Grand débat : les maires réservés, les "gilets jaunes" franchement hostiles

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Par Dominique CHABROL - Paris (AFP)
Publié le 14 janvier 2019 - 20:02
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Les maires qui ont remis lundi à Emmanuel Macron les doléances exprimées depuis un mois par les Français sont réservés sur l'efficacité du grand débat lancé par le chef de l'Etat, rejeté par avance par de nombreux "gilets jaunes".

Pour Vanick Berbérian, président de l'Association des maires ruraux de France (AMRF), la lettre d'Emmanuel Macron adressée dimanche aux Français est "une rampe de lancement" pour le grand débat national et "pose bien le diagnostic".

Reçu dans l'après-midi à l'Elysée, puis par le président de l'Assemblée nationale, Richard Ferrand, M. Berbérian est cajolé par l'exécutif qui compte sur ses troupes, quelque 10.000 maires de communes rurales, pour faire vivre le grand débat.

Mais s'ils sont fiers d'avoir fait remonter la parole des Français, ces derniers restent prudents sur la suite.

"On sent que le président de la République a besoin de nous. Pour le moment, on dépose nos cahiers de doléances volontairement avant le grand débat pour ne pas être associés à une opération gouvernementale", explique Christian Derrien, maire de Langonnet (Morbihan), une commune de 1.900 habitants.

Des milliers de doléances recueillies dans de petits cahiers ont déjà été transmises à l'exécutif. La justice sociale, fiscale et la défense des services de proximité figurent en tête des revendications.

"Les plus grosses doléances, c'est plus d'équité au niveau social, de l'économie. Les gens se sentent oubliés dans les petites communes, avec tous ces services publics qui disparaissent", relève Pascal Brusseaux, maire de Guernes (Yvelines), 1.100 habitants.

Quelle suite le chef de l'Etat va-t-il donner à cette somme inédite de protestations et de propositions des Français ? "Ce qu'il en fera reste un petit peu flou", estime Vanik Berberian, qui craint que ce soit encore une fois à l'arrivée "du raccommodage et non pas des changements de fond".

- Maires "facilitateurs" -

"Soyez sûr que cela aidera à mieux comprendre les enjeux d'aujourd’hui, nourrira le travail législatif et j'en suis sûr produira des résultats qui permettront de sortir par le haut de ce qui est encore un moment douloureux", l'a assuré Richard Ferrand.

Certains maires attendent de voir s'il y a une demande de leurs administrés avant de s'engager plus avant dans le grand débat. D'autres entendent être des "facilitateurs" qui permettent de renouer le dialogue entre l'Etat et les citoyens.

D'autres encore feront service minimum. "On leur mettra des salles à disposition, mais on n'organise pas, on n'est pas fait pour ça. On n'a pas à participer et à s'en mêler", affirme Paul Le Bihan, maire de Porcheville (Yvelines) pendant 36 ans.

Côté "gilets jaunes", dont le grand débat est sensé canaliser la colère, les réactions étaient lundi beaucoup plus tranchées.

La lettre d'Emmanuel Macron "nous a donné envie de vomir. Personne n'y croit à ce grand débat… Beaucoup de thèmes ne sont pas abordés comme la liberté d'expression, le positionnement de la police, l'Union européenne…", s'indignait Laure, animatrice du groupe "yellow friday", qui revendique 400 à 500 personnes dans l'agglomération bordelaise.

"Il veut pas parler, il veut pas revenir sur l'ISF, il veut revenir sur rien", a réagi André Jacquemot, un retraité de 67 ans : "Il veut parler de tout, sauf de ce qui nous intéresse, nous. Et est-ce qu’il parle des retraites, est-ce qu’il parle des petits salaires, il parle de rien, non. C’est de l’enfumage".

Pour d'autres, comme Chantal Moreau, qui se présente comme "coordinatrice" des "gilets jaunes" dans les Bouches-du-Rhône, le chef de l'Etat essaie surtout de "gagner du temps". "C'est juste un alibi pour dire +vous voyez, j'ai essayé de dialoguer avec eux et ils n'ont pas voulu+", estime cette retraitée marseillaise.

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