Les "Invisibles", une comédie sociale sur les femmes SDF au festival d'Angoulême

Auteur:
 
Par Philippe BERNES-LASSERRE - Angoulême (AFP)
Publié le 22 août 2018 - 20:28
Mis à jour le 23 août 2018 - 12:12
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L'équipe des "Invisibles", mercredi 22 août 2018 au festival du film d'Angoulême: l 'actrice Corinne Masiero, le réalisateur Louis-Julien Petit, l'actrice Deborah Lukumuena and la productrice Liza Ben
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© Yohan BONNET / AFP
L'équipe des "Invisibles", mercredi 22 août 2018 au festival du film d'Angoulême: l 'actrice Corinne Masiero, le réalisateur Louis-Julien Petit, l'actrice Deborah Lukumuena and la
© Yohan BONNET / AFP

Elles sont des dizaines, passées par la rue, la violence, la prison, accueillies dans un centre de jour pour femmes SDF, qu'une mairie du Nord va bientôt fermer. Leur résilience, leur combat, uni aux travailleuses sociales, est la trame du nouveau film de Louis-Julien Petit, ode poignante et lumineuse aux "résistantes modernes".

Une quinzaine d'actrices non-professionnelles, qui ont connu la rue, mettent leur vérité au service des "Invisibles" (sortie le 9 janvier), aux côtés de Corinne Masiero, une fidèle de Petit, d'Audrey Lamy ou de Deborah Lukumuena ("Divines") pour une comédie sociale entre émotion et éclat de rire, présentée mercredi au Festival du film francophone d'Angoulême. Une épopée tragicomique, résolument ancrée dans le réel.

Et pour cause. Le réalisateur de 34 ans, salué pour Discount (2015) a passé un an bénévole en centres d'accueil pour femmes, à Grenoble et Paris notamment, pour comprendre et trouver le ton juste. "Quand on traite un sujet comme celui-ci, on a intérêt à être juste...", explique-t-il à l'AFP en marge de l'avant-première de son troisième long métrage. Un film inspiré d'un documentaire/livre sur les femmes SDF de Claire Lajeunie en 2014.

Ses "Invisibles" sont bien sûr les femmes accueillies, qui forment 40% des sans-abris, mais souvent se griment, se cachent pour échapper à la violence de la rue, explique-t-il. Mais aussi "les personnes qui ne sont pas aidées à aider les autres, ces travailleuses sociales et leur combat acharné, sans reconnaissance".

"Mon idée c'était un film sur les résistantes modernes, des femmes qui vont s'unir et combattre ensemble, en se disant +OK, on nous met de côté, donc on va prendre notre destin en mains, trouver une solution". Solution qui, dans le film, passe par redécouvrir "qui" étaient ces femmes, ce qu'elles faisaient "avant", leurs compétences, leur formation, etc

Dans "Les Invisibles", travailleuse sociales et SDF jettent tout dans la bataille pour réinsérer a tour de bras avant la fermeture du centre, leur "Cour des miracles". Usant de subterfuges (mensonges, falsification, piston) mais aussi d'ateliers de prise de confiance, entretiens d'embauche à blanc. Et se muant de facto en centre d'accueil 24/24h, en toute illégalité.

- "C'est interdit, mais c'est juste"-

"Leur combat est une utopie, c'est ce qui m'intéressait. Ce n'est pas le but qui est important, c'est l'action, l'action commune, le vivre ensemble. Se dire, +c'est interdit, mais c'est juste, en tout cas+", souligne Louis-Julien Petit, qui cite comme inspiration des Ken Loach, Stephen Frears, films sociétaux de la Grande-Bretagne post-Thatcher. Mais aussi "La vie est belle" de Roberto Benigni (1997), qui "arrive à parler de l'horreur, de manière comique".

"Les Invisibles" effleure, mais évite l'écueil de l'acharnement contre une administration aveugle et lente. "Cela ne m'intéressait pas, et cela a déjà été fait magnifiquement par Loach dans +I, Daniel Blake+, un chef d'oeuvre...+", glisse Louis-Julien Petit.

En revanche, dans la place laissée individuellement aux "accueillies", avec chacune son langage, sa personnalité, sa trajectoire, ses réparties, il ne perd jamais son fil rouge humain --et comique. "Eh, t'as pas le monopole de la réussite, Chantal..!", lance une SDF à une autre.

Chantal. "Un emblème de ce film, le symbole de la résilience", dit Corinne Masiero, du personnage joué par Adolpha van Meerhaegue, sa "pote". Une ex-SDF de 70 ans, qui comme dans le film a connu la prison --elle tua son mari violent-- et la rue. "Une vraie vie de merde". Et donne aujourd'hui des lectures avec Corinne Masiero (des textes qu'elle écrivit en prison), de petits ateliers artistiques, à son appartement, et "continue de faire le bien autour d'elle".

"Ce film dénonce un truc et demande des solutions à ceux qui le regardent", s'emporte l'actrice roubaisienne engagée à gauche. "Il y a des tas d'associations, des gens qui se bougent le cul, mais les politiques maintenant faut qu'ils prennent leur responsabilités. Pas demain. Maintenant".

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