de la ville et de ses environs.

Des hommes et des femmes de tout âge, issus de différents groupes ethniques et religieux, sont répartis entre 14 comités chargés de problématiques comme la réouverture des écoles, la reconstruction des hôpitaux et des maisons ou la remise en état des services d'eau et d'électricité.

- 'Défi énorme' -

Mais le premier chantier à gérer, c'est la neutralisation des mines laissées par les jihadistes. Elles sont partout: dans les rues, les institutions publiques, les maisons.

"C'est un défi énorme. On ne peut rien faire avant de nous débarrasser des mines", reconnaît Ibrahim al-Hassan, un autre ingénieur.

"La deuxième phase, c'est la restauration des réseaux d'eau et d'électricité. Après, on pourra s'occuper des écoles. Ce sont les priorités essentielles", poursuit-il.

Les matériaux de reconstruction vont probablement être importés du Kurdistan irakien voisin, explique M. Al-Hassan, sans toutefois exclure de s'approvisionner dans des zones tenues par le gouvernement syrien.

Devant les locaux à Aïn Issa, des bulldozers attendent d'entrer en action. Ce sont les premiers d'un lot de 56 machines offertes par le département d'Etat américain.

Washington et la coalition internationale anti-EI ont "des projets de court terme, à impact rapide" pour redonner vie à Raqa, selon un responsable américain. Des opérations de déminage d'infrastructures vitales, comme les écoles et les hôpitaux, sont ainsi prévues.

"Mais nous ne serons pas là éternellement pour tout arranger. Nous n'avons ni l'argent, ni l'envie de rester pendant 20 ans à déminer les maisons", précise ce responsable.

Les Etats-Unis ont toutefois aidé le Conseil civil de Raqa à "prépositionner" plus de 900 tonnes de nourriture -riz, fèves et blé notamment- dans des silos à grains rénovés près d'Aïn Issa, en attendant de pouvoir les distribuer à Raqa, d'après un autre responsable américain.

Cette aide comprend également la fourniture de citernes d'eau, de camions de collecte des eaux usées et de kits d'hygiène pour les dizaines de milliers de civils qui devraient regagner la ville une fois les combats terminés.

- 'Beaucoup de douleur' -

Pour l'heure, le coût de la reconstruction n'a pas été évalué: en raison des violences, les membres du Conseil civil ne peuvent pas se rendre à Raqa.

L'Union européenne s'est toutefois engagée à hauteur de trois millions d'euros pour financer des opérations de déminage, selon Abdullah Arian, un avocat du Conseil civil qui s'est rendu à Rome en septembre pour solliciter des fonds.

"Raqa a été détruite pour que la terreur n'atteigne pas Washington, Paris ou Londres", affirme M. Arian, en référence au fait que plusieurs attentats meurtriers perpétrés en Europe auraient été planifiés par l'EI dans la ville syrienne.

"Ceux qui ont participé à sa destruction devraient (donc) être les partenaires de son développement", assure l'avocat, qui attend toujours de voir ce qui reste de sa maison.

Vice-présidente du Conseil civil de Raqa, Laïla Moustafa appelle également au soutien de la communauté internationale mais exclue de son côté toute coopération avec le régime de Bachar al-Assad pour la reconstruction.

"Raqa ne sera plus la ville que j'ai quittée il y a cinq ans. Il y a eu beaucoup de douleur", confie-t-elle.

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