L'ouverture de la culture aux militants, l'autre "bataille" de la CGT

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Par Bertille OSSEY-WOISARD - Dijon (AFP)
Publié le 15 mai 2019 - 11:52
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Philippe Martinez donne une conférence de presse sur le thème de la culture, le 29 mars 2017 à Paris
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© BERTRAND GUAY / AFP/Archives
Philippe Martinez donne une conférence de presse sur le thème de la culture, le 29 mars 2017 à Paris
© BERTRAND GUAY / AFP/Archives

En 1946, la CGT milite pour la création du festival de Cannes et des cégétistes construisent bénévolement le palais. Soixante-dix ans plus tard, Philippe Martinez essaie de sensibiliser les militants à la culture, un combat pas toujours compris en interne.

"La culture permet d'avoir une ouverture d'esprit, c'est une bataille politique", relève Lamia Begin, chargée de développer des initiatives culturelles pour "démocratiser le monde de la culture".

Par exemple au festival d'Avignon, où depuis trois ans, chaque année près de 200 adhérents CGT bénéficient d'ateliers de professionnels du spectacle. Il y a aussi l'"Ecole du spectateur", un stage CGT autour du spectacle vivant, proposé à des élus lors de ce festival. Cette année, Philippe Martinez doit participer à des débats avec le public portant sur le monde de la culture.

En 2017, lui et son homologue de FO d'alors, Jean-Claude Mailly, organisent une journée débat pour réfléchir à un rapprochement des mondes de la culture et du travail.

"Il y a besoin de renouer avec l'éducation populaire, avec cette forme de respect du monde culturel et intellectuel pour la classe populaire. Il y a besoin de discuter d'égal à égal, sans complexe de supériorité ou d'infériorité", avait-il dit, quand Jean-Claude Mailly pointait les "liens distendus" entre le "monde de la culture et le mouvement ouvrier".

La CGT a fait de "la culture le fil rouge" de son congrès, qui se tient cette semaine à Dijon, programmant des rendez-vous gratuits et ouverts à tous, dont une représentation de la soprano Shigeko Hata et un spectacle de danse contemporaine.

Au fil de la semaine, les militants ont aussi pu ou vont voir un spectacle de cabaret-cirque, écouter Sanseverino ou participer à un échange avec la sociologue Monique Pinçon-Charlot autour de son ouvrage "Le président des ultra-riches".

- "Ce n'est pas pour nous" -

La CGT participe, organise ou coorganise d'autres festivals qu'Avignon, comme celui du cinéma social de Narbonne, du livre de jeunesse de Rouen ou de la marionnette à Charleville-Mézières.

"Le but est que ça se multiplie", souligne Mme Begin, afin que les militants "arrêtent de se dire le cinéma, le théâtre, la littérature, +ce n'est pas pour nous+, +je ne comprends pas+". Mais, selon Denis Gravouil (CGT-Spectacle et Action culturelle), "il faut convaincre une partie des militants de la CGT".

Il raconte qu'à chaque Comité confédéral national -- direction élargie de la CGT comprenant ses secrétaires généraux de fédérations et unions départementales, qui se réunissent tous les trois mois -- il y a une projection ou un spectacle, mais "on ne fait pas forcément le plein".

On est aussi loin de l'époque où des militants construisaient bénévolement le palais du festival de Cannes en 1947, un épisode raconté par l'historien Tangi Perron dans un livre sur le syndicalisme et le cinéma ("L'écran rouge"). Ce palais sera par la suite détruit et remplacé par celui qui accueille le festival actuellement.

La CGT a aussi fortement milité pour la création même du festival, un an plus tôt.

"Il aurait dû avoir lieu en 1939 à l'initiative de Jean Zay (ministre des Beaux-Arts de l'époque), appuyé par les Etats-Unis, intéressés alors d'avoir un festival en Europe, pour répondre au festival de la Mostra de Venise, dans l'Italie fasciste", souligne Tangi Perron. "A la libération, les Etats-Unis n'étaient plus intéressés d'avoir un festival qui gênerait Hollywood et la CGT a beaucoup insisté pour que le festival reprenne", relate-t-il.

"Sans le rôle que la CGT a joué, le festival n'aurait peut-être pas eu lieu", avance Denis Gravouil, un de ses administrateurs. Si elle ne participe pas à la sélection des films, la CGT a son mot à dire pour que le financement privé ne dépasse pas la barre de 50%, dit-il.

Dès 1946, le syndicat y présente un film, "La bataille du rail" de René Clément, qui sera primé. Il finance aussi "La Marseillaise" de Jean Renoir en 1938 --auquel participeront des centaines de militants figurants--, et "Les copains du dimanche", en 1956, où Jean-Paul Belmondo décroche son premier rôle.

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