Chili : les Mapuches misent sur le pape pour faire avancer leur combat

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Par Paulina ABRAMOVICH - Santiago du Chili (AFP)
Publié le 16 janvier 2018 - 09:41
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Des camions appartenant à des compagnies forestières incendiés lors d'affrontements entre la police et des membres du peuple Mapuche, le 8 novembre 2017 à Temuco
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© Martin BERNETTI / AFP/Archives
Des camions appartenant à des compagnies forestières incendiés lors d'affrontements entre la police et des membres du peuple Mapuche, le 8 novembre 2017 à Temuco
© Martin BERNETTI / AFP/Archives

Le pape François se rend mercredi en plein territoire Mapuche, ces indigènes chiliens qui revendiquent leurs terres ancestrales et comptent sur le souverain pontife pour faire avancer leur combat, mené parfois de manière violente.

Lorsqu'il arrivera à Temuco, capitale de la région de l'Araucania, à quelque 800 km au sud de Santiago du Chili, François se trouvera dans une zone rythmée par des actions d'une minorité radicalisée visant des entreprises forestières mais aussi des églises.

"Le programme de la visite du Saint Père reflète sa préoccupation pour une zone qui connu des tensions importantes, avec qui il veut partager un message de paix et où il espère délivrer des paroles d'espoir qui contribuent au rapprochement entre les personnes", selon le coordinateur national de la visite papale au Chili, Fernando Ramos.

Près de 400.000 personnes sont attendues à la base aérienne de Maquehue où François célèbrera une "messe pour l'intégration des peuples" rendant hommage aux premiers habitants du Chili et de l'Argentine. Il rencontrera ensuite les représentants de la communauté.

Les Mapuches (7% de la population chilienne) occupaient un vaste territoire au centre de ce pays longiligne à l'arrivée des conquistadors espagnols au Chili en 1541.

Cette frontière naturelle a continué d'exister durant la conquête, jusqu'à ce que la zone soit occupée durant une vingtaine d'années par l'armée chilienne à compter de 1961 afin de "pacifier" ce territoire.

Au fil des procès et des décisions de justice, ces indigènes ont été réduits à vivre sur près de 5% de leurs anciennes terres. Regroupés en petites communautés, sans espace suffisant pour cultiver le sol ou élever des animaux, nombre d'entre eux se sont vus obligés à renoncer à leur mode de vie traditionnel et à migrer vers les villes.

Depuis une vingtaine d'années, des groupes radicaux incendient des camions et des engins des entreprises forestières et affrontent la police. Une dizaine de membres de cette ethnie y ont perdu la vie.

- 'Terrorisme' -

Ceux qui commettent ce type d'actes dans le cadre de leur lutte pour récupérer leurs terres sont visés par une dure loi antiterroriste, une législation dont l'application, pour cette ethnie, a notamment été critiquée par l'ONU.

Privés de canaux de communication et critiqués par la majorité des Chiliens, les Mapuches espèrent que la visite du pape va permettre de "mettre en lumière" leur combat.

D'autant que l’arrivée du Saint Père coïncide avec le moment où cette ethnie - la plus grande du pays - commémore deux événements marquants pour la région.

Le cinquième anniversaire de l'incendie d'une maison, en janvier 2013, dans lequel avait péri un couple de personnes âgées, des descendants de colons d'origine suisse, pour lequel 11 Mapuches sont poursuivis, et le dixième anniversaire du meurtre d'un jeune activiste Mapuche, Matias Catrileo.

La communauté compte 700.000 personnes (sur les 17 millions d'habitants du Chili) au niveau de vie très bas par rapport au reste de la population.

Les 11 accusés de l'incendie, parmi lesquels la "machi" Francisca Linconao, la plus importante personnalité religieuse et médicale de cette ethnie, ont été acquittés en octobre par la justice chilienne. Mais un recours a été déposé par le ministère public et un nouveau procès doit avoir lieu en février, tandis que la "machi" a été placée en détention à domicile le jour de l'arrivée du pape au Chili.

Le jeune Catrileo de son côté, était jusqu'à son décès à 22 ans, membre de la Coordination Arauco Malleco (CAM), organisation radicale Mapuche qui revendique les incendies d'engins et camions.

"Au-delà d'attendre quelque chose (du pape), ce qu'au fond on espère c'est que le pape fasse certains gestes, qu'il dise +le combat du peuple Mapuche est juste+. Ce serait une avancée même si ici, les transformations concrètes, nous allons les obtenir nous-mêmes avec nos propres efforts", estime Ramon Llanquileo un des leaders de la CAM.

Le pape arrive à Temuco "à un moment très compliqué (...) nous sommes à un point mort"au niveau du dialogue, juge l'historien Pedro Canales.

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